Les Antillais de Paris ont manifesté contre la violence

Environ 200 Antillais ont marché samedi après-midi dans les rues du 12ème arrondissement de Paris pour protester contre la violence dans leurs départements. Ils ont lancé, aux pouvoirs publics, un cri d’alarme pour venir en aide aux jeunesses de Martinique et de Guadeloupe.
D’abord interloqués par les sons puissants des tambours du groupe Choukaj, les Parisiens qui se trouvaient sur le parcours allant de Bastille à Nation (12ème arrondissement de la capitale) ont d’abord cru à un défilé carnavalesque, certains automobilistes n’hésitant pas à se trémousser dans leurs véhicules. Mais les banderoles exposées en tête du défilé n’avaient rien d’amusant : « Et si demain, c’était votre enfant… ! » était-il écrit sur l’une d’elle. « Contre la violence aux Antilles » affichaient, quant à eux, les t-shirts de l’association du même nom. C’est elle qui a organisé ce rassemblement en lançant un appel sur les réseaux sociaux. Elle s’est créée en juin dernier face au terrible constat de l’explosion du nombre d’homicides, d’abord en Guadeloupe, mais aussi en Martinique, en Guyane et à La Réunion.

  Allan, plus jamais ça

 
« Nous attendons que les acteurs sociaux et éducatifs nous entendent » a lancé Sandrine Calmo, la vice-présidente de l’association Contre la violence aux Antilles. « Manuel Valls l’a dit lui-même : il n’a pas de baguette magique ! Mais nous attendons du respect envers notre communauté ». « D’ailleurs, poursuit Samuel Privat, jeune membre de cette même association, le Ministre est rentré en urgence de son voyage aux Antilles, alors que l’urgence se trouvait justement aux Antilles ». Les Outre-mer ignorés par le gouvernement ? C’est en tout cas ce que croit la marraine de cette marche. En août dernier, Marie-Line Bourgeois, une maman martiniquaise, a vu cette violence emporter son jeune fils Allan, 19 ans, dont le corps a été retrouvé dans une rivière à Fort de France. « Aujourd’hui, je suis une mère meurtrie, je suis perdue, a-t-elle confié. Sans l’aide de ma famille, je serais probablement déjà aux côtés d’Allan. Il faut que l’Etat trouve des solutions pour sortir tous ces jeunes de la rue, car après, ce sera trop tard. Pour eux, sans travail, cette violence est une distraction. » Si elle a accepté l’invitation, c’est pour qu’aucune mère ne vive un jour ce qu’elle vit depuis quelques semaines.

Un message à travers les tambours

 
Félicien, un septuagénaire guadeloupéen installé à Paris depuis les années 70, a pris la décision de venir manifester immédiatement après avoir eu écho de l’appel lancé sur les réseaux sociaux. « Notre Guadeloupe n’est plus comme avant. C’est désolant, dit-il attristé, mais il ne faut pas croire que l’on ne peut rien y faire, que c’est la conséquence des évolutions du monde ». Tous les participants à cette marche semblaient désolés des images de la Guadeloupe et de la Martinique montrées récemment sur les télévisions nationales. « Ce n’est pas notre Guadeloupe, assure Cédric Cornet, jeune élu de l’archipel, candidat à la mairie du Gosier, actuellement en formation à Paris. Il faut que tout cela s’arrête. Alors que les Îles de Guadeloupe dépensent des millions en campagnes publicitaires, des images inverses sont diffusées gratuitement dans les JT. Cela risque d’être catastrophique pour notre tourisme ». Par solidarité, à 8000 km, Martiniquais et Guadeloupéens  de Paris ont donc défilé, fièrement, jusqu’à la place des Antilles, aux sons du groupe Choukaj. « Choukaj, ce n’est pas n’importe quelle musique, prévient Samuel, le jeune membre de l’association. Ce sont des paroles de l’Histoire avec un côté revendicatif. Ce n’est pas que folklorique. Il y a un message à faire passer. Et nous aux Antilles, on fait souvent passer les messages à travers les tambours. »