La Ligue des droits de l'Homme (LDH) et l'association La Quadrature du Net ont annoncé vendredi avoir attaqué en référé-liberté l'interdiction et le blocage du réseau social TikTok en Nouvelle-Calédonie par le gouvernement français "pour défendre la liberté de communication des idées et des opinions".
"La Quadrature du Net demande au Conseil d'État la suspension de la décision du Premier ministre Gabriel Attal de bloquer en Nouvelle-Calédonie la plateforme TikTok. Par cette décision de blocage, le gouvernement porte un coup inédit et particulièrement grave à la liberté d'expression en ligne, que ni le contexte local ni la toxicité de la plateforme ne peuvent justifier dans un État de droit", a indiqué l'association dans un communiqué.
La LDH a indiqué sur X avoir, elle aussi, attaqué en référé-liberté cette décision.
Le gouvernement français en avait annoncé mercredi l'interdiction pour limiter notamment les contacts entre émeutiers, une mesure permise par la proclamation de l'état d'urgence et la présence d'un unique opérateur télécoms sur le territoire, l'office des postes et des télécommunications de Nouvelle-Calédonie.
Crainte d'ingérences
Cette mesure d'interdiction est intervenue également sur fond de craintes d'ingérences et de désinformation sur les réseaux sociaux venant de pays étrangers qui chercheraient à attiser les tensions, avait encore justifié des sources gouvernementales et de sécurité, évoquant la Chine ou l'Azerbaïdjan.
Contacté mercredi par l'AFP, TikTok avait jugé "regrettable qu'une décision administrative de suspension de (son) service ait été prise (...) sans aucune demande ou question, ni sollicitation de retrait de contenu, de la part des autorités locales ou du gouvernement français".
"Nos équipes de sécurité surveillent très attentivement la situation et veillent à ce que notre plateforme soit sûre, assure le réseau social. Nous nous tenons à la disposition des autorités pour engager des discussions".
Une décision "sans précédent"
Sur le réseau X, le juriste Nicolas Hervieu, qui enseigne à Sciences-Po et à l'université d'Evry, avait estimé qu'il s'agissait d'une décision "sans précédent" et jugé que sa légalité était "discutable", bien que liée à l'état d'urgence.
Conformément à la loi du 3 avril 1955, "le ministre de l'Intérieur peut prendre toute mesure pour assurer l'interruption de tout service de communication au public en ligne provoquant à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie".
"Si jamais, cela est contesté devant le juge, il y aurait trois questions : est-ce que c'est prévu par la loi ? Est-ce que c'était nécessaire ? Est-ce que c'était proportionné ?", avait expliqué mercredi à l'AFP Amélie Tripet, avocate spécialisée du droit des médias au cabinet August Debouzy. "C'est une décision potentiellement fragile juridiquement", avait-elle ajouté.