Violences policières, violences contre les policiers, délit de faciès, préjugés… Autant de mots et de faits qui se retrouvent parfois à la Une de l’actualité en France. Et il arrive que les originaires des Outre-mer y soient au cœur soit du côté des forces de l’ordre, soit de l’autre. Dans ce type d’affrontements, il n’y a pas les gentils contre les méchants, les Blancs contre ceux qui ont la peau noire ou basanée. La pièce écrite et mise en scène par Bryan Polach jouée récemment au Théâtre Paris-Villette le montre bien.
Elle s’intitule 78-2, du nom de l’article du Code pénal qui autorise les policiers à effectuer des contrôles d’identité s’ils le jugent nécessaire. Elle met en scène quatre comédiens et des échanges parfois très vifs faits de clichés, de violences, d’incompréhensions, d’intolérances mais aussi de rapprochements des points de vue et d’humanité tout simplement. Tout cela sur fond de relations tendues entre police et population.
Pour nous en parler, dans L’Oreille est hardie, le metteur en scène Bryan Polach et l’un des comédiens, d’origine guadeloupéenne, Laurent Evuort-Orlandi :
Des personnages aux parcours différents
Dans la première idée de l’auteur et metteur en scène, Bryan Polach, 78-2 était au départ une histoire d’amour : qu’est-ce qu’un.e policier.ère et quelqu’un.e issu.e de milieu populaire ont à vivre ensemble et ont à se dire ? À partir de cet argument, le fil narratif se tisse et quatre personnages se mettent en place. Au cours d’une soirée, trois amis sont approchés par une jeune femme qui a l’air de s’intéresser plus particulièrement à l’un d’entre eux, Thomas, ancien policier qui se remet d’une agression. Pourquoi ? On l’apprendra vers le dénouement de l’histoire.
Une "enquête" de terrain
S’ensuivent entre les personnages des échanges parfois vifs autour des relations entre la police et la population, avec toujours ce souci de montrer à travers les dialogues que rien n’est simple, ni manichéen. Avant de monter le spectacle, Bryan Polach a emmené ses comédiens dont Laurent Evuort-Orlandi à la rencontre de policiers et d’éducateurs mais aussi de personnes victimes de violences policières pour entendre, écouter les points de vue, les logiques différentes qui se confrontent souvent au niveau des idées et des préjugés et qui s’affrontent parfois dans les rues lors de manifestations ou d’embrasements de quartiers.
Mettre de soi
Ajoutés à cela, le travail d’improvisation des comédiens qui ont mis beaucoup d’eux-mêmes dans leurs personnages. Tout d’abord, une énergie totale pour tenir la cadence de la pièce au rythme incessamment soutenu. Et puis beaucoup de spontanéité, dès le processus de création. Pour le comédien d’origine guadeloupéenne Laurent Evuort-Orlandi, plusieurs de ses impros autour de la condition de l’homme noir qu’il est, se retrouvent dans ses répliques.
Au delà des clichés
Lui qui vient de Tarbes, dans les Pyrénées s’est souvent fait coller à la peau le cliché du "Noir de banlieue" qu’il n’a jamais été. De même, l’un des personnages se retrouve à expliquer la réalité parfois compliquée des policiers avec des difficultés telles que le taux de suicide est important dans la profession… Un tiraillement des points de vue qui écartèle le spectateur et le plonge intelligemment dans des réflexions loin d’être à sens unique.
Écoutez L’Oreille est hardie…
Et faites connaissance avec Laurent Evuort-Orlandi qui raconte cette nouvelle collaboration avec le metteur en scène Bryan Polach. Écoutez aussi ce dernier évoquer comment, selon lui, la colonisation a engendré le type de rapports compliqués entre les policiers et une partie de la population et comment les réflexions autour de ces questions alimentent en partie sa pièce 78-2.
Pour retrouver Laurent Evuort-Orlandi et Bryan Polach dans L’Oreille est hardie, c’est par ICI :
Ou par là :
La pièce "78-2" de Bryan Polach s’est jouée en janvier 2023 au Théâtre Paris-Villette et sera en tournée au cours des prochains mois.