Les années ont passé, mais dans les esprits, Bruno Marie-Rose reste toujours ce talent précoce de 19 ans, qui avait su damer le pion aux meilleurs sprinteurs hexagonaux lors des championnats de France 1984 et s’était qualifié pour ses premiers Jeux Olympiques à Los Angeles la même année. "C’était quelque chose d’inimaginable, j’étais tout jeune. Je me souviens encore de mon entrée dans le stade [le Los Angeles Memorial Coliseum, NDLR] avec 80 000 personnes. Je tremblais". Trois ans plus tard, il réalise une nouvelle fois une performance exceptionnelle en devenant champion d'Europe du 200 m en salle à Liévin, dans le nord de la France. Mais c'est surtout son temps, 20'36, qui va le faire rentrer dans la cour des très grands. Il améliore de près 16 centièmes le record du monde de l'époque.
Un an plus tard à Séoul, le talentueux Martiniquais revient déterminé et sûr de lui aux Jeux de 1988. Une Olympiade qui a "forgé sa carrière" selon lui. "C'est là-bas que j’ai pu décrocher ma médaille [de bronze, au relais 4 x 100 m]. J’étais au départ [pour le premier relais] et c’est [le Martiniquais] Max Morinière qui avait franchi la ligne d’arrivée. C’était la seule médaille que l’athlétisme avait pu prendre lors de ces Jeux, elle était importante", se remémore-t-il dans son nouveau costume.
La cybersécurité, son nouveau terrain de jeu
Les pointes rangées dans l’armoire à côté des médailles, le Martiniquais se tourne vers sa seconde passion : l’informatique. Mais l’athlétisme n’est jamais trop loin. Après un passage à la tête de la ligue nationale d’athlétisme, Bruno Marie-Rose intègre en 2018 le comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Il est nommé directeur de la technologie et des systèmes d'information. "[Ce poste] valorise mon diplôme d’ingénieur que j’avais eu durant ma carrière de sportif ", glisse-t-il. L’ancien sprinter a à sa charge tout l’intérieur des enceintes sportives, "l’affichage, le chronométrage et les écrans géants, mais aussi le système d’information et tout le parc applicatif qui va être utilisé durant les Jeux, comme les images de télévision", explique-t-il.
L’une des grandes préoccupations du Martiniquais sera "la cybersécurité". "On est l’un des évènements les plus attaqués, il va falloir se protéger, prévient-il. […] Il y a de la responsabilité, mais ce qu’il faut retenir, c’est fournir un écrin de qualité pour que l’athlète puisse s’exprimer librement durant la compétition."
Pour arriver à ce poste à forte responsabilité, Bruno Marie-Rose a fait jouer ses aptitudes professionnelles. En 2003, lors des championnats du monde d’athlétisme à Paris, il avait déjà occupé la fonction. Autant dire que le Martiniquais est en terrain connu pour ces Jeux à la maison. Et puis sa connaissance sportive a fait le reste. "C’est plutôt la petite cerise sur le gâteau de connaître [à la fois] le sport et la technologie", lâche tout sourire le DTSI (directeur de la technologie et des systèmes d'information) de Paris 2024 qui aura à sa charge près de 5 000 personnes réparties sur les tous les sites de compétitions.
"J’aurais la chance de le vivre de l’autre côté de la barrière"
Après avoir connu trois Olympiades durant sa carrière de sportif – Los Angeles en 1984, Séoul en 1988 et Barcelone en 1992 – et obtenu plusieurs records, Bruno Marie-Rose va forcément vivre ces Jeux en France avec une certaine "émotion", mais pas celle du sportif. "J’aurais la chance de le vivre de l’autre côté de la barrière."
Tout comme les sportifs, c’est de longues années de préparation, d’entraînements, de tests, tout ça pour être prêt le jour J. Donc je retrouve un peu ce que j’avais connu quand j’étais sur le terrain.
Bruno Marie-Rose
Mais malgré cette nouvelle casquette de "Monsieur cybersécurité", le Martiniquais n’oublie pas ses premiers amours et a toujours un regard attentif sur l’état de l’athlétisme français. Malgré les contres performances de ces dernières années, Bruno Marie-Rose croit en une olympiade dorée. "Il y a eu des hauts et des bas, mais je pense qu’avoir les Jeux à la maison, ça pourrait être un vrai déclic pour cette nouvelle génération, glisse-t-il. Je pense que cet été, il y aura de belles surprises".
Des médailles, les délégations françaises espèrent en décrocher lors de ces Jeux organisés en France. Mais pour l’ancien talent des pistes, des JO réussis seraient "qu’on n’entende pas parler de [son] domaine".