Opération Wuambushu : le ministre de l'Intérieur comorien attendu à Paris pour renouer le dialogue

La démolition d'une dizaine de bangas à Longoni, dans le cadre de l'opération Wuambushu.
Depuis cinq jours, les liaisons maritimes sont bloquées entre Mayotte et Anjouan, freinant l'opération qui vise, entre autres, à expulser des étrangers en situation irrégulière. Gérald Darmanin a invité le ministre de l'Intérieur comorien à Paris pour dénouer la situation.

Alors que les relations se sont tendues entre la France et les Comores dans le cadre de l’opération Wuambushu, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, a invité son homologue comorien à Paris pour tenter de débloquer la situation. Depuis cinq jours, les liaisons maritimes qui relient Mayotte et Anjouan sont arrêtées, ce qui rend impossible l’expulsion des étrangers en situation irrégulière. Interrogé sur le sujet par François-Noël Buffet (LR) lors de la séance de questions au gouvernement au Sénat ce mercredi 3 mai, Gérald Darmanin s’est voulu rassurant et a affirmé utiliser "tous les moyens diplomatiques pour renouer le contact".

Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, qui échange régulièrement avec son homologue comorien, l’a convaincu de se rendre à Paris pour renouer le dialogue. "Il a accepté cette invitation", se félicite Gérald Darmanin, qui affirme que la visite aura lieu "dans quelques jours".

Nous avons avec les Comores une coopération efficace depuis quatre ans. Chaque année, on compte 25 000 reconduites à la frontière.

Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur et des Outre-mer

Une opération "indigne des valeurs républicaines"

Si François-Noël Buffet s'inquiète de l'arrêt des expulsions, l'opération Wuambushu -qui vise à renvoyer des étrangers en situation irrégulière et à détruire des logements informels- reste controversée."Détruire des bidonvilles et expulser des sans-papiers ne permettra pas de rétablir la paix, au contraire, s'est agacé Jérémy Bacchi, sénateur PCF des Bouches-du-Rhône. On attendait de la France une réponse respectueuse du droit et de nos valeurs et non qu’elle se comporte comme chef de bande".

Vous venez de dire que la France se comporte en chef de bande ! (...) Ce que le gouvernement fait ici à Mayotte, c'est ce qu’il aurait dû faire depuis très longtemps : interpeller les bandes, casser la spirale des bangas, c'est-à-dire des habitats illégaux où vivent des enfants, des vieillards, des personnes handicapées qui n’ont ni eau, ni électricité, ni gaz.

Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur et des Outre-mer

Si Jérémy Bacchi assure ne pas "minimiser" les violences qui touchent Mayotte et comprendre "la détresse de la population", le sénateur critique néanmoins une "réponse uniquement répressive". L'opération Wuambushu est "indigne des valeurs républicaines" et attise les haines selon le sénateur, qui cite le vice-président du conseil départemental de Mayotte, Salime Mdéré, qui avait déclaré sur l'antenne de Mayotte la 1ère "que peut-être il faut en tuer quelques-uns" à propos des membres des bandes violentes qui sévissent sur l'île. 

Jérémy Bacchi n'est pas le seul à demander "des réponses sociales" au-delà "des réponses répressives". Thani Mohamed Soilihi, sénateur de Mayotte, voit dans l'opération Wuambushu "une réponse forte, très attendue par la population" mais appelle à aller plus loin. "Demain, il faudra aussi envisager un Wuambushu de l’éducation, de la santé, de l’aménagement et du logement", a déclaré le sénateur.

À Mayotte, 75% des élèves sont en décrochage scolaire, contre 10% au niveau national. L'espérance de vie à la naissance est nettement plus faible sur le territoire qu'ailleurs en France : elle plafonnait à 75 ans en 2019, soit huit ans de moins que dans l'Hexagone. Enfin, dans le département le plus pauvre de France, environ 40% des logements sont précaires ou insalubres.