Chlordécone: pourquoi les plaintes n'ont pas (encore?) abouti ?

Verra-t-on un jour des individus mis en examen dans l’affaire du chlordécone? C’est l’espoir suscité par les conclusions de l’enquête menée depuis 2013. Les plaignants ont reçu récemment le dossier. Harry Durimel, avocat guadeloupéen, lève un coin du voile pour la1ère.

Il est tenu au secret de l’instruction. Pourtant Harry Durimel, avocat et militant écologiste, accepte de s’exprimer. “Il est de mon devoir d’informer le peuple de l’avancement d’une plainte déposée, il y a 12 ans, en son nom et dans son intérêt.” Le Guadeloupéen fait partie de la dizaine d’avocats qui ont accompagné plusieurs associations. Elles ont porté plainte contre X en février 2006 pour mise en danger d’autrui et administration de substances nuisibles ayant porté atteinte à l’intégrité physique d’autrui.
 

Vers des mises en examen?

Selon le président de l’association Rev’Guadeloupe, l’enquête confiée en 2013 à l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP) a porté ses fruits. Depuis 2014, les gendarmes ont mené des investigations afin d’identifier les acteurs de l’affaire chlordécone. Des fonctionnaires et décideurs politiques, d’une part, les donneurs d’ordre privés d’autre part. Parmi eux, les importateurs, les distributeurs, les revendeurs du chlordécone et les groupements de planteurs qui ont utilisé la fameuse molécule.

Selon Harry Durimel, “le juge d’instruction dispose d’indices graves et concordants suffisants pour mettre en examen les personnes identifiées."


Trois magistrats instructeurs ont planché sur ce dossier. Aujourd’hui, Brigitte Jolivet, magistrate au pôle santé du Tribunal de Grande Instance de Paris, est en charge de l’instruction de l’affaire. “Nous ne pouvons pas communiquer sur les instructions en cours”, nous a indiqué le TGI de Paris.

 

 

 

Douze ans de procédure

Il aura fallu beaucoup de ténacité aux avocats dans le volet judiciaire de l’affaire. Parmi les obstacles à surmonter, l’utilisation des nombreux recours par le ministère public afin de contester la recevabilité des plaintes. Six ans d’attente. Depuis 2006, des plaintes contre X ont été déposés par des associations en Guadeloupe et en Martinique. Des plaintes désormais instruites en même temps, dans un même dossier.
 

 


Ces associations veulent que les responsabilités dans la pollution des Antilles françaises par le chlordécone soient déterminées. Ce pesticide était utilisé pendant plus de 20 ans dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, un insecte nuisible.

 


Une note sera adressée dans les prochains jours par les avocats à la juge d’instruction en charge de l’affaire. Objectif: demander d’autres investigations et persuader la magistrate de passer à une “phase plus active de mise en examen”.

 

 

 

Un front uni ?

En Martinique, la semaine dernière, deux lanceurs d'alerte ont appelé à un front populaire uni contre le chlordécone. Raphaël Confiant et Louis Boutrin avaient été les premiers à révéler le scandale dans leur livre "Chronique d'un empoisonnement annoncé" paru en 2007 aux éditions L'Harmattan. Regardez le reportage de Martinique 1ère :