L'Assemblée nationale a voté jeudi l'adaptation du droit du sol à Mayotte, soutenue par l'exécutif pour faire face à la très forte immigration clandestine en provenance des Comores, au terme d'un débat nourri, y compris au sein de la majorité.
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En nouvelle lecture du projet de loi asile-immigration, les députés ont donné leur aval par 47 voix contre 19 à un article introduit au Sénat qui exige pour les enfants nés à Mayotte que l'un de ses parents ait, au jour de la naissance, été présent de manière régulière sur le territoire national depuis plus de trois mois.
Fin juin, lors d'un discours consacré aux Outre-mer, Emmanuel Macron avait soutenu cette démarche qui permet "de préserver le droit du sol qui est l'un de nos principes fondamentaux, en adaptant ses conditions d'exercice à la réalité de ce territoire".
Dans les rangs de la majorité, où neuf LREM et deux MoDem ont voté contre l'article, des voix se sont élevées contre une disposition "mal préparée", notamment Saïd Ahamada (LREM) ou Nadia Essayan (MoDem). "Est-ce qu'on va résoudre le problème? La réponse est non", a aussi lancé Sonia Krimi, parmi les élus LREM abstentionnistes en première lecture. La députée, née en Tunisie, a déploré que cela rouvre les débats "sur les ‘horribles’ étrangers dont je faisais partie" qui "viennent pour profiter". Lui répondant "amicalement mais fermement", Florent Boudié (LREM) a affirmé que "rien n'interdit de ne pas se voiler la face", récusant toute volonté "d'attaquer le droit du sol".
Côté LR, Fabien Di Filippo a notamment déploré le "temps perdu", tandis qu'Eric Ciotti (LR) a proposé vainement de "généraliser ce principe à l'ensemble du territoire national". Estimant que le droit du sol "n'est pas un totem", Marine Le Pen (RN) a proposé de le "supprimer purement et simplement" à Mayotte, qui vit, selon elle, "sous couvre-feu", avec des pouvoirs publics "noyés sous le nombre de clandestins".
Inquiétude du Défenseur des droits
Dans un communiqué publié jeudi après-midi, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, « s’inquiète des dispositions du projet de loi (…) introduites par amendement et tendant à l’instauration de règles dérogatoires pour l’accès à la nationalité française des enfants nés à Mayotte ». Il « entend rappeler qu’aujourd’hui déjà, en l’état de notre droit, la seule naissance en France ne permet pas d’acquérir la nationalité française, mais qu’elle est subordonnée à des conditions restrictives d’âge, 13, 16 ou 18 ans et de résidence, résidence actuelle fixée en France et résidence habituelle au moins cinq années sur le territoire français. »
« Si en application de l’article 73 de la Constitution, dans les départements et les régions d'Outre-mer, les lois et règlements peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités, le Défenseur des droits s’interroge sur la réalité de la corrélation entre les conditions d’accès à la nationalité, qui n’ont pas connu d’évolution depuis de nombreuses années, et les flux migratoires constatés ou l’augmentation récente du taux de natalité à Mayotte », poursuit le communiqué.
Par ailleurs, « il souligne que l’objectif mis en avant par le projet de loi apparaît comme étant sans rapport avec l’objet même de la loi, de sorte que la dérogation au droit commun de la nationalité constituerait une atteinte injustifiée au principe d’indivisibilité et au principe d’égalité. »
« Cette disposition, introduite alors même que l’acquisition de la nationalité est déjà soumise à des conditions contraignantes, est par ailleurs susceptible de porter atteinte à l’intérêt supérieur des enfants et de caractériser une discrimination à raison de leur situation juridique. Elle serait ainsi contraire à la Convention internationale relative aux droits de l’enfant et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales », précise le Défenseur des droits.
Fin juin, lors d'un discours consacré aux Outre-mer, Emmanuel Macron avait soutenu cette démarche qui permet "de préserver le droit du sol qui est l'un de nos principes fondamentaux, en adaptant ses conditions d'exercice à la réalité de ce territoire".
