Mondiaux de judo à Budapest : Teddy Riner vise la gagne avant la manière

Depuis qu'il a replongé pour une nouvelle olympiade, Teddy Riner aspire à développer un judo plus flamboyant. Mais sevré de compétition depuis
plus d'un an, la superstar du judo, lancée à la conquête d'un neuvième sacre mondial inédit, vise "la gagne" avant la manière, ce samedi à Budapest.
En retrouvant dojo et tatamis en janvier, cinq mois après avoir conservé la couronne olympique des poids lourds, Riner (28 ans) avait identifié le moyen de durer et garder la flamme: "La source de motivation de ces quatre ans, c'est retrouver un judo flamboyant. Teddy doit prendre du plaisir à mettre des ippons", expliquait alors son entraîneur à l'Insep, Franck Chambily.

Mettre toutes les chances de son côté

Pour chasser au passage la frustration née ces dernières années de combats verrouillés par ses adversaires. "Je m'entraîne comme un dingue, j'essaie de mettre tout le temps des ippons. Alors quand on tombe sur un adversaire qui refuse le combat ou se met tout le temps en défense, ça devient un peu lassant", ne cachait pas Riner.

Après une longue pause

Ce samedi dans la capitale hongroise, la donne est toutefois différente. Car quand le colosse (2,03 m, autour de 140 kg), invaincu depuis presque sept ans et une série vertigineuse de 128 combats, a repris l'entraînement début 2017, il avait atteint "des sommets inégalés" sur la balance, hérités d'une longue pause post-olympique.


Mise en danger

"Les premiers mois, j'ai pris cinq, dix kilos. Après, c'est parti en cacahuètes...", esquissait-il. Il s'est délesté depuis de 25 kg. Mais son corps ne l'a pas laissé tranquille au moment où il prévoyait de renouer avec la compétition. Un tibia gauche douloureux (hématome au niveau d'une membrane protégeant l'os) l'a privé d'un retour en Russie fin mai, puis son coude droit, déjà opéré en 2015, s'est remis à grincer. Il ne s'est pas épargné une ultime frayeur dans la dernière ligne droite avant Budapest: une coupure ménagère au niveau du pouce, qui lui a valu quelques points de suture et l'oblige à combattre la main strappée samedi.

Dans la gagne

"Il y a la réalité d'une année post-olympique un peu difficile. Après Londres (en 2012), ça l'avait été mais il était quand même champion d'Europe en titre avant de partir à Rio (pour les Mondiaux-2013, ndlr). Là, il a zéro compétition, il n'est plus tête de série, il se met en danger", concède Chambily. Dans ces conditions, la manière risque d'attendre. "Très sincèrement, on est dans la gagne coûte que coûte, reconnaît l'entraîneur. Le judo flamboyant, s'il est là tant mieux, s'il n'est pas là, on l'oublie. L'objectif, c'est d'aller conquérir un neuvième titre mondial, c'est la gagne avant tout."


Battre des records

Pour autant, Riner n'a pas envisagé "une seule fois", dixit Chambily, de faire l'impasse sur les Mondiaux-2017, une option choisie par exemple par les trois champions olympiques en titre japonais, et à laquelle son entraîneur était favorable. A la fois pour préserver son élève d'une éventuelle "saturation" et "prendre le temps de travailler techniquement pour développer un judo qui gagne en efficacité".

"Quand on en a discuté, il m'a dit: Franck, je ne suis pas rassasié, j'ai envie d'aller chercher un neuvième titre, la compétition c'est ce qui m'anime, ce qui me fait avancer'", raconte celui qui est également responsable de l'équipe de France masculine. "On ne va pas empêcher un champion comme Teddy d'aller battre des records."

Objectif dix

A court de compétition, Riner pourra cependant s'appuyer sur les bénéfices d'une série de stages préparatoires, au Japon, en Catalogne puis en Normandie, où il a pu se confronter à des adversaires étrangers de premier plan, Japonais et Géorgiens notamment. "Dix titres mondiaux, c'est un bon objectif, c'est un chiffre rond !", lançait il y a quelques jours celui qui est déjà le judoka le plus titré aux Mondiaux. Samedi soir, Riner pourrait encore s'en approcher.