122 kilomètres en dix jours. Traverser à la nage, le lac le plus haut du monde. Oser défier le Titicaca au Pérou. Tel est le pari fou de la Guyanaise Malia Metella en novembre prochain. À ses côtés, Théo, nageur handisport et Matthieu, éco-aventurier. Bienvenue dans leur monde.
En 2004, elle s'illustre déjà dans l'eau. Jeux Olympiques d'Athènes. Malia Metella devient la première Guyanaise de l'histoire à décrocher une médaille olympique. De l'argent sur le 50 mètres nage libre. Malia s'exprime sur les courtes distances. 50 ou 100 mètres. Dix-sept ans plus tard, elle change de registre. Oublions les piscines chauffées. Vive les lacs. Froids de préférence. Pour les distances, le projet veut qu'elle nage désormais deux heures. Minimum. Sans s'arrêter. Tout en tirant une embarcation. Ce n'est pas drôle sinon.
Et quitte à se lancer dans une telle aventure, autant qu'elle soit collective. Pour ce défi Titicaca, Malia rejoint donc Théo Curin, nageur paralympique et Matthieu Witvoet, aventurier passionné d'écologie. "Cela me fait peur mais c’est aussi très excitant, déclare la vice-championne olympique. On va sortir de notre zone de confort, nager en milieu naturel pendant plusieurs jours. Le dépassement de soi, la solidarité et le partage, c’est une aventure partagée à trois et qui restera à jamais gravée dans notre mémoire."
Malia a replongé
Fin 2009, la Guyanaise met fin à sa carrière de nageuse. À 27 ans, elle veut passer à autre chose. Au revoir la femme poisson. Vivre dans l'eau, c'est bien terminé. Malia a suffisamment donné. Merci. Aussi en septembre 2020, lorsqu'Anne Bayard, l'agent de Théo Curin et cheffe du défi Titicaca la contacte, elle commence par éclater de rire. "Elle ne fréquentait plus les piscines depuis dix ans, nous confirme Anne. Alors se préparer à nager 120 kilomètres… Puis très vite, elle m'a posé la question qui tue : comment vais-je faire avec ma coupe afro ?" Malia Metella demande ensuite un petit délai de réflexion. Le temps de contacter Stéphane Lecat, son ancien entraîneur. Une heure plus tard, elle rappelle Anne Bayard pour lui donner son accord. Ferme et définitif.
Il reste alors quatorze mois pour monter l'opération. Traverser le lac Titicaca au Pérou. En huit à dix jours. Trois nageurs dans l'équipe. Trois nageurs qui ne se connaissent pas. Mais ça va vite changer. "La connexion entre eux trois a été quasiment immédiate, raconte Anne Bayard. Ils savent qu'ils se préparent à vivre quelque chose de dingue. D'où cette complicité entre eux. Ils passent leur temps à se chambrer. C'est extraordinaire."
1 traversée / 3 défis
En novembre 2021, le défi Titicaca sera tout d'abord sportif. Malia Metella et Théo Curin ont su briller en piscine sur des distances courtes. Rien à voir avec ce qui les attend au Pérou. "Ils passent du sprint à la très longue distance !" s'amuse la cheffe du projet. Un défi donc sportif mais aussi physique. "Ils doivent apprendre à nager dans le froid. Il ne fera pas plus de dix degrés dans les eaux du Titicaca. D'où l'importance de la préparation spécifique et les conseils du nutritionniste afin que les organismes prennent suffisamment de poids pour supporter le froid."
Reste le défi technologique. Les trois nageurs feront la traversée en totale autonomie. Pas de bateau suiveur. Juste une embarcation créée pour l'occasion qu'ils vont devoir tracter. Un radeau unique de quelques 350 kilos. À l'intérieur : de quoi manger, se changer ou se soigner. Y dormir aussi. Très peu de confort et beaucoup d'incertitudes. "Ils partent dans l'inconnu dans pas mal de domaines, reconnaît Anne Bayard. Concernant le vent par exemple. Comment le radeau va-t-il dériver, la nuit ?"
Un budget conséquent
Pour ce défi Titicaca, le budget global s'établit autour de 350 000 euros. Une opération de crowdfunding est d'ailleurs en cours afin d'en financer une partie. Pour le reste, les trois nageurs peuvent déjà compter sur de gros partenaires : EDF, Unilever, Tikehau Capital, Pum & Tencate Aquavia… "Si ces grandes marques n'ont pas hésité à rejoindre le projet, c'est aussi parce que tout est pensé pour être le plus écoresponsable possible."
Un budget à boucler. Un entraînement à peaufiner. Et des formations à prévoir. Les premiers secours si besoin. Comment réparer le radeau si des problèmes se présentent ?… L'agenda des trois nageurs et de toute l'équipe du Défi Titicaca est bien chargé jusqu'en novembre. Pourtant, à écouter Anne Bayard, rien ne pourra arrêter nos trois aventuriers. "Ils ont conscience des difficultés. Mais ils s'investissent à 120 % dans le projet. Ils ne peuvent pas imaginer ne pas arriver au bout de cette aventure !"