Ils sont plus de 300 à espérer revenir en Polynésie. Quelques 300 Polynésiens ou résidents et des dizaines d’étudiants sont bloqués dans l’Hexagone. Le gouvernement de la Polynésie et le Haut-commissariat ne leur donnent pour l’instant aucune perspective de retour.
Britte Neagle est arrivée le 3 mars à Paris avec son compagnon. Elle se faisait une joie d’assister au mariage de sa fille à Valence. Mais le futur marié militaire a dû partir en mission plus tôt que prévu à cause du Covid-19. Le mariage a été reporté.
En plus, Britte Neagle et son compagnon n’ont pas pu repartir en Polynésie. Leur vol du 22 mars a été annulé sans aucune possibilité de report. Depuis, ils vivent confinés chez leur fille dans un petit appartement à Valence avec deux enfants de 10 mois et 4 ans, sans savoir quand ils pourront retourner chez eux.
A Arue où Britte et son compagnon vivent, leurs cinq enfants de 15 à 21 ans les attendent. "Ma jeune sœur de Moorea est venu s’occuper d’eux, mais là elle va devoir repartir avec la réouverture des écoles, explique Britte. Alors je gère à distance mes enfants. C’est compliqué pour la nourriture. L’autre fois je leur ai indiqué que la mairie avait mis en place une aide alimentaire. Ils y sont allés. Globalement, je ne dors pas très bien. On regarde les infos la nuit avec le décalage horaire pour suivre la situation sur place".
Depuis cette date, Ils vivent chez la sœur de Roland dans le 13e arrondissement à Paris. Mais leur vie se trouve à Raiatea où ils possèdent une pension de famille. Ils rêvent de rentrer sur leur île, entretenir le jardin, mais pour l’instant rien ne bouge. "Nos deux fils nous attendent. Il faudrait que ça se termine. On a fait des courriers au ministère du Tourisme à Tahiti, au président de la Polynésie, au ministère de la Santé local, aucune réponse. Le pire c’est de n’avoir aucune visibilité sur la suite".
La mère de famille nombreuse âgée de 45 ans est inquiète. "J’ai épuisé tous mes congés. J’ai eu mon directeur au téléphone, je dois passer en congés sans solde". Son compagnon, chauffeur livreur pour une société pharmaceutique est dans la même situation. Le couple a perdu toutes ses primes d’activités. Britte qui travaille à la Fenuama, le service de gestion des déchets à Papeete pouvait améliorer son salaire avec ses primes. Là elle se demande de quoi sera fait son avenir et celui de ses enfants.
Gilles Osmont était venu en février dernier de Tahiti avec son fils de 16 ans. Le jeune homme est un jeune champion de tennis et il a participé à cette occasion à plusieurs compétitions en Bolivie et au Pérou. A leur retour à Paris, ils devaient rentrer en Polynésie avec le vol du 20 mars affrété par Air France. "Le vol a été annulé, j’ai cherché à changer de compagnie, en vain. Tous les vols ont été successivement arrêtés".
Depuis, le père et son fils se sont confinés à Nantes dans la famille. "Un ami nous a prêté un appartement, raconte Gilles Osmont. Mais ce n’est pas simple, ce que nous voulons c’est rentrer chez nous !" A Tahiti, sa femme et son autre enfant de 7 ans se désespèrent de les voir revenir.
Depuis le début de la crise, le gouvernement de la Polynésie procède au rapatriement des personnes évacuées sanitaires grâce à la rotation mise en place tous les dix jours par Air Tahiti Nui pour le fret. Les touristes bloqués en Polynésie ont pu également être rapatriés. En revanche, les quelques 300 Polynésiens livrés à eux-mêmes dans l’Hexagone n’ont pour l’instant aucune perspective de retour proche.
Britte Neagle a elle aussi rempli un formulaire de la délégation polynésienne à Paris, mais elle n’a reçu aucune aide. "Je ne pense pas que Monsieur Fritch soit responsable de la situation, plaide Britte, mais il faut qu’il pense à nous. On ne peut pas rester jusqu’en juillet ici".
