Réchauffement : la réduction actuelle des émissions de CO2 ne suffit pas, il faut notamment reboiser l’Amazonie

Les émissions de gaz à effet de serre ont été réduites grâce au confinement provoqué par la pandémie de covid-19. Mais cette baisse ne suffira pas à stopper le réchauffement climatique. C’est ce qu’ont dit, mercredi 22 avril, les climatologues lors de la journée de la Terre.
Les experts de l’OMM (l’Organisation Mondiale de la Météorologie) ont douché les espoirs de réduction du réchauffement climatique. Mercredi 22 avril, journée mondiale de la Terre, ils ont été clairs : certes le confinement lié au covid-19 a réduit de 6% les émissions annuelles de CO2. Mais cela ne suffit pas. Cela ne permet même pas de se remettre sur la voie des objectifs de l’accord de Paris de 2015 (limiter le réchauffement de l’ère industrielle à 1,5°C). Il aurait fallu une baisse de 7%. D’autant que l’agence de l’ONU craint même pour la suite une croissance des émissions. Au-delà de leur niveau d’avant la crise sanitaire.

La lutte contre le réchauffement ne doit donc surtout pas faiblir et devrait même s’accroitre. Notamment pour limiter les émissions et pour absorber le CO2 déjà relâché. Ce dernier rôle d’absorption est rempli, entre autres, par les océans et les forêts.
 

Reboiser la forêt amazonienne

Du coup des tentatives de reboisements visent à remplacer les forêts détruites par l’urbanisation et l’exploitation économique. En particulier, la forêt amazonienne. Ce rempart majeur contre un  réchauffement brutal a perdu un cinquième de sa surface, au Brésil, depuis 1970 (environ 1,5 fois la superficie de la France hexagonale).

De nombreux programmes se sont attelés à la tâche pharaonique de replanter une forêt qui est toujours la cible, en parallèle, de déboisements massifs. Notamment depuis l’arrivée au pouvoir du président Jaïr Bolsonaro. Ainsi l’organisation Projeto Plantar a planté un million d’arbres d’espèces locales sur mille hectares de terres fragiles de l’Etat de Rondônia. Selon Felipe Sbrissa, son ingénieur forestier, ce n’est pas fini :
 

L'objectif est de produire 2 millions de plants supplémentaires pour desservir plus de 1 500 hectares et plus d'un millier d'exploitations familiales. 


Soutenir une agriculture durable

Rioterra est une autre organisation qui a reboisé des centaines d’hectares durant la dernière décennie. Comme Projeto Plantar, en même temps, elle soutient et forme les paysans amazoniens à l’agriculture durable via notamment les semences, et les pousse à planter des arbres originaires de la forêt tropicale : Ailson Guerra, agriculteur, a ainsi appris à exploiter intelligemment la terre sèche qu'il avait acquise, grâce à la culture de la banane et du café :
 

Il y avait de l'herbe, mais il n'y avait aucun moyen de survivre. Ce n’est plus le cas maintenant. Maintenant, nous reboisons. Maintenant, nous plantons. En plus de cela, nos cultures sont toutes productives - certaines à une date ultérieure mais d'autres produisent déjà, et nous tirons notre subsistance de cette propriété.


Des perspectives prometteuses

La reforestation permet aussi une exploitation durable du bois. Un secteur prometteur à divers titres, selon Alexis Bastos, coordinateur de projet pour le centre d’études de Rioterra :

Avec la mise en œuvre du code forestier et le besoin des chaînes d'approvisionnement en bois, ce marché devient extrêmement intéressant et pourrait devenir une alternative économique pour l'Amazonie. Elle est très précieuse  et  combat, en même temps, la déforestation légale, génère des emplois et des revenus pour la population, et contribue à lutter contre ce problème du changement climatique.


Ces impacts climatique mais aussi et surtout économique positifs pourraient contribuer à faire pencher la balance en faveur de ces associations qui tentent difficilement de reboiser. Pour l’instant, elles se heurtent à l’hostilité des autorités de Brasilia. Et la déforestation ne cesse de s’accélérer. En outre, l’an dernier, les incendies ont aussi porté un rude coup à la forêt amazonienne.
 

Risque de catastrophe climatique et environnementale

Mais les scientifiques tirent la sonnette d’alarme. Outre la protection de la forêt existante, ils insistent sur un nécessaire reboisement massif, seul à même de sauver la forêt amazonienne. Le climatologue brésilien, Carlos Nobre, a confié à l’agence Reuters qu’il fallait replanter 200 000 km2. Le coût de cet effort oscillerait entre 27 et 38 milliards d’euros. A noter qu’avant l’arrivée du gouvernement Bolsonaro, le Brésil envisageait de reboiser 120 000 km2 d’ici 2030.

Car si la déforestation se poursuit et si un dixième de la forêt tropicale restante disparait, un basculement est probable. La forêt dépérirait inéluctablement et se transformerait en savane. 200 milliards de tonnes de gaz à effet de serre seraient libérées. Une véritable catastrophe climatique et environnementale. Clairement, au vu des enjeux et des sommes évoqués, la balle n’est pas seulement dans le camp des associatifs et des scientifiques, mais dans celui des politiques.