Procès Merah: le témoignage bouleversant du militaire guadeloupéen Loïc Liber

Dans la chambre d'hôpital de Loïc Liber, les photos de sa vie d'avant le 15 mars 2012 et la carte de la Guadeloupe
Tétraplégique et sous assistance respiratoire, le soldat guadeloupéen, rescapé de l'attentat de Montauban le 15 mars 2011, a témoigné ce mercredi par visio-conférence depuis sa chambre d'hôpital au procès Merah. 
Loïc Liber, très grièvement blessé à Montauban le 15 mars 2012, a pris la parole ce mercredi après-midi devant la Cour d'assises spéciale qui juge les complices présumés de Merah. Le militaire guadeloupéen s'est exprimé par visio-conférence depuis sa chambre d'hôpital de l'institution nationale des Invalides. Son père est resté à ses côtés, alors que sa mère était présente au tribunal.  

"Tout s'est passé très rapidement"

Aujourd'hui âgé de 33 ans, le militaire du 17ème RGP de Montauban avait 27 ans au moment des faits. Loïc Liber a d'abord indiqué à la Cour les raisons de son absence au tribunal.

Je ne respire plus seul, j’ai un stimulateur. Je vais parler doucement afin de ne pas perdre mon souffle. Je ne peux être présent en raison de mon handicap


Le militaire indique ensuite ne pas avoir de souvenirs précis du 15 mars 2012 où sa vie a basculé. "Tout s’est passé très rapidement. Nous sommes sortis devant le régiment pour retirer de l’argent au distributeur. C’est à partir de ce moment que je ne me souviens plus de rien."

"Ma vie est devenue un combat chaque jour" 

A son réveil, Loïc Liber a le sentiment d'avoir fait un cauchemar mais, indique t-il, "j’ai vu Monsieur Sarkozy, qui était président de la République à l'époque. J'ai compris que cela était bien réel."

Le militaire explique alors à quoi ressemble sa vie désormais. "Cela fait 5 ans que j’ai perdu mon indépendance. Que je vis caché. Que je suis éloigné de ma famille, mes amis, mon île. Je ne peux me déplacer, ni même me présenter face à la cour pour dire tout cela. Avant les faits, j’étais une personne active, autonome avec une incroyable joie de vivre. J'étais impliqué dans la vie de mon pays. Le fait de ne plus pouvoir marcher m’est insupportable. Je vis malheureux d’être dans cet état."

"Le présent m’est insupportable et mon futur trop incertain"

Loïc Liber sait que ce procès ne va pas changer le cours de sa vie. "Il ne me rendra pas mon corps, ma vie, ni celles de mes parents mais je serai plus serein en me disant que justice aura été faite et que les crimes dans notre pays ne restent pas impunis. Mes souvenirs me permettent de rester en vie, car le présent m’est insupportable et mon futur trop incertain. Mon seul souhait et de pouvoir un jour sortir de l’hôpital et d’avoir un peu d’autonomie en construisant mon chez moi. Cela a eu une répercussion sur le plan physique et psychologique : je suis tout simplement traumatisé." 

Je n’ai pas de doute quant à la culpabilité des deux accusés, je n’ai pas envie de les nommer, je ne veux pas leur donner d'importance, de la valeur".


Sa maman très fière de lui

Emilienne, la maman de Loïc Liber, au tribunal de Paris

Alors que le père de Loïc Liber est resté auprès de son fils à l'hôpital de l'institution nationale des Invalides, Emilienne, sa mère, était pour sa part au tribunal. Elle a confié sa fierté de le voir son fils témoigner. "Ca m'a fait chaud au coeur, ce matin, il n'avait pas le moral. Il m'a dit qu'il voulait témoigner pour ses amis (les deux parachutistes de Montauban, Abel Chennouf, 25 ans, et Mohamed Legouad, 23 ans) et les petits enfants. Ils parlent toujours des petits enfants qui sont morts." Le 19 mars, Merah assassine dans une école juive toulousaine Arié et Gabriel, cinq et trois ans, et Myriam Monsonego, huit ans.

Compte rendu d'audience avec Kelly Pujar: 
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