Cette Tahitienne a beau positiver, se réjouir de passer du temps avec ses deux petits enfants de 10 mois et quatre ans à Valence, l’avenir lui semble bien compliqué. "Je suis protestante, croyante pratiquante, ça m’aide beaucoup dans cette situation", confie Britte.
Juriste de formation, Emmanuelle avaient des perspectives d’emploi à Tahiti, de même que son mari. Son grand-père de 86 ans se faisait une joie de retrouver sa petite-fille sur le Fenua. Bref une nouvelle vie devait commencer. Le vol était prévu sur Frenchbee le 20 mars.
Mais la suite a tourné au cauchemar. "Le vol a été annulé sans espoir de report. On s’est retrouvés sans logement. Heureusement la famille nous a hébergés les premières semaines en Vendée. Il a fallu réinscrire mon fils en catastrophe à l’école en région parisienne pour qu’il ne soit pas déscolarisé. Pendant ce temps tout notre déménagement est arrivé au port de Papeete et nous devions continuer à payer le loyer de l’appartement à Papara".
Emmanuelle se dit complètement désemparée. "Tous les pays ont rapatrié leurs populations, mais pas nous. Comment le président de la Polynésie peut-il nous dire qu’il n’y a pas de capacité d’accueil ? J’ai toujours été fière d’être Tahitienne, mais là, en ce moment, franchement, j’ai honte", dit-elle.
Emmanuelle Lenoir suit de près le groupe Facebook qui regroupe les Polynésiens bloqués dans l’Hexagone. "Ça nous fait du bien, mais en même temps c’est très dur car il y a des gens en souffrance dans des situations vraiment impossibles. On s’entraide, mais c’est éprouvant".
"Ça devient insupportable. Ma fille de 11 ans fait des crises d’angoisse. On passe vraiment pour des pestiférés, se désole Yannick Hersché. En plus, sur le plan financier, cela devient compliqué. J’ai épuisé mes congés, je suis passé désormais en congés sans solde. C’est un gouffre sans fin. Au niveau psychologique, ne pas savoir quand on va rentrer c’est vraiment dur".
A la délégation de la Polynésie française à Paris contactée par Outre-mer la 1ère, on est bien conscients du problème. "La délégation travaille avec le délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d'Outre-mer, Maël Disa. Désormais les Polynésiens qui sont en grande difficulté peuvent se retourner vers la mairie où ils résident pour demander des aides alimentaires et au logement".
A Paris, le standard de la délégation est "submergé" d’appels. Les services invitent les Polynésiens ou résidents en souffrance à leur écrire à cette adresse : secdel@delegation.gouv.fr ou à les contacter sur messenger à travers la page Facebook de la délégation.
"Nous sommes très attentifs aux appels au secours et nous les signalons", déclare un responsable de la délégation polynésienne à Paris. "Pour les étudiants, nous les invitons à se faire connaitre auprès de la délégation interministérielle à l'égalité des chances des Français d'Outre-mer".
En plus, Britte Neagle et son compagnon n’ont pas pu repartir en Polynésie. Leur vol du 22 mars a été annulé sans aucune possibilité de report. Depuis, ils vivent confinés chez leur fille dans un petit appartement à Valence avec deux enfants de 10 mois et 4 ans, sans savoir quand ils pourront retourner chez eux.
Des adolescents livrés à eux-mêmes
A Arue où Britte et son compagnon vivent, leurs cinq enfants de 15 à 21 ans les attendent. "Ma jeune sœur de Moorea est venu s’occuper d’eux, mais là elle va devoir repartir avec la réouverture des écoles, explique Britte. Alors je gère à distance mes enfants. C’est compliqué pour la nourriture. L’autre fois je leur ai indiqué que la mairie avait mis en place une aide alimentaire. Ils y sont allés. Globalement, je ne dors pas très bien. On regarde les infos la nuit avec le décalage horaire pour suivre la situation sur place".
