En fait, il n’aime pas trop cette appellation d’artiste. Lui préfère se voir comme un "médecin de l’âme". Ce qui pourrait paraître une coquetterie de langage, voire une forfanterie, ne prend guère ces accents dans la bouche de Yannick "Yao" Louis. Nous retrouvons donc le médecin de l’âme, dans l’enceinte du Théâtre Présence Pasteur à Avignon, juste après l’une des représentations de Le quatrième mur, mis en scène par Luca Franceschi. S’ensuit un entretien avec Yao :
Succès en béton
Au vu du remplissage de la salle - quasi comble -, et à l’applaudimètre - standing ovation, s’il vous plaît -, inutile de faire la fine bouche : le spectacle plaît, émeut, enchante. Et pourtant le contexte est plutôt dur et nous ramène à la guerre du Liban des années 80.
L’argument est beau : né d’un rêve utopique, se fomente et se monte le projet de jouer Antigone de Jean Anouilh dans ce Liban en guerre avec des comédiens représentant chacune des factions belligérantes. Sorj Chalandon en tire un récit lumineux sur l’art et le vivre ensemble.
Un livre à lire, une pièce à voir
C’est précisément cette humanité qui touche Yao. Cet impossible espoir que l’on caresse de mettre de côté les différences pour ébaucher un avenir commun. La pièce fait partie d’un triptyque mené par la compagnie auquel le musicien et comédien participe aussi.
Le quatrième mur a déjà été joué un peu partout en France et aussi en Guyane, en Martinique et en Guadeloupe et chaque fois le message humaniste passe et fonctionne. Ce qui ravit celui qui montre davantage son talent de comédien dans cette pièce où il endosse plusieurs rôles.
Yao, du mur à la kaz
Car Yannick Louis dit Yao n’est pas un inconnu ni de nous ni du Festival d’Avignon : il était l’année dernière sur la scène de La Chapelle du verbe incarné, accompagnant en musique cette fois, le slam de Myriam Baldus dans le spectacle Fos a kaz la ! Il y jouait d’instruments traditionnels guadeloupéens et interprétait par ailleurs le rôle du grand-père de l’autrice-slameuse.
Cœur de Lyon, racines en Guadeloupe
Petit aparté glissé au passage par Yao : Fos a kaz la a été le premier projet ultramarin auquel il a participé en vingt-cinq ans de carrière ! L’occasion est trop belle pour ce Lyonnais de s’impliquer dans ce spectacle qui plonge aussi dans ses racines : il a, dit-il, beaucoup contribué à étoffer la tournée en Guadeloupe de Fos a kaz la aux mois de novembre-décembre 2023 prochains. Une perspective qui provoque chez Yao une mine… réjouie !
Yao au faîte du mur
En attendant, c’est le succès de Le quatrième mur qui emporte Yao et le mène en Avignon jusqu’à la fin du mois. Succès mérité et dont il peut légitimement prendre toute sa part, au cœur d’un casting où pas une tête dépasse. Tous, avec leurs personnages - Yao en tête -, passant tour à tour d’une forme de comédie à la tragédie, l’ensemble subtilement accompagné de musique et de chorégraphies chorales.
Malgré le sujet - dur -, reste toute l’humanité du récit de Sorj Chalandon. Gros coup de cœur du OFF, Le quatrième mur, à noter sur vos tablettes festivalières et avignonnaises.
"Le quatrième mur", adaptation et mise en scène de avec Yannick (Yao) Louis, Samuel Camus, Alexandra Nicolaïdis, Ingrid Bonini, Nicolas Moisy, Bérengère Steiblin, Direction Artistique Thierry Auzer. Jusqu’au 28 juillet 2023 au Théâtre Présence Pasteur, Avignon (OFF)