Pas de médaille pour les Bleus, battus 35/29 par l’Espagne, le match de trop pour une équipe au bout du rouleau. Jean-Jaques Acquevillo le Martiniquais s’est battu. Généreux et déçu, il aura quand même apprécié l’aventure. Notre consultant Patrice Annonay analyse cette fin de tournoi.
Les Français sont chocolats. La plus mauvaise place, comme en 2007 lors du Mondial Allemand, mais à l’époque on était dans une autre phase. Le bilan n’est pas si négatif au vu de la dernière compétition, mais il va falloir vite se tourner vers le tournoi de qualification olympique de Montpellier mi-mars pour savoir si ces joueurs ont pu cimenter quelque chose dans la maison bleue lors de leur voyage Egyptien.
Contre l’Espagne, un peu comme contre la Suède, jamais l’équipe de France n’a paru en mesure de contrarier son adversaire, sauf à revenir à un but en seconde période. Mais les Espagnols étaient trop forts. Constatation la France n’est pas une grande nation actuellement mais il y a des signes encourageants. Ce match est à oublier pour les deux Réunionnais qui ne sont même pas entrés en jeu, Nicolas Claire et Melvyn Richardson. Jean Jacques Acquevillo lui, a joué.
Patrice Annonay, notre consultant pour Outre-mer la 1ère analyse les forces et les faiblesses de ce nouveau groupe bleu, avec un gros plan sur les joueurs ultramarins du groupe. Pour lui l’objectif Tokyo est tout à fait réalisable.
Outre-mer la 1ère : Patrice il nous a semblé que les bleus ne pouvaient plus rien faire dans cette petite finale?
Patrice Annonay : Ils avaient préparé ce match mais il y avait un vrai manque de fraîcheur à la fois physique et mentale liée à la défaite de vendredi. On n’a pas pris le début du match par le bon bout et sur la durée ça n’a pas tenu. A aucun moment je n’ai senti qu’on pouvait inverser la tendance. En face le jeu espagnol était rompu à ce genre de compétition, ils ont pu faire ce qu’ils savent bien faire, avec un jeu hyper précis, une bonne relation avec Corralès le gardien, les deux frères Dujshebaev. Bravo à eux, on a été battus par plus fort que nous.
Outre-mer la 1ère : Un match à oublier donc mais qu’avez-vous pu tirer de positif sur le jeu proposé aujourd’hui ?
Patrice Annonay : Franchement aujourd’hui, non, j’ai envie d’élargir cela à des choses positives sur l’ensemble de la compétition : la mise en place d’un jeu collectif d’attaque, une défense avec une articulation Fabregas Karabatic intéressante, des ailiers performants comme Hugo Descat. J’ai beaucoup aimé les sept victoires, ça dénote un état d’esprit collectif de guerriers, une abnégation à ne rien lâcher. Il manquait juste une ou deux rotations et un peu d’énergie. Et dès qu’on a voulu jouer moins collectif on s’est fait châtier.
Outre-mer la 1ère : Plus globalement l’équipe de France est en construction, en chantier donc il faut la laisser travailler ?
Patrice Annonay : Oui, dans quatre semaines on a un TQO (Tournoi de Qualification Olympique) contre la Croatie, la Tunisie et le Portugal. On a emmagasiné de la confiance et de la sérénité dans le jeu, une certaine assise. Les gars ont appris à se connaître. Certes les matchs étaient accrochés mais le chantier est en route.
Même si on finit quatrième on est un peu déçu du résultat, on savait qu’on aurait pu aller un peu plus loin. On a fait un bon parcours, au final on n’a que deux défaites mais je pense que il faudra continuer à travailler, améliorer ce qui n’a pas marché sur le tournoi, et se préparer pour le TQO
Outre-mer la 1ère : La critique est-elle nécessaire ?
Patrice Annonay : La critique est constructive, c’est la force de la critique qui peut être destructrice. De toute façon en connaissant le professionnalisme du staff et des joueurs, je suis sûr qu’ils sont déjà en train de faire un bilan et une auto-critique. Forcément elle va être constructive. Je ne sens pas trop de déception, de la frustration oui, mais c’est une nouvelle ère. Il faut les laisser bosser, et je lève la tête et je regarde vers le futur. On est peut-être à notre place aujourd’hui mais à une marche d’une médaille.
