Bordeaux : ni tables, ni devanture mais une cuisine réunionnaise qui cartonne

Camion-bar pendant 5 ans, Wayo Wayo est désormais aussi un restaurant "fantôme" de cuisine réunionnaise.
Devant la recrudescence des livraisons à domicile, des Réunionnais ont lancé, en juin, un restaurant "fantôme" : sans tables ni devanture, Wayo Wayo n’est accessible que sur internet. Enfin presque ! Car, pendant 5 ans, l’équipe a fait ses preuves avec son tuk tuk aménagé en restaurant mobile.
"Ah, il y a encore le petit message, sourit Etienne devant sa tablette. Il y a des clients qui nous mettent des petits messages." Des mots laissés sur un site ou une application, voilà les relations - exclusivement virtuelles - qu’entretiennent les restaurateurs avec leur clientèle. Car ici, pas de consommateurs, ni même de table, les seuls allées et venues sont celles des livreurs à vélo dans une rue qui n’est ni passante, ni commerçante.

Dans l’un des fameux cours de Bordeaux, l’équipe du Wayo Wayo a trouvé le local idéal, 30 m² à peine, pour installer une cuisine sans débourser trop d’argent. Et l’affaire marche : une centaine de commandes le vendredi et le dimanche, leurs plus grosses soirées de la semaine.

Au menu : rougail saucisses (évidemment !), poulet au coco à la mahoraise, cari crevettes au combava, bouchons, bonbons piments… En résumé, un mélange des atouts culinaires de leur île natale.    
Le rougail saucisses, ici en cours de préparation, est l’une des spécialités de Clément, cofondateur de Wayo Wayo.

Pour que ça fonctionne, l’équipe s’est associée à deux poids lourds de la livraison à domicile. Et c’est tout. Pas besoin de dresser des tables ou d’accueillir des clients. "Pour nous, ça ne fait pas de frais de service en salle, pas d’encaissement non plus, tout passe par ces plateformes, résume Étienne. Je n’étais pas convaincu au tout départ par cette possibilité-là, mais on constate que rien qu’en passant par des plateformes, ça marche !"                                                                                  

Un camion-bar comme à La Réunion

Derrière ce projet de restauration réunionnaise à Bordeaux, il y a Étienne Douet et Clément Descol. Originaires de La Bretagne à Saint-Denis de La Réunion, ils se connaissent depuis l’enfance. Et tous les deux ont quitté leur île pour faire leurs études dans l’Hexagone au début des années 2000. Avant de se lancer ensemble dans une nouvelle aventure en 2014 : un restaurant ambulant pour partager avec les Bordelais leur amour de la cuisine péi.                                                                                                                                                                     
Les amis d’enfance ont surfé sur deux modes : la restauration ambulante et un certain attrait pour les véhicules originaux. Leur camion-bar a pris la forme d’un tuk tuk. À Bordeaux, quelques spécimens baladent des touristes aux jambes épuisées, mais seul le tuk tuk rouge et blanc de Wayo Wayo propose de la cuisine réunionnaise. Il écume les marchés, les festivals et a noué un partenariat avec une grande entreprise de Bacalan, au nord de l'agglomération bordelaise, dépourvue de cantine.
Le tuk tuk rouge et blanc de Wayo Wayo au moment du chargement, en fin de matinée.
 

Un concept propre et prometteur

L’autre atout du tuk tuk, c’est qu’il est 100% électrique. Chez Wayo Wayo, les barquettes et les couverts sont recyclables et biodégradables. La grande majorité des produits est typique de l’Océan Indien et issue de l’agriculture biologique ou, au moins, Label Rouge pour les viandes.

"On n’est pas dans des produits d’entrée de gamme en termes de prix, analyse Joël Salles, le commercial de Wayo Wayo qui développe le côté durable du projet. Il y a toute la partie environnement, on est sur un food truck électrique et toute la partie barquettes qui sont biodégradables et compostables."
Le jeudi et le vendredi midi, le tuk tuk fait partie des 4 camions-bars à servir les 1400 salariés d’une entreprise située à Bacalan.

Joël est le seul "métro" de la bande. Ancien cadre de Cdiscount, il a rejoint Wayo Wayo en tant qu’associé pour développer le projet. Deux autres personnes ont été embauchées cette année : un cuisinier et un employé polyvalent, tous deux réunionnais. Quant aux deux fondateurs, il en tirent désormais l'intégralité de leurs revenus. Clément s’y consacre à plein temps depuis le début, Étienne a quitté son emploi il y a deux ans. 

Désormais, ils font tourner ensemble leur nouveau restaurant "fantôme", tout en continuant à déplacer leur tuk tuk péi sur les routes bordelaises. Pour assurer le rythme, une nouvelle embauche pourrait avoir lieu prochainement. 
Joël est désormais l’associé d’Etienne et Clément. Derrière lui, Nicolas vient de rejoindre l’équipe.