"Des pestiférés"
"On se sent abandonnés et considérés comme des pestiférés", déclare Marie Marti. Avec son mari, Roland, elle était venue rendre visite à sa belle-mère dans l’Hexagone en février. Ils devaient repartir en Polynésie le 20 mars. "Le vol a été annulé et il a été impossible de trouver un autre vol", déclare-t-il.Depuis cette date, Ils vivent chez la sœur de Roland dans le 13e arrondissement à Paris. Mais leur vie se trouve à Raiatea où ils possèdent une pension de famille. Ils rêvent de rentrer sur leur île, entretenir le jardin, mais pour l’instant rien ne bouge. "Nos deux fils nous attendent. Il faudrait que ça se termine. On a fait des courriers au ministère du Tourisme à Tahiti, au président de la Polynésie, au ministère de la Santé local, aucune réponse. Le pire c’est de n’avoir aucune visibilité sur la suite".
Congés sans solde
Britte Neagle qui fait partie du même groupe Facebook Résidents de Polynésie bloqués en France que Roland et Marie a elle aussi écrit à droite et à gauche. "J’ai écrit avec le groupe au Président de la Polynésie, aux ministres locaux. On n’a reçu aucune réponse. J’ai même écrit à Emmanuel Macron. On m’a répondu mais ça n’a pas résolu le problème".La mère de famille nombreuse âgée de 45 ans est inquiète. "J’ai épuisé tous mes congés. J’ai eu mon directeur au téléphone, je dois passer en congés sans solde". Son compagnon, chauffeur livreur pour une société pharmaceutique est dans la même situation. Le couple a perdu toutes ses primes d’activités. Britte qui travaille à la Fenuama, le service de gestion des déchets à Papeete pouvait améliorer son salaire avec ses primes. Là elle se demande de quoi sera fait son avenir et celui de ses enfants.
Un groupe sur Facebook
Ils sont ainsi plus de 300 Polynésiens ou résidents et plusieurs dizaines d’étudiants à espérer rentrer sur le Fenua. Mais les jours passent et rien ne se passe. Gilles Osmont, informaticien retraité à Tahiti ne ménage pas ses efforts pour faire évoluer la situation. Lui et bien d’autres ont mis en place le groupe Facebook qui rassemble déjà 2470 membres. Ils essaient de faire connaître leur mésaventure aux médias.Gilles Osmont était venu en février dernier de Tahiti avec son fils de 16 ans. Le jeune homme est un jeune champion de tennis et il a participé à cette occasion à plusieurs compétitions en Bolivie et au Pérou. A leur retour à Paris, ils devaient rentrer en Polynésie avec le vol du 20 mars affrété par Air France. "Le vol a été annulé, j’ai cherché à changer de compagnie, en vain. Tous les vols ont été successivement arrêtés".
Depuis, le père et son fils se sont confinés à Nantes dans la famille. "Un ami nous a prêté un appartement, raconte Gilles Osmont. Mais ce n’est pas simple, ce que nous voulons c’est rentrer chez nous !" A Tahiti, sa femme et son autre enfant de 7 ans se désespèrent de les voir revenir.
Et la Nouvelle-Calédonie ?
"Je ne comprends pas. Pourquoi ne pas faire un plan de rapatriement comme en Nouvelle-Calédonie ? L’argument du président de la Polynésie c’est de dire qu’il n’y a pas de places pour nous placer en quarantaine à notre arrivée. Mais ce n’est pas vrai, il y a des hôtels en Polynésie !", s'exclame Gilles Osmont.Depuis le début de la crise, le gouvernement de la Polynésie procède au rapatriement des personnes évacuées sanitaires grâce à la rotation mise en place tous les dix jours par Air Tahiti Nui pour le fret. Les touristes bloqués en Polynésie ont pu également être rapatriés. En revanche, les quelques 300 Polynésiens livrés à eux-mêmes dans l’Hexagone n’ont pour l’instant aucune perspective de retour proche.
"C'est du bricolage"
Gilles Osmont comme d’autres ont interpellé les autorités locales de Polynésie, le haut-commissariat, en vain... Ainsi que les députés. "Les trois députés de Polynésie ont plaidé notre cause via la délégation polynésienne à Paris, précise-t-il. Des aides ont été débloquées. Moi j’ai eu 100 euros, dit-il. Mais c’est du bricolage. Plus on tarde et plus le problème grossit. On bouffe nos économies et personne ne fait rien".Britte Neagle a elle aussi rempli un formulaire de la délégation polynésienne à Paris, mais elle n’a reçu aucune aide. "Je ne pense pas que Monsieur Fritch soit responsable de la situation, plaide Britte, mais il faut qu’il pense à nous. On ne peut pas rester jusqu’en juillet ici".
