[Coupe du monde de football 2023] Naomie Feller, la Guadeloupéenne arrivée à l'heure

L'attaquante Naomie Feller arrive à Clairefontaine-en-Yvelines, le 20 juin 2023, dans le cadre de la préparation de l'équipe de France pour la Coupe du monde 2023.
Retenue par le sélectionneur Hervé Renard, dans la liste des 23 joueuses pour la Coupe du monde féminine en Australie (20 juillet - 20 août), la Guadeloupéenne Naomie Feller, talent précoce, avance déterminée vers la compétition. À 21 ans, elle pourrait bien être la surprise côté français du mondial.

À Clairefontaine en ce début juillet, l'été et ses chaleurs étouffantes peinent à s'installer. Les joueuses de l'équipe de France féminine ont quant à elles fait tomber le bleu de chauffe pour arborer des survêtements plus confortables. À quelques jours de leur entrée en lice, les filles d'Hervé Renard ont pris le temps de recevoir une dernière fois les journalistes, un ultime rendez-vous médiatique avant d'entrer dans leur bulle en Australie. Des entretiens individualisés donc, et notre première joueuse attendue est Naomie Feller. Après quelques minutes d'attente et un balai incessant de joueuses et de journalistes, la Guadeloupéenne se présente face à nous, décontractée et souriante.

Coupe du monde féminine de football : Naomie Feller ©Carl Behary-Laul-Sirder / Samuel Piqueur

                                      

Après une longue entrevue, son regard noir, pétillant de joie d’être présente avec le groupe France, s’est figé. Interloquée, Naomie Feller nous demande : "Comment saviez-vous que j’étais de la Guadeloupe ? Généralement, les gens, ils ne savent pas..." Nous lui répondons dans la foulée : "Nous avons fait marcher nos réseaux et nous sommes Outre-mer La 1ère", ce qui lui provoque un éclat de rire. Une joie communicative, qui résume bien le personnage.

De cobaye pour son frère à championne de France

Née le 6 novembre 2001, à Paris, Naomie Feller a grandi en région parisienne. Elle commence à jouer au football très tôt, dès l’âge de quatre ans, sous l'impulsion de son frère Rudy. "Il jouait, mais il n’avait pas de grand frère, donc je lui servais de cobaye". Un sparring partner qui va très vite tomber dans la marmite : "Ça m’a plu. Lui, il a arrêté le football et moi, j'ai continué et progressé", raconte-t-elle. À sept ans, elle intègre son premier club, le FC Saint-Brice (Val-d'Oise). Quelque temps plus tard, suite au déménagement de ses parents à Creil (Oise), elle intègre le club de la ville, l'AFC Creil. Elle y reste quatre ans avant d'aller terminer sa formation à l'USC Chantilly (Oise). Dans ces deux clubs, elle joue avec les équipes masculines. Mais, à l'âge de 15 ans, ne pouvant plus jouer avec ces derniers, elle décide de s'engager en deuxième division française avec le VGA Saint Maur des Fossés (Val-de-Marne).

Naomie Feller lors du dernier point presse de l'équipe de France avant la coupe du monde

La saison suivante (2018 - 2019), la Guadeloupéenne rejoint le Stade de Reims, toujours en D2. Là-bas, Naomie Feller mûrit dans le jeu et aide son équipe à accéder à la première division dès la saison suivante, avec en prime le titre de championne de France de deuxième division. Au terme de cette saison, elle remporte aussi le championnat d'Europe U19 avec l'équipe de France féminine.

La parenthèse lyonnaise 

Arrivée en première division, lors de la saison 2019 - 2020, Naomie Feller se fait très vite remarquer en réalisant des prestations XXL contre les grosses cylindrées du championnat. Elle marque notamment contre le PSG ou encore l'Olympique Lyonnais. Après six bons premiers mois, elle signe en prêt à l'OL en janvier 2020.

