La Guyane est une incroyable mosaïque de peuples. Créoles, Bushinengué, Chinois, Brésiliens, Surinamiens, Européens et Haïtiens s’y côtoient depuis des siècles. Les premiers habitants de ce territoire de plus de 80 000 km2 sont les Amérindiens, installés depuis environ cinq siècles avant notre ère. Les Kali'na comptent parmi les six peuples premiers de Guyane.
L’esclavagisme, la ruée vers l’or et les maladies ont décimé ce peuple, qui ne représente plus que 5 % de la population guyanaise. Autrefois nomade, la majeure partie d’entre eux s’est sédentarisée. Aujourd'hui, on compte cinq villages amérindiens au nord-ouest de Cayenne, comme celui de Bellevue, où plus de 600 Amérindiens se battent pour défendre leurs droits et leurs traditions.
Une femme fière de sa culture et de ses traditions
Cécile Kouyouri voit le jour en 1959 à Grosse Roche, un village kali'na situé sur la commune d'Iracoubo en Guyane. À sa naissance, ses parents s'installent dans le village amérindien de Bellevue, situé sur la zone littorale entre Cayenne et Saint-Laurent-du-Maroni. Comme la plupart des enfants amérindiens nés dans des zones enclavées et éloignées des centres urbains, elle est contrainte, à l'âge de 6 ans, de quitter les siens pour poursuivre sa scolarisation chez les religieuses. Cet éloignement de la communauté a été supportable car avant les années d'internat dans un "home indien", Cécile a reçu une éducation traditionnelle forte avec des repères culturels solides. Elle a réussi à concilier deux vies complètement différentes. Devenue couturière, la jeune Amérindienne revient vivre au village et ouvre un atelier.
Le 7 juillet 1997, à 38 ans, alors que les chefs coutumiers ont jusque là toujours été des hommes, Cécile Kouyouri est investie, par la Fédération des organisations des peuples autochtones de Guyane (FOAG), première cheffe coutumière du village de Bellevue. C'est après un incendie au village que la communauté de Bellevue, révoltée par le temps mis par les pompiers pour lui venir en aide, décide, après treize ans sans leader pour la représenter, de désigner un nouveau chef coutumier.
Chef coutumier, un rôle important au sein de la communauté
Garante de la tradition, de la langue, de la coutume et des règles de vie, Cécile Kouyouri conseille et juge les conflits. Porte-parole face aux administrations, elle a un droit de regard sur l'éducation, la terre et la zone de droit d'usage collectif, l'espace agroforestier octroyé par l'État aux peuples autochtones de Guyane pour leur permettre d'y développer toute forme d'activité, économique ou de subsistance, basée sur les ressources naturelles.
Un combat orienté vers les nouvelles générations
Depuis vingt-cinq ans, cette femme de poigne se bat pour défendre et améliorer le quotidien de sa communauté en maintenant un dialogue permanent avec les collectivités locales. En 2019, l'État lui octroie 1 000 hectares pour le développement des abattis amérindiens, des parcelles de culture individuelles, qu'elle tente aujourd'hui de repeupler grâce à la jeune génération de Kali'na. La cheffe a pour objectif de les convaincre de revenir dans leur village pour cultiver la terre de leurs ancêtres.
À 63 ans, Cécile Kouyouri poursuit inlassablement son combat pour l'affirmation de soi et pour la survie d'un patrimoine culturel qu’elle souhaite voir perdurer par son peuple et par la jeunesse de Bellevue.
Écrit et réalisé par Keen de Kermadec et Julien Nicolas
Production LF Production avec la participation de France Télévisions
Durée 52 minutes - © 2022