Même s'il a aujourd'hui 34 ans, Dimitri Pavadé demeure un jeune sportif. Le Réunionnais n'a découvert le haut niveau qu'en 2016. Avant cela ? Pas grand-chose. "Gamin à La Réunion, j'ai dû faire six mois d'athlétisme. Puis un peu de foot comme tout le monde. Je jouais arrière droit. Je me rappelle juste que je ne supportais pas de perdre." Bien des années plus tard, Dimitri est devenu un champion référence du para athlétisme. Qui n'aime toujours pas perdre. Un warrior… communiquant. "C'est amusant car petit, je détestais qu'on me prenne en photos. Aujourd'hui, avec mon statut, j'aime bien ça. Je me régale en fait. Une nouvelle personnalité s'est formée. J'en joue un peu, c'est vrai. J'adore communiquer autour de mon sport."
La rencontre qui change tout
2007 : Dimitri Pavadé, 18 ans est docker au Port à La Réunion. Percuté par un chariot élévateur, il se retrouve amputé au niveau du tibia de la jambe droite. Sept ans plus tard, il rejoint l'Hexagone pour suivre une formation de technicien orthoprothésiste. À cette époque, il ne pratique aucun sport. "Juste de la musculation." Son premier stage, il le fait à Toulouse. Chez Lagarrigue. Où il rencontre Alain Montean, le PDG. "Dans un premier temps, c'est ma musculature sous la blouse qui l'a impressionné. Puis il m'a proposé de courir avec les lames que la société produisait ! Cette rencontre a tout changé. Il m'a donné un CDI après mon diplôme. Tout en m'ouvrant au monde du sport. Depuis mon accident, une très bonne étoile veille sur moi."
Janvier 2016 : Dimitri découvre l'entraînement. À Toulouse. Dans le premier club handisport de la ville. "Je partais de zéro. Sauf que je me sentais vraiment à l'aise avec la lame. En fait, le plus dur pour moi, c'était les entraînements dans le froid." Sprint, longueur, hauteur, javelot… Le Réunionnais goûte à tout. Et performe. Vite. Dès 2017, il s'impose aux Jeux de la Francophonie sur le 200 mètres et à la longueur. Deux médailles d'or. Depuis 2018, il ne se consacre plus qu'au seul saut en longueur. Et avec une insolente réussite : vice-champion d'Europe, du monde et paralympique. Tout en restant modeste. "J'ai la chance d'être prothésiste de profession. Si je veux vérifier ou modifier le réglage de ma lame de compétition, je passe à l'atelier et le tour est joué."
Sa première grosse blessure
Cet été, Dimitri Pavadé devait être l'une des attractions des Mondiaux de para athlétisme au stade Charléty à Paris. Malheureusement fin juin, le champion est victime d'une rupture des ligaments croisés antérieurs du genou droit. Première blessure grave de sa carrière. Pas de Mondiaux à la maison. Logique. Mais une opération. Lourde. Minutieuse. Le 17 juillet dernier. "Deux jours plus tard, je débutais ma rééducation. Le plus compliqué, c'était de retrouver la confiance. La confiance en son corps, en son appui. Les bonnes sensations ne sont revenues qu'en octobre dernier."
Durant cette épreuve, le Réunionnais n'a jamais perdu le sourire. Il y a bien eu des grimaces. Des douleurs. "Surtout durant les premiers exercices de renforcement musculaire. Je devais soulever des charges de plus en plus lourdes. J'en ai bavé." Mais dans l'ensemble, tout se passe bien. Voire très bien. "Je suis en avance sur mon planning de rééducation. Je vais pouvoir reprendre la course en décembre. Et tout cela désormais avec zéro douleur. Donc oui, tout va bien !"
Défier l'ogre
Le premier test en 2024 pour Dimitri ? En mai. Avec les Mondiaux de para athlétisme. À Kobe. Au Japon. "J'espère être prêt pour ce rendez-vous. Je vais me tester avant. Si je ne franchis pas 7 mètres 10 à l'entraînement, une référence pour moi, je n'irai pas. Je continuerai alors à me préparer à Toulouse pour Paris 2024." Bonne nouvelle : le Réunionnais a d'ores et déjà son billet pour les prochains Jeux Paralympiques. "J'ai réalisé la performance requise en début d'année. Si je ne peux pas ressauter avant Paris, la Fédération a le droit de demander une invitation en raison de ma blessure et de ma médaille d'argent à Tokyo."
Une chose est sûre : sur la piste du Stade de France, Dimitri Pavadé sera un athlète en or qui vise… l'argent. Car dans l'épreuve du saut en longueur catégorie T64, il y a Markus et les autres. Markus Rehm, médaille d'or des trois derniers Jeux Paralympiques. "Déjà, il est très grand. Plus d'un mètre quatre-vingt. Alors que je ne mesure qu'un mètre cinquante-neuf ! Son gabarit l'aide énormément." Avec un record du monde à 8 mètres 72, Markus semble juste intouchable. "Attention, dans un concours, tout peut arriver. Mais bon, Markus sait sauter. Récemment en glissant sur la planche, il a réussi à faire 8 mètres, c'est dire !"
⇒ Réentendre Dimitri Pavadé, invité du podcast #MaParole en 2022 : ICI !