Après l'abolition définitive de l'esclavage en 1848, des travailleurs africains furent recrutés pour pallier le manque de main d'œuvre dans des plantations de canne à sucre aux Antilles. Ces engagés arrivaient par convoi, environ 600 personnes par bateau. Ces migrants venus d'Afrique et leurs descendants sont surnommés "Kongo" en Martinique et Guadeloupe.
Un pan de l'histoire du peuplement des Antilles
Les descendants des ouvriers africains sous contrats abordent leurs origines kongos de façon différente. Chacun se réapproprie son histoire et prend la liberté de se définir à posteriori, comme un pied-de-nez à la servilité imposée à leurs ancêtres. Plusieurs portent un nom africain, d’autres n’ont pas la certitude de la filiation qu’offre un document généalogique et revendiquent pourtant un patrimoine "kongo" qui les accompagne au quotidien. D’autres encore ont des héritages exceptionnels, comme la famille Massembo en Guadeloupe qui, de génération en génération, perpétue des pratiques ancestrales en mémoire de leurs aïeux africains lors d'une cérémonie appelée le grap a kongo.
Les gardiens du lien entre l'Afrique et la Caraïbe
Durant son enfance, le nom de famille de Sylvianne et sa couleur de peau étaient moqués. Devenue adulte, à travers son amour pour les rythmes du tambour bèlè hérités des esclaves et les chansons d'artistes africains qu'elle apprend, Sylvianne se réapproprie petit à petit ses origines africaines.
Agriculteur dont la famille est originaire du Morne Congo, au centre de la Martinique, Éric estime que l'amour de la terre lui vient de ses ancêtres. L'homme produit des fruits et légumes sans intrants, selon les codes du jardin créole.
Il se dit, dans la famille paternelle de Vanessa, qu’un "homme Kongo se serait allié à son aïeule", dans le sud de l’île après l’abolition de l’esclavage. Même s'il n’y en a pas de trace dans leurs archives personnelles, il existe pourtant dans le récit familial. Pour elle, "Kongo" ne renvoie pas au pays actuel avec ses frontières récentes mais plutôt à un sentiment d’appartenance à une terre d'un autre continent.
Bernard est originaire de Marie-Galante en Guadeloupe. Après des recherches sur la généalogie familiale, il ajoute au nom de son père le patronyme kongo de sa mère. À ses yeux, l’Afrique est avant tout symbole d’une force spirituelle. Le documentaire le suit en République du Congo où il découvre le village de ses aïeux et rencontre des anciens.
Marie-France a vu sa mère et sa grand-mère avant elle se battre pour organiser la cérémonie du grap a kongo, un rituel congolais dédié aux ancêtres dont l'organisation se transmet de mère en fille. Chaque 1er novembre, sa famille honore ses défunts, avec notamment des chants en langue kikongo (parlée en Afrique centrale), qui ont traversé les siècles. D'abord l'objet d'un préjugé défavorable, au fil des années, Marie-France est parvenue à faire inscrire cette célébration dans le paysage culturel de la Guadeloupe.
Plasticien, Joël explore dans ses œuvres ses racines kongos et, plus largement, la condition de l’homme noir. Au cours de son enfance à Marie-Galante, sa grand-mère lui a toujours répété avec fierté qu’elle était Kongo et que les Kongos étaient des travailleurs libres.
Ils n’étaient les esclaves de personne.
Joël Nankin, descendant d'Alexina Boulbou, GuadeloupeOrigine : Kongo
Écriture et réalisation Laura Chatenay-Rivauday
Coproduction YN Productions et La cuisine aux images / Kontras prod avec la participation de
France Télévisions
Durée 52 minutes - 2023