Situation "exceptionnelle"
Dans l'hémicycle, le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a défendu à son tour une évolution "nécessaire et équilibrée". Il a eu l'appui des deux députés de Mayotte, Ramlati Ali (LREM) et Mansour Kamardine (LR), la première invoquant une réponse à une situation "exceptionnelle", le second estimant que le principe d'une République "une et indivisible n'interdit pas la prise en compte de spécificités".Dans les rangs de la majorité, où neuf LREM et deux MoDem ont voté contre l'article, des voix se sont élevées contre une disposition "mal préparée", notamment Saïd Ahamada (LREM) ou Nadia Essayan (MoDem). "Est-ce qu'on va résoudre le problème? La réponse est non", a aussi lancé Sonia Krimi, parmi les élus LREM abstentionnistes en première lecture. La députée, née en Tunisie, a déploré que cela rouvre les débats "sur les ‘horribles’ étrangers dont je faisais partie" qui "viennent pour profiter". Lui répondant "amicalement mais fermement", Florent Boudié (LREM) a affirmé que "rien n'interdit de ne pas se voiler la face", récusant toute volonté "d'attaquer le droit du sol".
L’opposition fustige l’article
La gauche a aussi fustigé un article qui "va à l'encontre de l'Histoire" (Muriel Ressiguier, LFI), vient "casser encore un peu plus l'unicité de la République" (Pierre Dharréville, PCF) ou "ouvre une boite de Pandore" (Marietta Karamanli, PS). "Nous ouvrons un biais dangereux en droit", a également estimé Olivier Becht (UDI-Agir), magistrat de profession.Côté LR, Fabien Di Filippo a notamment déploré le "temps perdu", tandis qu'Eric Ciotti (LR) a proposé vainement de "généraliser ce principe à l'ensemble du territoire national". Estimant que le droit du sol "n'est pas un totem", Marine Le Pen (RN) a proposé de le "supprimer purement et simplement" à Mayotte, qui vit, selon elle, "sous couvre-feu", avec des pouvoirs publics "noyés sous le nombre de clandestins".
Inquiétude du Défenseur des droits
Dans un communiqué publié jeudi après-midi, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, « s’inquiète des dispositions du projet de loi (…) introduites par amendement et tendant à l’instauration de règles dérogatoires pour l’accès à la nationalité française des enfants nés à Mayotte ». Il « entend rappeler qu’aujourd’hui déjà, en l’état de notre droit, la seule naissance en France ne permet pas d’acquérir la nationalité française, mais qu’elle est subordonnée à des conditions restrictives d’âge, 13, 16 ou 18 ans et de résidence, résidence actuelle fixée en France et résidence habituelle au moins cinq années sur le territoire français. »
« Si en application de l’article 73 de la Constitution, dans les départements et les régions d'Outre-mer, les lois et règlements peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités, le Défenseur des droits s’interroge sur la réalité de la corrélation entre les conditions d’accès à la nationalité, qui n’ont pas connu d’évolution depuis de nombreuses années, et les flux migratoires constatés ou l’augmentation récente du taux de natalité à Mayotte », poursuit le communiqué.
Par ailleurs, « il souligne que l’objectif mis en avant par le projet de loi apparaît comme étant sans rapport avec l’objet même de la loi, de sorte que la dérogation au droit commun de la nationalité constituerait une atteinte injustifiée au principe d’indivisibilité et au principe d’égalité. »
« Cette disposition, introduite alors même que l’acquisition de la nationalité est déjà soumise à des conditions contraignantes, est par ailleurs susceptible de porter atteinte à l’intérêt supérieur des enfants et de caractériser une discrimination à raison de leur situation juridique. Elle serait ainsi contraire à la Convention internationale relative aux droits de l’enfant et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales », précise le Défenseur des droits.