Pour lutter contre les déserts médicaux, la Guyane veut faire venir des docteurs cubains

La Guyane étudie la possibilité de faire venir des médecins cubains sur son territoire pour répondre à la pénurie de docteurs. Une vraie urgence dans cette région, la seule autorisée à recruter en dehors de l'Union Européenne.
Confrontée à une pénurie de médecins, la Guyane a commencé des discussions avec les autorités cubaines pour faire venir des docteurs de ce pays, a indiqué mercredi à l'AFP le président de la Collectivité territoriale de Guyane, Rodolphe Alexandre. En déplacement à Paris, M. Alexandre, accompagné des sénateurs Georges Patient et Antoine Karam, a rencontré mardi l'ambassadeur cubain à Paris, Elio Rodriguez Perdomo, ainsi que la vice-ministre cubaine de la Santé, Marcia Cobas, pour évoquer ce projet, qui, s'il se concrétise, serait une première sur le territoire français.
 

Une centaine de médecins

"Il y a vraiment urgence en Guyane", et l'idée serait de faire venir "une centaine de médecins (cubains) spécialisés dans les hôpitaux afin de pallier le désert médical que nous connaissons", a expliqué Rodolphe Alexandre, détaillant les besoins: "Il faudrait au moins 15 chirurgiens dentistes, trois cancérologues, cinq pneumologues..."

Depuis une ordonnance du 26 janvier 2005, la Guyane est le seul territoire français autorisé à recruter du personnel médical hors de l'Union européenne. Face à la demande guyanaise, les autorités cubaines "sont très favorables", a assuré M. Alexandre, précisant que "ce sera l'Etat (cubain) qui va facturer" ce service.
 

"Diplomatie des blouses blanches"

Il se rendra à Cuba début avril pour poursuivre ces discussions, le projet nécessitant le feu vert de l'Ordre des médecins de Guyane (jusque-là réticent à la venue de professionnels étrangers sur le territoire) et du ministère français de la Santé. "Nous savons que les Guyanais sont unanimes pour protester contre le désert médical" dont souffre le territoire, qui jusqu'à présent a fait venir des docteurs principalement d'Afrique pour tenter de compenser cette pénurie.

Les médecins et ambulanciers cubains travaillent aujourd'hui dans 67 pays. La pratique, dite "diplomatie des blouses blanches", dure depuis les années qui ont suivi la révolution emmenée par Fidel Castro en 1959. "Je les ai vu travailler au Brésil, en Haïti", a raconté M. Alexandre. "Incontestablement, leur réputation est mondiale".

Ces services représentent la principale source de revenus de l'île, avec 11 milliards de dollars de recettes annuelles, soit plus que celles du tourisme et des transferts de fonds des émigrés. Ces recettes ont toutefois diminué ces dernières années en raison de la crise au Venezuela, où travaillent plusieurs milliers de médecins cubains, et de la fin du programme au Brésil, après les critiques virulentes du président Jair Bolsonaro qui a comparé leurs conditions de travail à un "esclavage", et dit refuser de financer "la dictature cubaine".