Grève : les agents RATP décidés à faire tenir le mouvement

Après le succès, pour les syndicats, du premier jour de grève jeudi, ces derniers ont décidé de poursuivre le mouvement social, ce vendredi. Transports, éducation, santé : tous les secteurs sont concernés. C’est le cas à la RATP, où les agents ne sont pas prêts de cesser la lutte.
 
Mobilisés depuis ce jeudi, ils en sont déjà à leur acte II, lorsque les grévistes du centre de bus RATP de Malakoff, au sud de Paris, allument un feu dans la cour du site. Se réchauffer, cuire leur casse-croûte –quelques merguez-, et attendre : voilà le programme de ces agents pour les prochains jours. Ils préviennent : "pas de déblocage tant que le gouvernement ne donnera pas les preuves qu’il nous a entendus".
 

La lutte contre la casse sociale s’organise

Dans tous les centres, lors des assemblées générales de la veille, les grévistes ont voté la reconduction du mouvement jusqu'à lundi. Ce vendredi encore, 9 lignes de métro restent fermées. La capitale tourne au ralenti, en partie paralysée par les centaines de stations fermées.
Christophe Alcindor et Saïd Dulac, deux agents RATP franciliens, sont mobilisés depuis jeudi. Leurs bus sont restés au centre de Malakoff.
Le réseau de bus, bien qu’en partie fonctionnel, est également touché par la grève. "Moi je vais suivre la mobilisation jusqu'au bout, qu'il y ait du monde ou non, assure Christophe Alcindor, conducteur à la RATP depuis 7 ans. On est là pendant un mois, au minimum. C'est illimité, pour nous. Je n'ai pas de date de reprise. Et je resterai là, au dépôt. Ce n'est pas la peine de faire grève pour rester chez soi. Certains le font, mais ils ne devraient pas, car personne ne va prendre en considération leur lutte et les revendications. C'est du perdu pour eux."
 

Je vais me battre ici, contre la réforme des retraites, mais aussi pour les Martiniquais et tous les Domiens qui souffrent.  
Christophe Alcindor, conducteur à la RATP


Au centre des préoccupations de Christophe Alcindor et de ses collègues : la réforme des retraites, bien sûr, mais pas que. La casse sociale généralisée est sur toutes les lèvres. "Les conditions de travail sont un enjeu important de notre lutte, explique le machiniste, originaire de Martinique." "Pour nous aussi, le travail est très dur, témoigne Saïd Dulac, machiniste RATP à Fontenay-aux-Roses. On constate que beaucoup de machinistes ne profitent pas de leur retraite. Une fois partis, certains décèdent, ont un cancer, sont en longue maladie. Les gens souffrent. Et le système que prévoit le gouvernement est encore moins bénéfique pour nous."
 

"Le pouvoir d’achat à nouveau affecté"

Si Christophe est en tête du piquet de grève de son dépôt de Malakoff, son cœur est ailleurs. En Martinique, où les siens se battent aussi, à cause des conditions de travail et de vie encore plus difficiles. En prenant le temps de rappeler les nombreuses mobilisations sur l’île, on comprend que la gronde dure depuis longtemps chez ses proches et ses amis.
 

Les gens en ont ras le bol, ajoute-t-il. Je suis beaucoup les manifestations, là-bas, sur les réseaux sociaux, par rapport à ma famille et mes amis. Personnellement, je vais me battre ici, contre la réforme des retraites, mais aussi pour les Martiniquais et tous les Domiens qui souffrent. 


Se battre. Ils sont nombreux à utiliser ces termes d’affrontement. Pour beaucoup, ils ont participé aux manifestations des gilets jaunes, depuis plus d’un an, et ont la conviction de ne pas avoir entendu. Aujourd’hui, leur situation a encore évolué. "Le pouvoir d’achat est à nouveau affecté", soupire Saïd Dulac, originaire de Guadeloupe. Comme beaucoup, il a calculé sa retraite sur la base du système à points prévu par la réforme de Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire aux retraites. Et il y a vu une différence.
 

Des privilèges montrés du doigt

Depuis hier, Claudia Sirani, également machiniste à Fontenay-aux-Roses, a quitté son bus pour participer à la mobilisation, dans la rue, aux côtés de ses collègues. "Cette grève, c’est au-delà de la réforme des retraites. Depuis plusieurs années, on assiste à une perdition de nos acquis. Notre rôle aujourd'hui, par ces grèves, par ces mobilisations : se battre pour limiter la casse sociale", assène vigoureusement cette Guadeloupéenne.
 
Le pouvoir d’achat, au centre des préoccupations de Claudia Sirani, agent RATP, qui a décidé de continuer la grève jusqu’à ce que sa profession sera entendue.
 

J'ai intégré la RATP car j'avais droit aux congés bonifiés, à d'autres "privilèges", qui ne sont autre que des acquis que nos anciens ont obtenu par le combat d'une grève. Je ne gagne pas tant que ça, je ne me sens pas vraiment privilégiée.
Claudia Sirani, agent RATP


Pour eux, le mouvement n’est pas prêt de s’essouffler. Les syndicats de la RATP ont prévu de poursuivre la grève, jusqu’aux prochaines annonces du gouvernement, qui devraient intervenir mercredi prochain, comme l’a indiqué en milieu d’après-midi Édouard Philippe.