Alors que la France s’apprête à célébrer l’année des océans et que la conférence des Nations unies pour les océans aura lieu à Nice en juin 2025, l’Ifremer traverse une crise budgétaire sans précédent. L’institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, qui fête ses quarante ans, risque le défaut de paiement. Suivi des populations de poissons, des teneurs en nitrate de l’environnement, étude des grands fonds… Les missions de l’organisme, qui emploie environ 1 500 salariés sur 24 sites, dont plusieurs en Outre-mer, sont diverses.
"L’Ifremer fait face à des difficultés financières", résume Franck Jacqueline, délégué CGT au sein de l’institut. Il pointe deux causes principales : l’inflation d’une part, et les financements de l'État, qui ne suivent pas le rythme des demandes. "L’Ifremer est obligé de puiser dans ses ressources propres pour pouvoir assurer certains programmes scientifiques, le renouvellement du personnel et du parc immobilier, qui date à certains endroits de De Gaulle", explique-t-il. Selon la direction de l’organisme, si le budget alloué par l’État n’augmente pas, dès 2026, l’Ifremer devra affronter un risque de cessation de paiement.
Abandon de certaines recherches
Les pistes d’économies n’ont pas encore été communiquées, mais les syndicats craignent une diminution des effectifs et l’arrêt de certaines recherches. Le scénario est déjà en cours en Nouvelle-Calédonie. À Saint-Vincent, à une quarantaine de kilomètres au nord de Nouméa, une ferme expérimentale de crevettes fermera l'année prochaine, faute d'argent. Les travaux de réparation du centre, qui sert à tester des solutions techniques pour ensuite les étendre à l’ensemble de la filière, ne sont pas financés.
C’est assez surprenant. Le territoire avait fondé beaucoup d’espoirs sur la filière crevette en Nouvelle-Calédonie, et on s’aperçoit que pour des raisons financières, de l’ordre de quelques dizaines de milliers d’euros, l’Ifremer décide d’abandonner complètement ce pan de recherche.
Franck Jacqueline, délégué CGT au sein de l’Ifremer.
Au-delà des projets qui s’arrêtent, certains ne sont même pas lancés. "L’Ifremer est présent en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie. À Mayotte, où il y a un grand besoin d’un suivi écologique et de la qualité des eaux, il y a eu un refus de l’Ifremer et de l’État de développer, comme dans tous les territoires ultramarins, un suivi de la qualité des eaux, regrette Franck Jacqueline. Il y a une grosse pollution au niveau du lagon de Mayotte et on déplore que l’État français ne traite pas le département de Mayotte à la hauteur des autres départements." Actuellement, les recherches de l’Ifremer sur Mayotte sont menées depuis La Réunion.