Ne lui dites pas qu'il est un jazzman. Arnaud Dolmen le clame : il est avant tout un musicien. Dans toute l'acception du terme. Ouvert à toutes les musiques, à tous les rythmes, que cela passe par la case batterie, qu'il pratique depuis très jeune, ou par la case composition. De sa Guadeloupe natale, le jeune Dolmen a acquis une passion révérencieuse pour les rythmes de batterie qu'automatiquement il décelait dans tous les morceaux qui passaient sous son oreille, a fortiori dans les titres de zouk où ceux-ci sont immanquables. Dans le zouk mais pas que...
Son opus précédent Tonbé Lévé était fortement imprégné de Guadeloupe. Dans son deuxième album, Adjusting, au détour de plusieurs titres, on peut entendre de ci-de là, les hommages adressés aux aînés, à ceux qui jouent des instruments traditionnels comme le gwo ka ou à ceux qui avant lui - et avec beaucoup moins de reconnaissance - ont étrenné les formules jazz + sons caribéens : Alain Jean-Marie ou avant lui Al Lirvat, Émilien Antile ou Robert Mavounzy. Un titre leur est d'ailleurs spécialement dédié, celui qui conclue l'album, Les oubliés avec en prime, une ligne de bouladjel (percussion vocale typique de la Guadeloupe qui résonnait en particulier lors des veillées mortuaires).
Une batterie d'influences
Et si la Guadeloupe est toujours présente dans cet album, si l'ADN d'Arnaud Dolmen pourrait être prélevée dans presque tous les titres, il n'en demeure pas moins que pour le musicien c'est l'heure des ajustements (traduction du titre de l'album). Tout le monde évolue, dit-il en substance, et lui y compris. C'est le moment de faire syncrétisme de toutes ces influences glanées de la Guadeloupe à Paris où il vit désormais, de toutes les rencontres d'autres musiciens du monde entier faites au cours de ses quinze années de parcours musical professionnel. ajustement et appropriation et fusion de couleurs musicales : c'est d'ailleurs le terme qu'il aime employer pour parler des différentes strates de fabrication de ses morceaux de musique.
Des couleurs ajustées
Pour Arnaud Dolmen, les voix, les instruments, les musiciens sont autant de couleurs qui s'assemblent, se superposent, au moment de la composition et de l'interprétation, pour délivrer au final un LP aux ambiances riches et variées, pas exempt de réflexions. Comme ce titre Cavernet (dont un extrait est à entendre dans ce podcast de l'Oreille et hardie) qui évoque à la fois le monde virtuel dans lequel nous évoluons immanquablement aujourd'hui et à la fois l'allégorie de la caverne de Platon (au fond de la grotte, nous percevons les ombres qui nous parviennent comme la vérité sans penser que ces ombres puissent être le reflet d'une autre réalité...)
Écoutez "l'Oreille est hardie"...
...Pour découvrir encore un peu plus Arnaud Dolmen, un musicien fort attachant, pour entendre quelques échos de son album Adjusting très réussi et la façon dont il a été conçu - et inutile de s'y connaître en jazz, je vous l'assure !- et pour entendre ce grand du jazz en devenir (?) parler avec passion et conviction de son amour et son attachement à la Guadeloupe.
Retrouvez Arnaud Dolmen, dans l'Oreille est hardie, c'est par ICI