"Un doublé Coupe d’Europe / Championnat serait énorme pour notre groupe" explique le rugbyman calédonien Peato Mauvaka

Le groupe Toulousain décompresse sur la plage de Leucate, Peato allongé en tee shirt bleu

Cinq jours après, le talonneur calédonien du Stade Toulousain, formé à Dumbéa, revient sur les côtés secrets de sa finale de samedi, qu’il a vécu de façon douloureuse. Dans un entretien sans ambages, Peato nous décrypte certains secrets de sa réussite et de la vie du groupe Toulousain.

Outre mer la 1ère : Peato, cette finale contre la Rochelle a été un gros combat dont vous avez longtemps porté les stigmates pendant quelques jours ?

Peato Mauvaka : C’était dur, très dur. En début de première mi-temps (12ème minute), je prends un choc sous l’œil droit dans un contact avec Elstadt et Atonio, c’est la pire douleur que j’ai ressenti sur le moment. Je ne voyais plus rien. Ce n’était pas un match de beau rugby mais une finale. Quand il y a du combat c’est bien, quand il y a beaucoup  d’essais aussi, l’essentiel est surtout d’avoir la victoire au bout. Nous, on s’est adaptés à ce que la Rochelle nous proposait. Il fallait répondre présent et baisser la tête.

Outre mer la 1ère : Comment avez-vous abordé cette finale au niveau de la concentration car vous avez su assez tôt que vous alliez être titulaire du fait de la suspension de Julien Marchand ?

Peato Mauvaka : Ce n’est pas pareil que la finale de 2019 (Toulouse Clermont en top 14), j’étais plus concentré sur celle-ci car d’habitude je fais un peu le clown. Mais j’ai essayé de me préparer comme d’habitude. Je suis allé chez Abraham Tolofua, on se voit souvent j’y vais plusieurs fois par semaine. Pouvoir être avec la famille, manger ensemble ou jouer aux cartes, sortir un peu du rugby, ça fait du bien.

Les bras posés sur ses deux pilliers, Peato emmène son paquet au combat face à Victor Vito, duel du Pacifique

 

Le jour du match, ce qui changeait  c’est qu’on entendait enfin des supporters. Quand on joue dans un stade vide on entend les coaches de l’autre côté du terrain, là il y avait du bruit, on ne les entendait plus et c’était bien.

Peato Mauvaka, talonneur Stade Toulousain

 

Outre mer la 1ère : Sur le match on vous a souvent vu dans le jeu avec vos départs dans l’axe (notamment sur l’occasion d’essai de Kolbe). C’est un secret fait maison ?

Peato Mauvaka : Je le fais souvent depuis que je joue en espoirs, mais quand j’ai commencé en top 14 je le faisais moins, je voulais faire les choses bien et pas tenter le truc de trop. Désormais quand j’ai une montée d’adrénaline je le fais car je sais toujours qu’ Antoine (Dupont) est derrière moi. En moins de 20 ans je l’avais fait une fois, et Toto était derrière moi. Quand je le fais, il est toujours là, il me connaît bien. On est ensemble depuis les équipes de jeunes au Stade, à chaque action il est toujours au soutien. Et puis quand Selevasio (Tolofua)  donne la balle d’essai à Mallia à l’heure de jeu, je coupe ma course sur Romain N’Tamack, et il en profite pour faire une passe sautée, et Sele était là au bon endroit aussi.

Outre mer la 1ère : Après le coup de sifflet final en avez-vous profité ?

Peato Mauvaka : Non, rien. Je n’ai même pas bu une goutte de champagne. Avec l’adrénaline du match j’ai tenu, j’ai serré les dents tout le match mais dès que je suis rentré dans les vestiaires, l’adrénaline est tombée et j’avais tellement mal à l’œil, je n’ai rien pu faire. J’ai essayé de dormir un peu dans le bus et dans l’avion, j’ai mis mon casque avec un petit film cool, Baby Sitting 2, je voulais être avec les gars mais j’étais tout seul.

