Où faut-il placer le futur monument national en hommage aux victimes de l'esclavage réclamé par les associations mémorielles et promis par Emmanuel Macron en 2018 ? "Au Trocadéro", a répondu sur X (ex-Twitter) Philippe Vigier, ministre délégué chargé des Outre-mer, dimanche. L'ancien député entré au gouvernement au mois de juillet a été très affirmatif sur ses réseaux sociaux alors qu'il visitait le site ce week-end, accompagné de plusieurs acteurs impliqués dans le dossier.
Mais le ministre s'est précipité. Car c'est en réalité au comité de pilotage lancé par son prédécesseur Jean-François Carenco au début du mois de juillet de prendre les décisions concernant le Mémorial en hommage aux victimes de l'esclavage. Ce "copil", présidé par le ministre délégué et Serge Romana, le président de la fondation Esclavage et Réconciliation, doit se réunir mercredi 20 septembre pour justement décider du futur emplacement du monument.
Aucune décision officielle n'a encore été prise
"Je n'ai pas compris le tweet du ministre", admet Serge Romana, qui était présent au Trocadéro avec Philippe Vigier ce week-end. Emmanuel Gordien, lui aussi membre du copil et président de l'association CM98, n'était pas avec le ministre mais confirme qu'aucune décision officielle n'a encore été prise. Les deux hommes rappellent que ce lieu n'est qu'un des sites qui pourraient potentiellement accueillir le Mémorial. Sur cette liste se trouvent également le Jardin des Tuileries, les bas des Champs-Élysées ou le Square Henri Galli, dans le 4ᵉ arrondissement de Paris... "On cherche l'unanimité", souligne le co-président du comité. L'entourage de Philippe Vigier assure qu'"après avoir échangé avec les acteurs institutionnels, le ministre a décidé de se rendre sur site ce dimanche afin d'étudier la topographie et la faisabilité du projet". Le Trocadéro est justement, selon la même source, le lieu qui fait consensus au sein du copil.
Le comité de pilotage du Mémorial national des victimes de l'esclavage est composé des acteurs étatiques et associatifs impliqués sur le sujet depuis plusieurs années : y sont représentés le gouvernement, la préfecture d'Île-de-France, la ville de Paris, la Direction générale des Patrimoines et de l'Architecture, la Fondation pour la mémoire de l'esclavage, CM98, l'association des professeurs d'histoire et de géographie régionale de la Guyane, l'association martiniquaise de recherche sur l'Histoire des familles et le collectif réunionnais des noms pour la mémoire. D'autres personnalités, comme l'historien Frédéric Régent et l'écrivaine Marie-Josée Alie-Monthieux, en font aussi partie.
Un monument d'ici mai 2025
Le Mémorial en hommage aux victimes de l'esclavage avait été promis par Emmanuel Macron en 2018, un an après son élection. Mais le projet a longtemps patiné. L'État et les associations s'étaient accordées sur un emplacement : le Jardin des Tuileries, près du Louvre. Mais, l'appel à candidatures lancé en 2020 avait vite été retiré l'année suivante, après des désaccords entre le gouvernement et les associations mémorielles, qui demandaient l'inscription de l'ensemble des noms des victimes de l'esclavage sur le monument, et souhaitaient avoir un droit de regard sur l'artiste désigné pour réaliser le projet.
Dans un courrier envoyé en 2021 à Jean-Marc Ayrault, président de la Fondation pour la mémoire de l'esclavage, Emmanuel Macron avait réaffirmé faire de ce monument mémoriel une priorité de son quinquennat. Mais il rappelait qu'il fallait que celui-ci soit pensé et réalisé dans la concorde avec les associations. Il aura donc fallu attendre les commémorations du mois de mai cette année pour que le dossier soit relancé. Le 23 mai, journée nationale en hommage aux victimes de l'esclavage, celui qui était encore ministre délégué chargé des Outre-mer, Jean-François Carenco, avait annoncé la mise en place du comité de pilotage chargé de faire avancer le projet. Philippe Vigier, son successeur, a, depuis, repris le dossier en main et multiplié les rencontres.
Après la décision sur l'emplacement attendue mercredi, le copil devra se pencher sur la forme et la réalisation du monument. Si le calendrier annoncé par Jean-François Carenco au mois de mai est tenu, le Mémorial devrait voir le jour d'ici mai 2025.