Dans l’auberge de jeunesse où sont accueillis les Calédoniens, on attend quelques notes de piano, du ukulélé et des rires. Si la plupart des 160 jeunes ont déjà rejoint la ville où ils vont poursuivre leurs études, il en reste encore une petite dizaine sur le départ, à Paris.
Parmi eux, Rosemay Wenehoua, 22 ans, originaire de Lifou. Si elle est déjà venue dans l’Hexagone, elle n’avait jamais mis les pieds dans la capitale. Quand on lui demande si c’est excitant ou effrayant, elle répond du tac au tac : "Les deux ! C’est grand, il y a plein de gens, c’est toujours en mouvement. J’avais peur au début de me perdre, mais ce n’est pas si mal, on apprend comme ça à retrouver son chemin."
Le temps file, elle doit partir à la gare, direction Montpellier où elle va suivre un master des sciences du langage. Là-bas, elle ne sera pas totalement perdue, car elle va retrouver sa sœur aînée qui l’héberge, en attendant qu’elle trouve un logement. Mais en attendant, elle stresse un peu : "J’appréhende le voyage en train car c’est la première fois que je le prends", souffle-t-elle.
Bino Chombeau, lui aussi originaire de Lifou, n’est pas non plus très à l’aise à l’idée de voyager en train. Alors qu’il devait réaliser un trajet avec une correspondance, il a finalement décidé de changer son billet à la dernière minute pour pouvoir prendre un train direct, quelques heures plus tard. La très grande majorité des jeunes Calédoniens n’ont en effet jamais pris le train et ont besoin d’être accompagnés.
"Ils m'ont aidé pour tout ce qui me manquait"
C’est pour cette raison que la Maison de la Nouvelle-Calédonie propose aux étudiants tout juste arrivés plusieurs ateliers, comme l’explique Francis Ixeko, adjoint au chef du service étudiant par intérim. "Il y a l’atelier logement pour les briefer sur la recherche de logement ; l’atelier train pour ceux qui prennent pour la première fois le train, dans lequel ils vont voir tous les types de transport qui peuvent exister en France."
Sont également organisés des ateliers pour s’inscrire à la sécurité sociale de l’Hexagone et à une mutuelle, ou encore pour créer un compte en banque.
Pour Thierry Ihage, 22 ans, c’est un soulagement "de fou" d’être ainsi entouré par la Maison de la Nouvelle-Calédonie dès son arrivée à l’aéroport : "Ils m’ont aidé pour le logement, ils m’ont donné beaucoup de contacts ; pour le compte en banque ; pour le train… Pour tout ce qui me manquait."
C’est aussi dans cet esprit de solidarité que la Maison de la Nouvelle-Calédonie "a embauché en job d’été des étudiants qui sont bien ancrés dans la vie métropolitaine et qui vont permettre d’opérer les transferts depuis l’auberge vers la gare de départ", poursuit l’adjoint au chef de service étudiant.
Ce matin, c’est Samuel qui doit emmener Thierry à la gare, tandis que les autres partiront un peu plus tard dans la journée. Un moment de retrouvailles pour les deux jeunes hommes qui se connaissent déjà : ils faisaient de la danse ensemble en Nouvelle-Calédonie.
"Ils vont être fous"
Une fois arrivés dans le métro, Samuel parle à Thierry de sa prise d’autonomie depuis qu’il étudie à La Rochelle. "Tu vas t’épanouir", lui assure-t-il.
En sortant du métro, Thierry, par ailleurs créateur de contenus, ne peut s’empêcher de filmer l’immense hall de la gare Montparnasse avec ses magasins et son dédale d’escalators pour en faire une story pour sa communauté : "C’est tellement différent, ils vont être fous quand ils verront la story", souffle-t-il.
L’heure du départ approche pour Thierry qui appréhende un peu cette nouvelle vie : "Ça fait peur à tout le monde, l’inconnu, reconnaît-il, philosophe. J’ai hâte d’être stable, de connaître la ville, d’aimer ce que je fais, d’avoir des amis sur qui compter."
Des amis, il en a déjà comme Samuel qui lui rappelle que La Rochelle n'est pas si loin de Bordeaux. La séparation ne sera que temporaire.