Laurent Voulzy, parrain de la transat Belle-île-en-Mer/Marie-Galante : "Cette chanson, elle n’était pas censée être connue"

Quinze ans après sa dernière édition, la transatlantique reliant l'île bretonne à l'île guadeloupéenne va de nouveau hisser ses voiles. Le grand départ est prévu ce dimanche 7 avril. À cette occasion, le chanteur d’origine marie-galantaise Laurent Voulzy, parrain emblématique de la course, s’est livré à Outre-mer la 1ère.

"Belle-île-en-Mer / Marie-Galante, Saint-Vincent, loin Singapour…" Ces notes résonnent dans nos têtes comme le chant de la mer qui résonne sur le rivage. Un brin mélancolique et nostalgique, Laurent Voulzy, parrain de la transat Belle-île-en-Mer/Marie-Galante, qui s'élance de l'île bretonne dimanche 7 avril, revient sur la chanson qui a fait sa renommée et donné naissance à cette course, mais aussi sur sa découverte tardive de la Guadeloupe.

Votre titre Belle-île-en-Mer – Marie-Galante, c’est une chanson qui parle de solitude. Un peu comme un marin sur son bateau, n’est-ce pas ?

Cette chanson est comme une allégorie. Quand je l’ai écrite, c’était pour deux îles qui me sont chères : l’une qui me faisait rêver, Marie-Galante, dont ma mère me parlait énormément durant mon enfance, et l’autre Belle-île-en-Mer.

Cette chanson parle à la fois de la mer qui sépare les deux îles, et en même temps d’isolement. Mais, elle parle aussi des différences qu’on peut avoir. Moi, j'étais un enfant un peu différent des autres à la fin des années 1960-1970. Je me sentais un peu à part de par mon origine et ma couleur. Cette chanson est devenue importante dans ma vie.

C’était aussi une façon de mettre en lumière Marie-Galante et la Guadeloupe ?

Absolument. Je trouve ça tout à fait merveilleux. Cette chanson à la base, elle n’était pas censée être connue, elle l’est devenue par hasard. Le plus extraordinaire, c’est qu’elle est devenue une transatlantique. J’ai été extrêmement triste quand j’ai appris qu’elle s’arrêtait (la transat Belle-Île en mer/ Marie-Galante est organisée pour la troisième fois en 2024, après 2007 et 2009, NDLR). Quand on m’a annoncé que ça reprenait, j’étais heureux. 

J’éprouve tellement d’admiration pour ces gens qui voyagent. C’est une magnifique histoire, j’ai vécu deux fois cette transat en tant que parrain et spectateur. Le départ et l’arrivée sont deux moments extraordinaires.

Vous avez découvert la Guadeloupe à 35 ans. Que gardez-vous comme souvenirs ?

Éduqué par ma mère, j’avais souvent de la famille de Guadeloupe qui venait me voir. J’entendais parler de Marie-Galante : elle avait vécu là-bas jusqu’à ses trois ans. J’avais une vision légendaire de la Guadeloupe, et en même temps, j'étais heureux d’être là et de les écouter. Je mangeais créole, je dansais la biguine, j’entendais la musique antillaise depuis ma naissance... Donc les Antilles ça faisait partie de ma vie. Mais j’ai grandi ici, donc mes premiers groupes de musique, c'était le rock'n'roll.

Mon envie de découvrir la Guadeloupe est venue tard. Les Antilles, c’est venu à partir de 20-25 ans. C’est à l’époque où j’ai commencé à avoir de l’argent. Ma mère n’avait pas l’argent. Elle était professeure, elle avait quatre enfants et était seule, donc je ne connaissais la Guadeloupe que dans les livres, photos, les films et la musique. Puis, quand j’ai commencé à gagner de l’argent, j'étais pris par le travail, les enregistrements, je n'y allais pas. À 35 ans, je n’y étais toujours pas allé. Et, un jour, on m’a alerté d’un Téléthon là-bas où beaucoup de chanteurs hexagonaux étaient conviés et qu’il fallait que j’y sois, car j’étais le seul Antillais de la bande. Mais je ne pouvais pas à ce moment, car j’enregistrais un album. Mais ils ont continué à me relancer, et au dernier moment, j'ai sauté dans l’avion. 

En arrivant à Pointe-à-Pitre, le spectacle avait déjà commencé. Je me suis rendu au Centre des Arts, je suis monté sur scène et j'ai chanté Le cœur grenadine. C’était assez bouleversant. Le lendemain, je suis parti seul vers Sainte-Anne. J’ai marché dans les rues et j’ai eu les larmes aux yeux. C’était extrêmement merveilleux, car quand j’étais petit, j'ai extrêmement souffert des réflexions des gens. En marchant dans les rues de Sainte-Anne, j’ai découvert et reconnu des choses, les odeurs de cuisine de ma mère. Ça m’a bouleversé. Maintenant, quand je vais en Guadeloupe, j’ai toujours la même vision. J’ai les souvenirs de ma mère qui me parle du bal du Gouverneur. J’ai une vision un peu légendaire, à moitié dans les livres et dans la vraie vie. C’est assez extraordinaire ce que je vis. Je suis content d’avoir connu la Guadeloupe si tard, car je la vis profondément.