Référendum sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie: des sénateurs proposent des alternatives

Pierre Frogier, sénateur de Nouvelle-Calédonie.

Des sénateurs ont exposé mardi leurs propositions alternatives à un divorce entre la Nouvelle-Calédonie et la France, qui sera l'enjeu d'un troisième référendum sur l'indépendance de ce territoire, prévu d'ici octobre 2022. L'initiative portée par le sénateur LR Pierre Frogier a lancé le débat. 
 

A Paris, les sénateurs ont débattu pendant une heure et demi sur "l’avenir institutionnel, politique et économique de la Nouvelle-Calédonie". Un débat organisé à l’initiative du groupe Les Républicains et de Pierre Frogier. Le sénateur de la Nouvelle-Calédonie a saisi l’occasion pour présenter un nouveau projet institutionnel qui prendrait la suite des Accords de Matignon et Nouméa. 

Un bilan sévère de l'accord de Nouméa

Pierre Frogier a d’abord dressé un bilan très sévère de l’accord de Nouméa. Un accord "inachevé, incomplet, imparfait". Mais aussi "un acte manqué, et même dénaturé", selon lui par le gel du corps électoral. Pour Pierre Frogier, la Calédonie se retrouve "dans une impasse". Avec ce constat :

Nous n’avons pas progressé dans la construction d’une communauté de destin.

Pierre Frogier, sénateur LR de la Nouvelle-Calédonie

 

Que propose Pierre Frogier?

Pierre Frogier propose cette expression qui peut sembler contradictoire : "négocier un désaccord".

En clair, les pouvoirs des trois provinces seraient renforcés. L’Etat conserverait les domaines régaliens (police, justice et Défense).

Et le gouvernement local serait remplacé par un collège médiateur, composé de représentants de l’Etat et des trois provinces.

Il s’agirait pour Pierre Frogier d’un mode d’organisation dans lequel les Provinces seraient sur un pied d’égalité, pour apporter "des solutions d’aujourd’hui à un vieux problème".

Les îles Loyauté et le nord, à majorité kanak, seraient ainsi dissociés du sud où se trouve Nouméa, poumon économique du caillou.

Quelles sont les autres propositions?

A l’opposé, l’autre sénateur calédonien, Gérard Poadja, a défendu l’Accord de Nouméa, comme "le seul chemin possible". Pour le parlementaire non-indépendantiste et UDI, une partition effacerait 150 ans d’histoire commune. Il propose plutôt un 3ème "référendum de rassemblement", aux contours encore flous.

Quelles réactions des groupes politiques nationaux ?

Pour le socialiste Patrick Kanner, la proposition de Pierre Frogier est tout bonnement "insoutenable" parce qu’elle reviendrait à une partition, une division du territoire.

Comment peut-on penser que la solution soit le chacun chez soi ?

Patrick Kanner, sénateur socialiste

Patrick Kanner et les socialistes défendent plutôt une indépendance association, qui mêlerait la pleine souveraineté dans le cadre d’un partenariat privilégié avec la France.

Au contraire, Bruno Retailleau, chef de file du groupe Les Républicains, appelle l’Etat à sortir de sa neutralité. Il souhaite l’organisation du troisième référendum très vite, dès la rentrée prochaine.

Bruno Retailleau défend le projet de Pierre Frogier, un projet de "provincialisation", mais surtout pas une partition de la Nouvelle-Calédonie.

Le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, s’en est tenu aux termes de l’Accord de Nouméa. L’Etat se tient prêt à organiser le troisième référendum quand les élus le demanderont, soit maintenant, soit l’année prochaine. Il a salué le travail de Pierre Frogier, mais l’a limité pour le moment à une "initiative personnelle".

Au micro de Serge Massau d'Outre-mer la1ère, le sénateur Pierre Frogier concède : "je sais bien qu'à Nouméa un certain nombre de nos compatriotes me reprocheront de m'être exprimé au Sénat avant de partager mes réflexions. Mais il me semble qu'il y a déjà des réactions favorables à cette initiative. "

Pour Pierre Frogier, l'objectif est atteint. Sa proposition était au cœur du débat à Paris ce mardi.

 

Les élus calédoniens à Paris à la fin du mois de mai

A l'invitation du Premier ministre Jean Castex, plusieurs dirigeants calédoniens indépendantistes et non indépendantistes doivent se rendre à Paris du 25 mai au 3 juin "pour parler de l'avenir" et tenter d'éclairer les conséquences du oui ou du non à l'indépendance.

Deux référendums d'autodétermination ont déjà eu lieu les 4 novembre 2018 et 4
octobre 2020 en Nouvelle-Calédonie, remportés avec 56,7% des suffrages puis 53,3% par les partisans du maintien dans la France.