Ce projet renforce considérablement les pouvoirs du chef de l'Etat. Il lui permet de se présenter pour un deuxième mandat consécutif de cinq ans alors que l'actuelle Constitution, qui a permis de ramener un peu de stabilité dans un pays secoué par une longue série de crises séparatistes et de coups d'Etat, l'interdit.
Le texte supprime aussi les postes de vice-présidents et la Cour constitutionnelle, la plus haute instance judiciaire de l'archipel. Enfin, il fait de l'islam la "religion d'Etat", dans ce pays où l'écrasante majorité de la population pratique un islam modéré.
Un vote avec près de deux heures de retard
Les opérations de vote ont débuté lundi avec près de deux heures de retard dans la capitale Moroni, en l'absence de matériel électoral à l'heure théorique de l'ouverture des bureaux de vote à 7h (4h, heure de Paris)."C'est important de voter, c'est tout. C'est mon devoir", a expliqué Hassane Bounou, un des rares électeurs rencontrés par l'AFP.
En tout début de matinée, de nombreux bureaux de vote de la capitale étaient quasiment vides, ont constaté des journalistes de l'AFP. Le référendum, dont l'issue fait peu de doute en raison du boycott de l'opposition, se déroule sous haute tension. Lundi 30 juillet, les urnes en plastique ont été saccagées dans deux bureaux de vote situés dans une école du quartier de Hankounou à Moroni.
L'opposition a jugé le scrutin "illégal", refusé de participer à la campagne et appelé les électeurs à ne pas se déplacer. "Le président Azali veut se tailler une Constitution sur mesure qui lui permet de faire ce que bon lui semble", a jugé le secrétaire général du parti Juwa (opposition), Ahmed el-Barwane.
"Il y a deux politiques, deux voies", a estimé de son côté le secrétaire général du parti présidentiel Renouveau des Comores (CRC), Yahaya Mohamed Illiase. "Celle de la construction prônée par le président Azali, ou celle de la destruction".
"Un climat délétère"
Si le "oui" l'emporte, le président Azali Assoumani, élu de justesse en 2016, compte organiser dès 2019 une élection présidentielle anticipée, ce qui lui permettrait de rester au pouvoir jusqu'à au moins 2024. Il a déjà occupé la fonction suprême de 1999 à 2006 à la suite d'un putsch, avant de céder démocratiquement le pouvoir.
L'organisation du référendum a accentué les tensions dans cet archipel pauvre de moins de 800.000 habitants, où l'opposition dénonce depuis des mois les "dérives autoritaires" du président. Des opposants ont été arrêtés, des manifestations réprimées, l'ancien chef de l'Etat Ahmed Abdallah Sambi assigné à résidence et la Cour constitutionnelle suspendue.
"La stratégie de verrouillage de l'espace démocratique initiée par le pouvoir s'amplifie", se sont récemment inquiétées des organisations de la société civile dans un communiqué conjoint. "Ce climat délétère, le peu d'enthousiasme du scrutin, ajoutés au fait que l'opposition et les organisations de la société civile ne seront pas présentes dans les structures électorales, font planer une grande incertitude sur l'issue et la transparence de ce référendum", ont-elles mis en garde.
"La situation peut déraper à tout moment", a prévenu un responsable des questions sécuritaires, sous couvert de l'anonymat.
Signe des tensions dans l'archipel, l'un des vice-présidents, Abdou Moustoidrane, a été victime il y a une semaine d'une tentative d'assassinat. Sa voiture a essuyé plusieurs rafales d'arme automatique, il s'en est miraculeusement sorti indemne.
Les bureaux de vote doivent fermer lundi à 16h (13h, heure de Paris). Des petits avions ont été affrétés pour acheminer, une fois le vote terminé, les urnes des îles dans la capitale Moroni. Les résultats pourraient être connus dès la nuit de lundi 30 juillet à mardi 31 juillet.