Outre-mer la 1ère : Au niveau des quatre joueurs d’Outre-mer engagés dans ce tournoi, quel bilan tirez-vous de leur prestation ?
Patrice Annonay : Jean-Jacques Acquevillo a donné tout ce qu’il a pu en attaque et défense, mais il n’était pas rompu à ce type de compétition, ça va lui servir pour l’avenir. Il a pu emmagasiner de l’expérience, l’équipe de France peut compter sur lui. C’est un joueur qui doit étoffer son jeu au niveau international, il a du panache, de la rugosité et les solutions qu’il offre sur son poste sont nombreuses.
Je ne m’y attendais pas, participer à ce premier Mondial pour moi en Egypte fut un grand plaisir et une bonne aventure. Franchement j’ai essayé d’en profiter au maximum. J’aurais bien voulu rentrer avec une médaille mais ce sera pour la prochaine fois
Sur ce que j’ai vu Melvyn Richardson représente une solution supplémentaire au poste de demi-centre gaucher car sur le poste d’arrière les choses étaient déjà convenues. Ce sera une piste pour lui à travailler, le pourra-t-il ? On le voit de temps en temps avec son club jouer à ce poste, il est pétri de talent et je ne me fais pas de soucis sur son avenir. Il apportera toujours un plus avec son jeu fait d’inspiration.
Nicolas Claire c’est un peu comme Melvyn il a du talent mais je ne sais pas pourquoi sur la scène internationale il n’arrive pas à s’imposer. Alors qu’en championnat à Nantes ou Aix, il a pris une dimension incroyable en Ligue des Champions. Mais il est barré par Kentin Mahé en bleu. Et dans l’équipe de France il y a une hiérarchie établie et respectée.
Wesley Pardin c’est la pépite, celle qu’on a vu briller tout de suite. Après sa blessure il a beaucoup manqué, au vu de la non-performance des gardiens. C’est un regret, sans cette blessure il aurait sans doute permis de gagner un des matchs décisifs. Il avait gagné la confiance de toute l’équipe avec des arrêts déterminants, il a réussi à bâtir sa place. Je lui souhaite de se rétablir vite car c’est un gardien d’avenir. Ca va être court pour Tokyo mais sait-on jamais quand on voit les progrès de Nicolas Karabatic qui en trois mois est déjà guéri et commence à remarcher.
Outre-mer la 1ère : Melvyn Richardson chez lui à Montpellier pourrait-il trouver le déclic ? On l’a trouvé fatigué ?
Patrice Annonay : Je pense qu’il est moins utilisé en équipe de France mais beaucoup plus utilisé en Ligue des Champions car c’est un joueur clef dans son club. Le TQO se jouera sur ses terres, il pourra peut-être trouver des ressources.
Outre-mer la 1ère : Ce tournoi de Montpellier arrive très vite, la France à domicile n’aura pas le droit à l’erreur ?
Patrice Annonay : D’abord ce sera navrant pour les Français de ne pas jouer devant leur public. On n’aura pas du tout le droit à l’erreur, mais contre le Portugal on a déjà pris un ascendant psychologique en vue du TQO. Je n’enterre pas trop vite la Croatie mais au vu de ce qu’elle a montré dans ce Mondial, c’est une équipe en déconstruction et elle a perdu son coach Lino Cervar. La Tunisie a fait un mondial moyen. On ne peut pas ne pas se qualifier pour Tokyo, surtout quand on voit le travail posé par le staff de Guillaume, il faut continuer à travailler pour être perforant. Franchement ce serait dommage, et sur ce que j’ai vu dans ce Mondial, le TQO devrait être pour nous.
Outre-mer la 1ère : Que pensez-vous du champion du monde, le Danemark, qui conserve son titre ?
Patrice Annonay : Une domination incroyable, une maîtrise incroyable, et en tant que gardien je vois un gardien incroyable, Nicklas Landin. Il a pesé à chaque fois sur les attaques adverses. Contre l’Egypte il a été géant, dans son langage corporel rien ne sort de son langage corporel, et il ferme la boutique. Les Danois sont devenus les costauds qu’on était il n’y a pas si longtemps.
Ecoutez l'interview de Jean-Jacques Acquevillo (propos recueillis par Hubert Guériau, attaché de presse de l'équipe de France)
Jean-Jacques Acquevillo