Dans les Outre-mer, les rues sans nom et lieux-dits sans numéro en voie de disparition

Lieu dit : Passié ou Pasyé à Josseau de Rivière-Pilote
Pour faciliter le travail des secours ou des facteurs, l'État a rendu obligatoire le nom et la numérotation de toutes les voies, même dans les petites communes. Si ce problème d'"adressage" était plus marqué dans les Outre-mer que dans l'Hexagone, les communes ultramarines mettent aujourd'hui les bouchées doubles.

Qui n'a pas galéré à trouver un endroit mal localisé sur son GPS, avec pour seule indication RD 22 ou un hameau qui compte plusieurs rues sans nom ? Sur son site internet, La Poste indique qu'en 2017, 3,6 millions de foyers et d'entreprises ne disposaient pas d'une adresse précise.

La faute en partie à la loi française : les communes de moins de 2.000 habitants n'étaient pas obligées de transmettre la liste de leurs voies aux finances publiques ou au cadastre.

Les Outre-mer ne sont donc pas épargnés par ce problème. Selon l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), "ils partent bien souvent d’une situation avec moins d’adresses" voire aucune. En cause : "les données du cadastre et de l’IGN Institut national de l'information géographique et forestière, NDLR) de mauvaise qualité et/ou une absence d’adresses sur le terrain".

Garantir l'intervention des secours

S'il est difficile de chiffrer les adresses manquantes, le constat reste le même : sans localisation précise et référencée, il est compliqué voire impossible de se faire livrer, d'installer la fibre, ou pour les secours d'intervenir rapidement en cas d'urgence, surtout s'ils ne connaissent pas bien la zone.

Pour combler ces écueils, le Parlement a voté une loi début 2022 pour structurer cet adressage, c'est-à-dire pour que toutes les communes renseignent une base de données nationale baptisée BAN, sous une forme standardisée "numéro, nom de voie, commune".

Après la publication du décret à l'été 2022, l'ANCT a fait une piqûre de rappel en septembre 2023 pour rappeler les modalités et les outils mis à la disposition des communes.

Il faut dire que le temps presse pour mettre à jour et transmettre les adresses à la BAN : les communes de plus de 2.000 habitants ont jusqu'au 1er janvier 2024, et celles de moins de 2.000 habitants disposent d'un délai supplémentaire de six mois, soit jusqu'au 1er juin 2024.

Les Outre-mer en avance

Au 9 octobre 2023 en France, 50% des adresses étaient "présentes" dans la base de données nationale. Si l'on regarde dans les DROM, les chiffres sont disparates :

  • moins de 1% pour la Martinique,
  • 9% pour la Guyane,
  • 12% pour la Guadeloupe,
  • 31% pour La Réunion,
  • 73% pour Mayotte.
Captures d'écran des départements et régions d'Outre-mer sur le déploiement de l'adressage.

"En proportion, ils sont plus avancés" que l'Hexagone, nuance l'ANCT rappelant qu'ils partent avec un plus grand retard. L'agence donne d'ailleurs l'exemple de Mayotte où "le prochain déploiement de la fibre a boosté l’adressage".

Pour être raccordé au réseau de très haut débit, il est en effet indispensable que son domicile soit renseigné dans la BAN afin d'être désigné par un code "Hexaclé", seule référence pour les fournisseurs d'accès à Internet.

Reste un autre paramètre qui peut compliquer cette mise à plat de l'adressage : la dynamique de constructions "très importante" et parfois compliquée à suivre, selon l'ANCT, car cela rajoute des routes et des voies à nommer et à numéroter.