Mikaele Tui : "Coutume, État, religion, c'est la trilogie qui gouverne Wallis et Futuna" [#MaParole]

Le 4 août 2023, Mikaele Tui est décédé à Paris des suites d'un cancer. Pour le podcast #MaParole, Outre-mer La 1ère l'avait rencontré en 2021 à l'occasion des 60 ans du rattachement de Wallis et Futuna à la France. Retour sur cette rencontre avec le meilleur ambassadeur de l’archipel dans l’Hexagone.

C'est en 1961 que Wallis et Futuna, archipel situé à 16 000 km de l’Hexagone, est devenu français. Soixante années après, plusieurs événements dans l'Hexagone célèbrent et questionnent cet anniversaire. C'est dans ce contexte que Mikaele Tui, grand connaisseur de son archipel, a accepté de raconter son étonnant parcours dans #MaParole.

#1 Naissance en chemin

Il y a des naissances qui semblent miraculeuses. Celle de Mikaele Tui ressemble à un conte. Sa mère montait à cheval en direction de l’hôpital avec son mari quand elle a ressenti des contractions. Impossible d’attendre. Elle a dû accoucher sur la route au lieu-dit ‘Aka ‘Aka ‘A. C’est ainsi que Mikaele est arrivé sur terre un 14 février 1956, "le jour de la Saint-Valentin", se plait-il à dire. Pressé d’en découdre, avide de connaissance, curieux de tout et défenseur farouche de Wallis et Futuna, Mikaele Tui est né sous un manguier.

Il a grandi à Wallis dans le district de Hihifo dans une famille nombreuse et aimante. Il a été à l’école chez les sœurs maristes. Et enfant, il adorait passer son temps au bord de la mer à nager et pêcher avec les copains "comme tout petit Wallisien". Il fait partie de ces grandes familles Aliki, l’aristocratie de Wallis. Sur l’île où le Lavelua règne en maître -il est même appelé roi en Français- la société est très hiérarchisée. Destiné à la prêtrise, Mikaele Tui est parti à l’âge de 15 ans au séminaire Saint-Léon de Païta en Nouvelle-Calédonie. Pendant quatre années, il a étudié pour devenir prêtre, mais a fini par renoncer. "Les voix du seigneur sont impénétrables et je ne les ai jamais entendues", dit-il. Un choix difficile à accepter pour son grand-père dont la famille a donné beaucoup de prêtres à Wallis.

 

#2 Toujours premier aux concours

Par la suite, le jeune homme s’est embarqué dans la marine. Il a vu du pays. De retour à Wallis, Mikaele Tui est devenu traducteur pour la radio et la télévision naissante. Et puis en 1980, il a passé un concours pour entrer à Météo France. Pourquoi avoir changé de voie ? Mikaele explique la situation de manière très simple. "Je n’ai pas toujours été exemplaire en terme de conduite personnelle. Je faisais partie d’une catégorie de "farfelus" qui s’adonnait à la boisson et ça se reflétait dans le métier".

Au concours de Météo France, le Wallisien est arrivé premier. Technicien et observateur météo, il est devenu incollable sur les cumulonimbus. Mais encore une fois son parcours a été stoppé en raison de "ses mauvaises habitudes". Mikaele Tui a passé un nouveau concours, à RFO et il est arrivé (à nouveau) premier. Ce touche-à-tout est devenu cameraman, JRI (journaliste reporter d'images) comme on dit dans notre jargon. Puis il a passé un concours à la poste et il est reparti en Nouvelle-Calédonie. La bougeotte on vous dit !

Mikaele Tui est ensuite revenu à Wallis en tant que secrétaire général du syndicat FO à la poste. Vous pensiez que c’était fini. Et bien non ! Mikaele Tui a été appelé à de hautes fonctions dans la société wallisienne. Il a été nommé Mahé (ministre coutumier) par le Lavelua de Wallis, le roi en Français. Pendant deux ans, il a donc œuvré au cœur de la royauté locale. Il a lutté contre le gâchis alimentaire. Mais très vite, des désaccords sont apparus et Mikaele Tui a été démis de ses fonctions. Il avait bien du mal à cacher ses désaccords sur la manière d’envisager la société wallisienne.

 

#3 Lutte contre la maladie

Par la suite, Mikaele Tui a été nommé directeur adjoint des affaires culturelles à la préfecture de Wallis et Futuna. Mais en 1995, notre homme a dû être évasané dans l’Hexagone en raison d’un cancer. Depuis cette date, Mikaele Tui n’a pas cessé de se battre contre la maladie avec un courage qui force l’admiration. Il s’est toujours intéressé à l’histoire de son archipel, à la généalogie, aux grandes familles royales. Il s’est rendu en Israël, en Suisse, au Vatican à la recherche d’archives établies par des missionnaires. Malgré la maladie, il a réussi à suivre des études d’anthropologie à l’Université de Lyon. Il a aussi créé une association dénommée Felave'i Fiafia pour faire connaître la culture et les traditions de Wallis et Futuna dans l’Hexagone.

L’association a participé au festival des cultures du monde à Gannat fin juillet et elle se rendra au festival Rochefort Pacifique du 6 au 10 octobre 2021 ainsi qu’au festival de la gastronomie de Babette de Rozières en janvier.

A la prise de son : Bruno Dessommes.

Pour retrouver tous les épisodes de #MaParole, cliquez ici.  

 

 

♦♦ Mikaele Tui en 5 dates ♦♦♦

14 février 1956

Naissance à Alele Wallis

►Février 1969

Entrée au séminaire

29 septembre 1979

Mariage avec Faupala Pipiena célébré à l'église de Mua

►Avril 1997

Nomination au poste de Mahé

►Janvier 2017

Création de l'association Felave’i Fiafia