On pourrait presque entendre dans le titre de son spectacle M comme Médée, comme une injonction à l’amour : "Aime comme Médée"! Astrid Bayiha l’avoue à demi-mot, ce petit jeu sur les mots n’est pas si loin de l’intention de son projet : parler d’amour. Le mythe de Médée, c’est celui d’une femme passionnée qui sacrifie beaucoup de gens et beaucoup de choses par amour pour un homme : Jason.
Une création efficace et subtile, des partis pris de mise en scène, un casting aux talents et origines multiples : Astrid Bayiha revient dans L’Oreille est hardie, sur son M comme Médée qui a enchanté les publics de Fort-de-France (en attendant les autres publics ). Écoutez :
Médée, une première
Des représentations devant des classes et une grande soirée à Tropiques Atrium, l’un des lieux culturels de Fort de France, en Martinique et à chaque fois une ovation : il n’en fallait pas moins pour booster la confiance d’Astrid Bayiha ou tout au moins lui faire sentir que son pari, vieux de plusieurs années, est en bonne voie de réussir.
Ce personnage de Médée et cette adaptation de la tragédie grecque, elle l’a portée sur les fonds baptismaux avec une détermination que l’on sent dans sa voix - malgré la fatigue du matin où nous la rencontrons, au lendemain de la grande première à Tropiques Atrium.
Amour sous les Tropiques… Atrium
Lieu de résidence pendant trois semaines avec l’ensemble de l’équipe réunie pour le projet - composée de techniciens du cru et de comédiens de Martinique et d’ailleurs -, Tropiques Atrium à rencontré Astrid Bayiha en 2015 pour le spectacle Suzanne Césaire, Fontaine Solaire. Depuis, la jeune femme vient régulièrement rendre visite à l’Atrium et à la Martinique, jusqu’à entrer en co-production puis en création avec ce M comme Médée qu’elle porte sur ses solides épaules.
Médée multi-linguiste
Un casting d’artistes sur scène, les uns issus de Madinina (nom Caraïbe de la Martinique) comme Nelson-Rafaell Madel, Jann Beaudry ou Daniély Francisque, les autres (Fernanda Barth, Valentin de Carbonnières, Josué Ndofusu, Swala Emati) partageant des origines européennes ou africaines. Un mélange d’origines incontrôlées qui a pour ce projet son importance : Astrid Bayiha n’aime rien tant que de profiter de ces facilités de langages multiples et variés pour enrichir son spectacle.
Quatre comédiennes pour Médée
Quatre comédiennes se partagent le rôle de Médée comme pour montrer à chaque fois une facette différente de ce personnage trouble, si ce n’est troublé. Deux autres comédiens se relaient pour faire parler Jason. Un troisième personnage, élaboré par Astrid Bayiha, fait le lien entre Médée et Jason. Ce qui donne, de bout en bout, une belle choralité à l’ensemble aussi bien dans les dialogues entre les uns et les autres que dans l’exécution des parties chantées.
Une belle partition
M comme Médée donne à entendre des chants en créole, créés pour l’occasion ou extraits du patrimoine martiniquais, des chants en portugais ou en kényan, qui se marient formidablement bien à l'ensemble, portés par les voix des interprètes sur scène.
A l'arrivée, beaucoup d’engagements chez les acteurs qui exécutent leur partition en harmonie. Spectacle très réussi tant par le jeu que par la mise en scène notamment parce qu’il donne à voir et à écouter autre chose que ce que l’on sait de Médée - notamment la femme prête à commettre l’infanticide pour exercer sa vengeance contre Jason.
Écoutez L’Oreille est hardie…
Et faites plus ample connaissance avec Astrid Bayiha. L’autrice et metteuse en scène va faire voyager sa Médée au-delà des frontières et cherche à relier tous ses tropismes : Hexagone, Outre-mer et Afrique (elle est originaire du Cameroun) pour relier les hommes et les territoires par des ponts artistiques. Après l’avoir rencontrée et vu ce qu’elle sait faire sur scène, "Aime comme Astrid !" serait-on tenté de dire comme un mantra qu’elle applique à la lettre…
Retrouvez la dramaturge et metteuse en scène Astrid Bayiha dans L'Oreille est hardie, c'est par ICI !
Ou par là :
"M comme Médée" d'Astrid Bayiha a été créé le 04 février 2023 à Tropiques Atrium, en Martinique et se jouera à Paris au mois de novembre prochain.