Une Guadeloupéenne à la tête de la maison d’éducation de la Légion d’honneur des Loges

Christine Grandmontagne, intendante générale à la maison d'éducation de la Légion d'honneur des Loges
A 43 ans, Christine Grandmontagne dirige le prestigieux établissement situé à Saint-Germain-en-Laye, et réservé aux filles. C'est la première fois qu'une femme noire se retrouve à ce poste. Une ascension fulgurante pour cette native de Trois-Rivières en Guadeloupe.
 
"Madame l’intendante générale !". C’est ainsi que les élèves l’appellent. Un statut particulier réservé à cette institution pas comme les autres. Son statut équivaut à celui de principale de collège. Christine Grandmontagne a en charge 477 jeunes filles qui dorment la semaine à l’internat, ainsi qu’une quarantaine de professeurs, et du personnel administratif. Seulement cet établissement atypique, bien qu’il soit public, ne dépend pas de l’Education nationale. Il est directement rattaché au grand chancelier de la Légion d’honneur. Un lieu préservé où règne savoir et calme.


Enfance

Christine Grandmontagne est la troisième d’une famille de cinq enfants. Ses parents issus d’un milieu modeste, son père ouvrier agricole dans un champ de banane et sa mère agent municipale, lui ont toujours inculqué la rigueur. "Il y avait deux choses importantes à la maison pour mes parents : l’école et l’église " explique Christine Grandmontagne. Une rigueur ponctuée tout de même par de nombreux jeux avec ses frères et sœurs. Déjà, petite elle se projette, et rêve de devenir professeur de français.
 
 

Cursus

Pour atteindre son objectif elle quitte la Guadeloupe en 1993, direction l’île sœur la Martinique. A l’époque seule cette île permettait aux jeunes de la région de suivre des études littéraires à l’université des Antilles-Guyane. Elle y décroche sa maîtrise de lettres modernes. Christine Grandmontagne exerce ensuite durant un an le métier de professeur de français au lycée Frantz Fanon à Trinité. Mais sa voie toute tracée durant son enfance va prendre une autre tournure. Des personnes rencontrées ici et là lui ouvrent d’autres perspectives. Elle se remet aux études, passe le concours de personnel de direction dans l’académie de Reims dans l’Hexagone, et gravit ensuite peu à peu les échelons. De conseillère principale d’éducation elle devient principale de collège, ou plutôt intendante générale à la maison d’éducation de la Légion d’honneur des loges.
 

Changement de statut

Christine Grandmontagne aime son métier. Après 14 ans passés dans l’Education nationale, où la devise au fronton des écoles est « liberté, égalité, fraternité » elle profite d’une opportunité et candidate au poste de cheffe d’établissement adjointe à la maison d’éduction de la Légion d’honneur en 2014. Un collège public rattaché à la grande chancellerie et dont l'activité est placé sous le  grand chancelier de la Légion d’honneur. « Honneur et patrie » est la devise taillée dans la pierre de ce bâtiment datant du 19ème siècle.
 
Fronton de la maison d'éducation de la Légion d'honneur des Loges

En 2019, le poste d'intendante générale se libère. Elle postule, non sans quelques craintes. "Je pensais que je n’allais pas être recrutée parce que je suis noire", une inquiétude vite balayée en décrochant le poste. Sa promotion est accompagnée des mots du grand chancelier que nous rapporte Christine Grandmontagne "Je tiens à vous dire que vous avez été choisie à l’unanimité et sans restriction".
 

Une équipe de choc

Confortée à son poste, elle poursuit sa collaboration avec le personnel administratif qu’elle connaît bien. A ses côtés également, une nouvelle dans la grande maison, Ony Razafintsalama, d’origine malgache. C’est elle qui la remplace au poste d’adjointe. "Travailler avec madame Grandmontagne est très enrichissant. Elle est à l’écoute. Même quand on n’est pas d’accord, elle prend le temps de vous écouter de comprendre votre position". Ses secrétaires quant à elles sont ravies de pouvoir parler librement avec leur intendante générale. A peine entrée dans le bureau, Christine Grandmontagne lance tout sourire, « ça va les filles ? », « oui » répondent en cœur les deux secrétaires assises dans le bureau attenant au sien. « Bon, cela a été dur sans vous mais on a fait avec » rétorque l’une d’elle en riant.
 

Un sourire et une exigence

Deux caractéristiques qui représentent bien Christine Grandmontagne. "Elle est déjà très souriante et elle est exigeante mais je trouve que cela forge notre caractère. Elle est toujours là pour nous encourager ! " assure Maya, 12 ans, déléguée de sa classe de 5ème. En ce jour de remise de rapport où les élèves les plus méritants reçoivent des médailles, l’ambiance est solennelle. Les meilleures élèves reçoivent une double médaille sous l’œil bienveillant de "Madame l’intendante générale". A l’issue de la cérémonie et pour la remercier, les élèves lui ont préparé une petite surprise. Elles interprètent une chanson de Calogéro : le portrait.
 
La surprise des élèves à l'issue de la remise des récompenses ©la1ere
 

Peu de demandes des Outre-mer

Christine Grandmontagne doit gérer les multiples demandes pour intégrer ce collège. Elles viennent de France mais aussi de l’étranger. Madame l'intendante générale regrette cependant le peu de sollicitations des territoires des Outre-mer. Pour faciliter les candidatures qui viennent de loin, des échanges par visioconférences sont mis en place via internet pour éviter les déplacements dans un premier temps. La motivation de l’élève est aussi importante que celle des parents.

Outre le dossier scolaire qui a son importance, le contexte familial et social est aussi un critère déterminant pour la sélection. Selon le revenu des parents, des aides sont possibles afin de payer le prix de l’internat pour l’année. Il est de 2.784 euros : 15% des familles bénéficient de la gratuité cette année. Les professeurs sont détachés du circuit de l’Education nationale pour exercer dans ce collège. L’établissement bénéficie d’une solide réputation et affiche un taux de réussite de 100 % au brevet des collèges.
 
©la1ere

Dans cet établissement atypique, Christine Grandmontagne est heureuse :
 

 Quand on fait quelque chose que l’on aime on ne travaille pas. Je voulais être personnel de direction, c’est encore mieux à la maison des loges