Cette Tahitienne a beau positiver, se réjouir de passer du temps avec ses deux petits enfants de 10 mois et quatre ans à Valence, l’avenir lui semble bien compliqué. "Je suis protestante, croyante pratiquante, ça m’aide beaucoup dans cette situation", confie Britte.
Déménagement
Pour Emmanuelle Lenoir, âgée de 39 ans, c’est comme si le ciel lui était tombée sur la tête. Cette Polynésienne avait prévue de s’installer à Tahiti avec son fils et son mari. Elle avait tout préparé et venait chercher sa famille en janvier. L’appartement en région parisienne a donc été rendu, son fils inscrit à l’école de Papara.Juriste de formation, Emmanuelle avaient des perspectives d’emploi à Tahiti, de même que son mari. Son grand-père de 86 ans se faisait une joie de retrouver sa petite-fille sur le Fenua. Bref une nouvelle vie devait commencer. Le vol était prévu sur Frenchbee le 20 mars.
Mais la suite a tourné au cauchemar. "Le vol a été annulé sans espoir de report. On s’est retrouvés sans logement. Heureusement la famille nous a hébergés les premières semaines en Vendée. Il a fallu réinscrire mon fils en catastrophe à l’école en région parisienne pour qu’il ne soit pas déscolarisé. Pendant ce temps tout notre déménagement est arrivé au port de Papeete et nous devions continuer à payer le loyer de l’appartement à Papara".
Emmanuelle se dit complètement désemparée. "Tous les pays ont rapatrié leurs populations, mais pas nous. Comment le président de la Polynésie peut-il nous dire qu’il n’y a pas de capacité d’accueil ? J’ai toujours été fière d’être Tahitienne, mais là, en ce moment, franchement, j’ai honte", dit-elle.
Emmanuelle Lenoir suit de près le groupe Facebook qui regroupe les Polynésiens bloqués dans l’Hexagone. "Ça nous fait du bien, mais en même temps c’est très dur car il y a des gens en souffrance dans des situations vraiment impossibles. On s’entraide, mais c’est éprouvant".
Une petite fille au Fenua
Yannick Hersché fait partie de ceux qui ont alerté parmi les premiers les médias sur la situation de ces Polynésiens et résidents bloqués dans l’Hexagone. Venu en Lorraine pour rendre visite à son beau-père malade, il s’est retrouvé confiné chez lui, sans espoir de retour avec sa femme et ses enfants à Tahiti. Outre-mer la 1ère avait raconté dans un article du 13 avril sa situation. Mais depuis rien n’a changé."Ça devient insupportable. Ma fille de 11 ans fait des crises d’angoisse. On passe vraiment pour des pestiférés, se désole Yannick Hersché. En plus, sur le plan financier, cela devient compliqué. J’ai épuisé mes congés, je suis passé désormais en congés sans solde. C’est un gouffre sans fin. Au niveau psychologique, ne pas savoir quand on va rentrer c’est vraiment dur".
A la délégation de la Polynésie française à Paris contactée par Outre-mer la 1ère, on est bien conscients du problème. "La délégation travaille avec le délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d'Outre-mer, Maël Disa. Désormais les Polynésiens qui sont en grande difficulté peuvent se retourner vers la mairie où ils résident pour demander des aides alimentaires et au logement".
A Paris, le standard de la délégation est "submergé" d’appels. Les services invitent les Polynésiens ou résidents en souffrance à leur écrire à cette adresse : secdel@delegation.gouv.fr ou à les contacter sur messenger à travers la page Facebook de la délégation.
"Nous sommes très attentifs aux appels au secours et nous les signalons", déclare un responsable de la délégation polynésienne à Paris. "Pour les étudiants, nous les invitons à se faire connaitre auprès de la délégation interministérielle à l'égalité des chances des Français d'Outre-mer".