Le 17 mars 2020, jour pour jour, le pays tout entier était placé sous cloche pour lutter contre la propagation du Covid-19. Du jour au lendemain, de nombreuses personnes se sont retrouvées confinées, seules ou à plusieurs. Comme de nombreuses entreprises, les restaurateurs ont été parmi les premiers à subir le contrecoup du confinement.
Ce fut notamment le cas de Jimmy Desrivières, propriétaire d’un restaurant à Paris, à quelques pas des Champs-Élysées. "Le Covid, ça a été un moment difficile pour nous", se remémore-t-il. Obligé de se réinventer pour faire face, il avait réagi très vite à l’époque en s’ouvrant à la vente à emporter. "On savait qu’il fallait faire quelque chose, donc la première chose qu’on avait faite, c'était de répondre à un appel pour faire des repas. Ça s’appelait 'Les chefs avec les soignants'. On faisait des repas pour des hôpitaux", raconte-t-il.
"De là, on s’est décidé à essayer la vente à emporter direct. On a pris une semaine pour se mettre en place, on n’a pas attendu les aides, etc. On ne savait pas où on allait, mais on savait qu’il fallait réagir", poursuit-il.
Bien lui en a pris. Son établissement de 26 tables qui venait tout juste de fêter son premier anniversaire, s’est maintenu à flot grâce à ce type de transaction. "Ce n’était pas le plus facile", lâche-t-il.
Aujourd’hui, le chef n’a pas abandonné la vente à emporter, mais n’en fait qu’à de rares occasions. "On continue pour des clients qui nous ont connus pendant le confinement et qui veulent faire des anniversaires ou d’autres types d’évènements et qui vont commander directement chez nous. Pour ceux-là, on fait la livraison mais on ne fait plus la vente à emporter comme durant la période Covid, car avec le restaurant ouvert, ce n’est pas possible", assure-t-il. Actuellement, la vente à emporter représente 6 à 7 % de son chiffre d’affaires.
Un modèle économique "retravaillé"
Les restaurateurs avaient dû attendre le 30 juin 2021 pour une réouverture complète de leur enseigne. Un manque à gagner de près de trois mois dont le chef étoilé martiniquais peine encore à se relever.
"Ce qui est perdu et perdu, glisse-t-il amèrement. Malheureusement, quand le Covid est arrivé, on venait d’ouvrir et on avait déjà subi les Gilets jaunes, les aides ne nous ont pas beaucoup aidés à récupérer notre chiffre d’affaires." Même s’il a pu rembourser la totalité de son prêt de 60.000 euros, Jimmy Desrivières s’estime tout de même perdant, car les différents confinements n’ont fait que décaler toutes ses échéances.
Avant le premier confinement, son commerce employait 10 à 12 personnes, aujourd’hui il tourne avec huit à neuf employés. Sa carte des menus a quant à elle connu un remodelage complet et ne propose plus que deux menus, qui changent régulièrement.
Aujourd’hui, on a retravaillé le modèle économique. On travaille sur des cartes beaucoup plus petites, on optimise sur le personnel, la matière première, sur tout, en fait. On travaille avec des produits frais et au cours du marché, c'est-à-dire qu’on achètera par exemple le homard quand il sera le moins cher, pour avoir la meilleure rentabilité et le vendre au meilleur prix. Parce qu’aujourd’hui les clients regardent les prix, c’est dur pour tout le monde.
Jimmy Desrivières
"Qui m’aurait parlé du Covid ou des Gilets jaunes ?"
Face à l’inflation galopante qu’il subit de plein fouet et les tensions géopolitiques du moment, Jimmy Desrivières qui se remet à peine du Covid est prudent quant à l’avenir. "J’espère que ça ira mieux, je ne me projette plus", souffle-t-il. "Qui m’aurait parlé du Covid ou des Gilets jaunes ? Avoir une vision du futur, ce n’est pas possible. On ne sait pas où est-ce qu’on va. Qui est sûr de ce qui va se poser demain ?", interroge-t-il, accoudé à son bar.
"Aujourd’hui, je parle en tant que chef d’entreprise, il faut tout rationner, penser à chaque dépense pour pouvoir rentrer dans ses comptes et payer son personnel. On travaille autrement. On ne peut pas faire de business plan et se dire aujourd’hui, je gagne tant et demain, je gagnerai tant. Ce n’est pas vrai, il n’y a rien de stable", conclut-il. Le Covid-19 ne fait certes plus partie de notre quotidien, mais les traces de son passage demeurent.