Minute Santé. Le sucre est-il une "drogue" comme les autres ?

Minute Santé : le sucre, une "drogue" comme les autres ?
Le saccharose, plus connu comme le sucre, est produit essentiellement à partir de betteraves dans l'Hexagone et de cannes Outre-mer. Au-delà de problèmes physiques – diabète, obésité –, sa consommation excessive entraîne aussi une forme d'addiction au point que le sucre est comparé à une drogue. Mais en est-ce vraiment une ?

Avez-vous déjà ressenti l'appel du placard ou du frigo ? Vous savez, cette envie irrépressible d'une "note sucrée" qui vous empêche de penser à autre chose et qui vous conduit à manger un carré de chocolat, puis deux puis toute la plaquette ?

Attention, vous êtes très certainement accro ! Oui, accro, le terme n'est pas trop fort, car certains chercheurs ont conclu que la consommation de sucre a des effets similaires à la consommation de cocaïne ! Comment est-ce possible ? On vous l'explique dans cette Minute Santé.

Déjà, de quoi parle-t-on ? Il existe plusieurs sortes de sucre. Parmi les glucides simples les plus connus, il y a :

  • Le glucose, qu'on trouve naturellement dans les fruits, le miel, certains légumes. C'est la meilleure source d'énergie parmi les sucres.
  • Le fructose, qu'on trouve aussi dans les fruits, le miel et la plupart des légumes racines.
  • Le saccharose, ou sucre de table, est un mélange de glucose et fructose. On le trouve naturellement dans des fruits, des légumes, des céréales, mais aussi dans de nombreux produits transformés et industriels.
  • Le lactose et le galactose, présents dans les produits laitiers.

Comme les protides et les lipides, les glucides sont indispensables au bon fonctionnement de notre organisme, car ils fournissent de l'énergie. Ils agissent aussi dans le cerveau sur un réseau de neurones connu comme "le circuit de la récompense".

La dopamine, la molécule du plaisir

Comme l'explique l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), "ce système est fondamental" car il nous conduit "à réaliser des actions et à adopter des comportements qui sont nécessaires à notre survie" comme se nourrir ou se reproduire.

Ainsi, le fait de manger provoque "une libération de dopamine", cette molécule qui transmet des messages d'un neurone à l'autre et qui déclenche la sensation de plaisir. "Il en résulte une satisfaction qui constitue une récompense et nous conduit à renouveler ce comportement", poursuit l'Inserm.

Problème : c'est ce même circuit qui est déclenché par le tabac, l'alcool, les drogues… Au départ, leur consommation "procure effectivement du plaisir". Mais elle altère "en parallèle d’autres systèmes cérébraux, notamment parmi ceux qui sont impliqués dans la régulation de nos émotions et de notre bien-être". On finit par prendre ces produits non plus par plaisir "mais pour sortir d’un état émotionnel négatif".

Mais quel rapport avec le sucre ? En fait, manger des aliments gras et/ou sucrés entraîne une libération plus importante de dopamine, ce qui explique qu'on ait plus envie de reprendre du sucre qu'un navet. Au point d'en devenir accro ?

Les rats préfèrent le sucre à la cocaïne

Plusieurs expériences menées sur des rats ont montré que ces derniers préféraient largement consommer de l'eau sucrée plutôt que de la cocaïne. Si certains chercheurs en ont conclu que le sucre est plus addictif que la poudre blanche, d'autres soulignent qu'il s'agit de deux formes de dépendance difficilement comparables.

La dépendance se manifeste en effet par plusieurs critères comme :

  • Le besoin tyrannique et pressant de consommer, autrement appelé le craving.
  • La perte de contrôle.
  • Le temps passé à consommer (ou à y penser).
  • Le syndrome de sevrage (sueurs froides, mal de ventre ou de tête, etc.)
  • Le niveau de tolérance (besoin de consommer toujours plus pour trouver la sensation ressentie au début).
  • La poursuite de la consommation malgré les désagréments physiques.

La consommation de sucre peut certes entraîner les trois premiers comportements, comme lorsqu'on ne peut s'empêcher d'aller fouiller dans le frigo, ou encore qu'on se dit 'Je vais juste prendre un carré de chocolat' avant d'engloutir la tablette. Elle peut aussi déclencher une mauvaise humeur quand on n'a pas accès à du sucre alors qu'on en a envie. Mais elle n'entraîne pas de phénomène de tolérance ni de comportements déviants comme peuvent le faire les drogues dures.

Jean Zwiller, directeur de recherche CNRS au laboratoire de neurosciences cognitives de Strasbourg et spécialiste des drogues, déclarait ainsi dans Libération : "Quand des gens me disent : 'Je suis dépendant du chocolat', je réponds : 'La dépendance à la cocaïne ou au crack pousse à voler, à se prostituer, vous connaissez quelqu'un qui se prostitue pour un carré de chocolat ?'"

3 conseils pour stopper l'addiction

La similitude qui pourrait exister entre le sucre et des drogues classiques est qu'ils génèrent une sensation de réconfort temporaire, en réaction à des émotions négatives ou un mal-être. Si c'est effectivement le cas, la première chose à faire est de comprendre d'où vient ce mal-être, de quel trouble psychologique il s'agit, pour se sentir mieux dans sa peau.

La seconde recommandation est d'éviter les produits industriels. En regardant les étiquettes, vous constaterez par vous-même que de nombreux aliments transformés comme les nuggets congelés, de la charcuterie ou certaines soupes de légumes contiennent des sucres cachés. Le mieux est donc de cuisiner au maximum soi-même.

Troisième conseil : si vous ne pouvez pas vous passer de sucre, essayez malgré tout de limiter la quantité et de remplacer le saccharose par des fruits ou du miel. Votre corps et votre cerveau vous diront merci !