L'oeil droit tuméfié, mais la médaille autour du cou


Dès que je suis arrivé à Toulouse j’avais à peine la force d’ouvrir l’œil, ça n’allait toujours pas mais il y avait nos femmes, nos enfants et là j’ai fait l’effort de boire un peu de bière avec la famille et les amis. Depuis ma blessure ça va, je n’ai pas de fissure, j’ai vu le docteur et fait un check médical complet mardi, il n’y a rien de grave. Ça juste été un choc sur le moment.

Outre mer la 1ère : Avez-vous pensé au Caillou pendant cette finale ?

Peato Mauvaka : J’ai pensé uniquement à mon père, Soane Patita, je n’ai pensé qu’à lui. C’est ma force, il me porte. Je fais une prière tout seul avant le match, ça me donne de l’énergie. Je pense à lui avant et après les matchs. Mais il est tout le temps là.
J’ai bien reçu quelques messages de Nouméa mais pas trop, et j’ai décroché mon téléphone que ce mercredi pour vous appeler.

Outre mer la 1ère : La suite immédiate c’est quoi ? Toulouse en mode glouton ?

Peato Mauvaka : Déjà on rebascule en top 14 avec Clermont dimanche, il ne faut pas rater ce match pour nous assurer une place en demi-finale, on verra aussi les résultats des autres. On est tous concernés, Selevasio pète la forme, Rodrigue (Neti) va démarrer les matches et va finir la saison avec Cyril Baille vu que Clément Castets est blessé. Paulo (Tafili) est bien il a fait des bons matches ces dernières semaines quand on faisait tourner, j’espère qu’on pourra jouer tous les quatre ensemble la finale.

 

Peato Mauvaka (ballon en main) est membre du Stade Toulousain depuis 2012.

 

On n’a jamais vécu cette situation, faire le doublé Coupe d’Europe et Top 14, ce serait énorme et c’est sûr qu’on y pense.

Peato Mauvaka, talonneur Stade Toulousain

 

Outre mer la 1ère : Qu’est ce qui fait la force du groupe ? Vous fonctionnez en mode Pacifique avec un code bien établi ?

Peato Mauvaka : Oui tout à fait. Joe Tekori c’est le boss, c’est une force de la nature, il est impressionnant, on est chanceux de l’avoir. On le suivrait jusqu’au bout du monde. Avec Jérôme Kaino ils sont différents, lui va parler avant un match, c‘est le patron sportif, il ne parle pas beaucoup mais chaque mot qu’il dit tu le respectes. Jo c'est l’organisateur dans la vie du groupe. Ils ne font pas de différence entre les jeunes et les anciens. Charly (Faumuina) aussi, c’est le troisième pilier du groupe. Tous les trois sont du Pacifique, ce sont nos anciens qu’on respecte, on a réussi à faire cette connexion de famille entre nous. Chaque jour on a hâte de se revoir le lendemain. On a créé ces liens depuis 2019, quand on a été champions de France.

 

Le Calédonien savoure le premier trophée européen de sa carrière


Après la finale, on a surtout profité de la journée de lundi avec une escapade à Leucate, tous ensembles. Ce mardi, on a fait un entraînement très light. Mais lundi on était entre nous, c’est une belle journée chez Ginette. C’est important pour nous d’avoir ces moments. C’est trop beau à vivre.

 

On ne vient pas au club pour s’entraîner et repartir, on profite tous les jours les uns des autres. On prend du plaisir à être ensemble, se retrouver, ce n’est pas qu’un travail. On est des frères au Stade Toulousain.

Peato Mauvaka, talonneur Stade Toulousain

 

Outre mer la 1ère : l’avenir de Peato Mauvaka sera fait de quoi ?

Peato Mauvaka : Je suis en contrat jusqu’ en 2023, on verra après. Pour l’instant je ne me pose pas la question. La seule chose est que j’aimerai bien rentrer en Nouvelle Calédonie après le championnat, mais ça risque d‘être juste avec les protocoles sanitaires. J’ai eu le Covid et je suis immunisé, je fais ma deuxième vaccination le mois prochain. Mais le Caillou me manque.

(NDLR Peato Mauvaka pourrait aussi être sélectionné pour la tournée en Australie en Juillet)