Chez les championnes de France et d’Europe en titre, elle vit un rêve. La Guadeloupéenne se voit déjà évoluer aux côtés des plus grandes à l’OL, comme la Martiniquaise Wendie Renard ou encore la Guadeloupéenne Delphine Cascarino. Malheureusement, quelques mois plus tard, le championnat de France de football est arrêté à cause de la pandémie de Covid-19. L’expérience lyonnaise de Naomie Feller sera courte : elle ne jouera que trois matchs avec l'Olympique Lyonnais, en inscrivant tout de même un but, contre l’OM (victoire 8 – 0). 

Ce n’est pas une déception, parce qu’avec le peu de temps que j’ai passé là-bas, j’ai appris beaucoup de choses, notamment des grandes joueuses. Ça restera une expérience gravée et j’espère en vivre d’autres.

Naomie Feller, à Clairefontaine


Le Real Madrid lui a ouvert ses portes

Non retenues par l’OL à l’issue de son prêt, c’est le retour à la case départ, c'est-à-dire à Reims. Déterminée à poursuivre sa progression, la Guadeloupéenne voulait rebondir en retournant dans son club, mais sa marche en avant est freinée par une grave blessure. Le 9 août 2020, en plein match de préparation, elle se rompt les ligaments croisés du genou gauche. Éloignée des terrains de longs mois, Naomie Feller retrouve sa famille en région parisienne le temps de sa convalescence. À son retour sur les terrains, la virevoltante Guadeloupéenne est inarrêtable, à tel point qu’elle est convoquée en octobre 2021 par Corinne Diacre en équipe de France pour les matchs éliminatoires de la coupe du monde 2023. "J’ai dû beaucoup travailler pour revenir et rattraper le temps perdu. Au final, les Bleues sont arrivées, et j’ai pris ça comme une récompense de mon travail", dit-elle.

Au terme d’une saison folle et intense avec son club du stade Reims, la Guadeloupéenne, non retenue pour l’Euro 2022 avec l’équipe de France, se console en signant au Real Madrid. "Je ne pensais pas vivre une telle trajectoire. […] C’est un très bon club, ils mettent beaucoup de moyens pour les féminines", estime-t-elle. Créé il y a trois ans, le Real Madrid féminin, n’a certes pas le palmarès de la section masculine, mais le club se donne les moyens de devenir l'une des meilleures équipes du monde à court terme. "Ils font tout pour nous développer. Je m'y sens bien, mon objectif est que l'on devienne cette équipe que les autres redoutent", espère-t-elle.

La Coupe du monde en point de mire

En dehors du terrain, Naomie Feller est une vraie boute-en-train. "Je suis quelqu’un qui aime vivre, faire des blagues. J’apporte un bon dynamisme au groupe", résume-t-elle. Mais, sur le terrain, la Guadeloupéenne a d’autres arguments à faire valoir : "Puissance, vitesse et technique", de quoi la comparer à Kylian Mbappé. "[rires] Non, quand même pas. Je suis Naomie Feller ! " de Bouillante en Guadeloupe.

Née d’une mère ivoirienne et d’un père guadeloupéen, Naomie a toujours cru en sa bonne étoile. Oubliée sur la fin de mandature de Corinne Diacre, elle n’a jamais cessé de se battre et de monter son niveau d’exigence au plus haut pour revenir un jour chez les Bleues. Une ténacité payante, puisque le nouveau sélectionneur Hervé Renard a su lui donner sa chance. "Je savais qu’il fallait tout donner avant la Coupe du monde. Ça fait plaisir de voir que j’ai passé une saison à jouer et tout donner et que c’est récompensé", déclare la jeune attaquante.

Naomie Feller à Clairefontaine-en-Yvelines, le 4 juillet 2023.

Retenue dans le groupe des 23 pour la Coupe du monde en Australie, Naomie Feller va vivre sa première grande compétition avec l’équipe de France. À 21 ans, la Guadeloupéenne qui a connu un début de carrière mitigée à cause des blessures, se verrait bien devenir la nouvelle tête d’affiche de l’attaque des Bleues. En attendant, elle compte bien profiter de chaque instant qui lui sera offert pour briller dans cette compétition.