PODCAST. Guillaume Robillard : existe-t-il un cinéma antillais ?

"Conquête de l'espace et du temps - le cinéma antillais" de Guillaume Robillard
En plein Festival de Cannes, parlons cinéma des Outre-mer avec Guillaume Robillard qui publie "Conquête de l’espace et du temps - Le cinéma antillais" (éditions Jannink). Il y évoque les thématiques abordées dans près de 70 films que compte la production martiniquaise et guadeloupéenne. Une sorte d’anthologie, d’étude et de remise en perspective... Échanges très imagés dans "L’Oreille est hardie".

Le Festival de Cannes a ouvert ses portes cette semaine avec ses films en compétition et ses horizons ouverts sur les productions cinématographiques du monde entier. Au même titre qu’il existe un cinéma japonais, américain ou africain, existe-t-il, au cœur de la production française, un cinéma des Outre-mer qui aurait ses particularismes ? En l’occurrence, Guillaume Robillard s’est intéressé au cinéma antillais dans un livre intitulé Conquête de l’espace et du temps - le cinéma antillais, écrit en grande partie à partir de sa thèse d’étude du cinéma. 

Celui-ci, né et a grandi en Guadeloupe, enseigne désormais le cinéma à l’Université Paris 1 et se rêvait depuis toujours réalisateur. Et s’est posé cette question : y a-t-il un cinéma antillais et si oui, à quelles conditions existe-t-il ? 

Guillaume Robillard, spécialiste du cinéma antillais

Depuis une cinquantaine d’années, il y a bien eu des réalisateurs antillais et des dizaines de films portant des thématiques liées aux Antilles, qui ont fait leur chemin jusque dans les salles de cinéma. Pour autant, peut-on, doit-on parler avec le cinéma antillais, d’un genre, d’un type de cinéma à part entière ? C’est tout l’objet de cet échange avec Guillaume Robillard, à suivre dans L’Oreille est hardie

Le cinéma antillais n’existe pas

Une affirmation ? Pas vraiment. Plutôt un peu de provocation émise par Guillaume Robillard en introduction de son livre. Surtout pour dire une réalité : si cinéma antillais il y a, il n’est pas autonome, ni en état d’auto-suffisance. En termes de production et de financement, il dépend de l’organisation même du cinéma français et en regard de cela, la catégorie "cinéma antillais" n’est pas viable. 

"Conquête du temps et de l'espace - Le cinéma antillais" (éditions Jannink - collection "Hypothèses d'art")

Cinéma-thèmes 

En revanche et beaucoup plus évidente, est l’existence de particularismes propres aux films venus de Martinique et de Guadeloupe - les deux champs d’études retenus par Guillaume Robillard. Avec un corpus de près de soixante-dix films, il lui a été facile de retenir une série de thématiques (liées au temps et à l’espace) et de personnages récurrents, dans ces productions.

Espace et temps 

À remarquer d’abord, l’investissement des décors naturels mais si possible loin des clichés. Dans les productions made in Antilles, on laisse la plage au profit des mornes, des champs de cannes, des rivières et des campagnes. Et l’on aborde très souvent, beaucoup, directement et indirectement, l’Histoire - en particulier bien sûr la période de l’esclavage ou celle des colonies, comme pour panser film après film, des plaies béantes.

Guillaume Robillard, docteur en cinéma et réalisateur

Figures cinématographiques antillaises

Et puis Guillaume obillard d’égrener dans son livre, toute une série de personnages, disons de figures-type incontournables dans ce cinéma antillais : le conteur, le neg’marron, le quimboiseur ou encore la femme-potomitan" ou femme doubout’

Guillaume Robillard souligne combien ces caractères, évoqués directement ou figures davantage dissimulées, sont présents et aident ce cinéma ultramarin à se forger une identité.

Une forêt de films derrière l’arbre Rue-Cases-Nègres 

Et quels films font ce cinéma ? On ne peut pas citer les soixante-dix évoqués par Guillaume Robillard. Mais cela va du premier long-métrage péyi recensé, Dérives ou la femme jardin de Jean-Paul Césaire (1977) ou le premier exploité en salles Coco Lafleur, candidat de Christian Lara (1979), et passe par Le sang du flamboyant de François Migeat (1981) et l’incontournable Rue Cases-Nègres d’Euzhan Palcy (1983) jusqu’à, plus près de nous, des films comme Nèg'Marron de Jean-Claude Barny (2005) ou 30°Couleur de Lucien Jean-Baptiste (2012).

"Rue Cases-Nègres" d'Euzhan Palcy (1983)

Guillaume Robillard explique les particularités de certains d’entre eux qui permettent de mettre en avant des éléments distinctifs sce que l’on pourrait donc appeler un cinéma antillais en bonne et due forme. Sachez au passage qu’a ce compte, c’est Christian Lara qui détient le record du nombre de films réalisés avec au compteur, vingt-cinq films (!)…

Écoutez L’Oreille est hardie...

Et rencontrez ce cinema et ces films- pas toujours accessibles : beaucoup d’entre eux ne sont pas conservés même s’il faut saluer des tentatives en Martinique et en Guadeloupe pour (re)trouver des copies et alimenter la mémoire de ce cinéma. 

Écoutez Guillaume Robillard parler de son travail d’analyse d’un cinéma qui malgré ce qui a été déjà réalisé, est encore loin d’être à son apogée. 

Le cinéma antillais et Guillaume Robillard dans L’Oreille est hardie, c’est par ICI !

Ou par là :

"Conquête de l’espace et du temps - le cinéma antillais" de Guillaume Robillard est paru aux éditions Jannink, collection Hypothèses d’art.