Il est un peu moins de 7 heures ce matin, le jour se lève à peine à Houston. Au volant de sa voiture, Mélanie de Jesus Dos Santos arrive au World Champions Center. Cette structure géante de 52 000 mètres carrés accueille chaque jour 150 à 300 athlètes de tous âges et de tous niveaux. C’est ici que Mélanie s’entraine depuis deux ans pour être prête à relever le défi le plus important de sa carrière : les Jeux olympiques de Paris.
Le doute
En 2021, après les Jeux olympiques de Tokyo et des résultats décevants, Mélanie s’est interrogée sur la suite à donner à sa carrière sportive. Six mois de doute et d’incertitude, avant de se relancer aux États-Unis où elle a retrouvé la motivation et l’envie de gagner. "C’est exactement ce que je recherchais, c’est de venir dans un endroit où je ne connais rien, de découvrir une autre culture, c’est vraiment de ça dont j’avais besoin, de me réadapter parce que finalement, c'est quelque chose que j’aime bien. Je m’ennuie très vite, donc j’avais vraiment besoin de repartir à zéro et découvrir quelque chose que je ne connaissais pas".
La rencontre
La Française a quitté le Pôle France de gymnastique de Saint-Etienne qu’elle avait intégrée à l’âge de 12 ans pour rejoindre le World Champions Center de Spring. Une structure imaginée, puis réalisée, par Nellie Biles, la mère adoptive de Simone Biles, après le premier titre de championne du monde à Anvers (Belgique) en 2013 de celle qui deviendra par la suite la star de la gymnastique avec 34 médailles mondiales et olympiques.
Avec ses entraineurs, Cécile et Laurent Landi, un couple d’anciens gymnastes français, et auprès de Simone Biles, devenue son amie, la championne martiniquaise a changé. Elle n’est plus la même.
Le fait de m'entraîner avec Simone tous les jours, c'est vraiment quelque chose d'extraordinaire parce que c'est la meilleure gymnaste au monde, j'apprends beaucoup de choses.
Mélanie De Jesus Dos Santos.
"Elle a pris beaucoup de maturité et de confiance en elle, il lui en faut encore un peu plus, mais ça avance", déclare Cécile Landi. Les deux gymnastes n’ont pas le même palmarès, mais un point commun les unies. En 2021, Simone Biles se retire du concours général et de plusieurs finales des Jeux olympiques de Tokyo. Elle ne va pas bien. La première afro-américaine sacrée championne des États-Unis de gymnastique en 2013, à l’âge de 16 ans, déclare vouloir désormais "se concentrer sur sa santé mentale". Après une pause de deux ans, elle reviendra plus forte que jamais. En 2023, elle décroche son huitième titre mondial individuel, à Anvers, en Belgique. "Mélanie, comme Simone, retrouvent dans ce retour à l’entrainement une motivation. C’est un peu plus égoïste et c’est bien, c’est pour elles, pour se prouver qu’elles sont capables de faire plus. Elles ne font plus de la gymnastique pour les autres, elles ne le font plus parce qu’elles se sentent obligées. Désormais, c’est quelque chose qu’elles ont envie de faire et c’est là toute la différence", explique Cécile Landi, l’entraineur de Simon Biles et Mélanie de Jesus Dos Santos.
Le mental
Au World Champions Center, les journées sont longues et commencent très tôt le matin. Mélanie enchaine les mouvements sur les agrès comme un musicien répète ses gammes. Elle tombe parfois, se relève toujours et recommence. "C’est un peu dur", reconnait-elle. Le prix à payer pour venir "titiller les meilleures" au mois d’août prochain à Paris.
La championne martiniquaise est aux États-Unis avec l’objectif de renforcer son mental. "Je sais faire plein de choses, mais je gâche un peu mon travail parce que je fais des erreurs bêtes, donc je travaille beaucoup sur ça, après j’augmente mon programme parce que mon objectif c’est d’être la plus performante possible aux JO de Paris et je sais ce que je suis capable de le faire, donc j’essaie de monter mon programme", confie la championne.
La conquête
À 24 ans, Mélanie le sait, les JO de Paris sont sa dernière chance d’accrocher une médaille olympique. La jeune femme est lucide et consciente que la route est encore longue. Jusqu’ici, son parcours olympique s’est avéré compliqué. En 2016 aux JO de Rio, Mélanie n’est que deuxième remplaçante. En 2021 à Tokyo, elle termine 11e du concours général et 6e de l’épreuve par équipe. Une déception et une profonde remise en question. Cette fois, la quadruple champion d’Europe est prête pour ses troisièmes jeux et ses entraineurs sont confiants. "Je crois à 1000 % en Mélanie. Elle a tout ce dont elle a besoin. Elle a l’expérience des Jeux Olympiques et des grandes compétitions internationales. Elle est prête pour faire son travail et pour le réussir", affirme Martine George, responsable de la préparation olympique de l’équipe de France de gymnastique artistique féminine.