"Je voulais dire que non seulement nous te remercions mais que nous t'aimons." C'est par cette déclaration d'amour que Gérald Darmanin a remercié Jean-François Carenco qui quittait ses fonctions de ministre délégué aux Outre-mer.
Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a également tenu à saluer le travail de celui qui a travaillé "sans relâche de 4 heures du matin à 4 heures du matin" pendant plus d'un an. "Jean-François Carenco est le meilleur des hommes, j'ai beaucoup appris de son expérience de serviteur de l'État, d'homme politique au sens où il s'intéresse à l'autre parce qu'il aime l'autre", a-t-il ajouté.
Des références douteuses
Tout en encensant son ministre délégué, Gérald Darmanin a étrangement utilisé l'expression 'glaive et bouclier' : "Glaive parce qu'il est comme personne capable de récupérer ici des sous, là des moyens [...]. Bouclier parce que les Outre-mer sont parfois attaqués [...]. Ce bouclier a été extrêmement efficace, ce qui t'a permis d'avoir proposé une feuille de route [au Comité interministériel des Outre-mer, NDLR] saluée par tous les élus ultramarins."
Si l'on comprend bien les louanges, il faut cependant noter que cette métaphore remonte à la fin de la Seconde Guerre mondiale : pour réhabiliter Pétain, l'extrême droite avait en effet avancé que la collaboration du maréchal avec l'Allemagne nazie aurait été un 'bouclier' pour protéger les Français et patienter jusqu'à la victoire des résistants de De Gaulle, qui lui aurait incarné le 'glaive' face à l'ennemi.
Les touches d'humour et d'amour
À la suite de Gérald Darmanin, Jean-François Carenco a pris la parole, se déclarant "heureux et fier d'avoir servi les Outre-mer". "Je quitte ce ministère serein, fier du travail accompli", a-t-il assuré.
Il a cependant tenu à citer quelques-uns des dossiers que devra gérer son successeur, en premier lieu la feuille de route issue du Comité interministériel des Outre-mer (CIOM). Jean-François Carenco a également mentionné le mémorial de l'esclavage, la culture ou encore la santé dans les Outre-mer. Sur ce sujet, il a conclu sur un taquin : "C'est ton problème maintenant."
Avec son franc-parler habituel, il a pris par ailleurs l'exemple du hub des Antilles pour insister sur "la création de culture, la création de valeurs" dans les Outre-mer : "On ne peut plus avoir ce lien univoque 'ça va pas, je te donne 100 balles et on tourne la page', non !"
Au-delà des dossiers, la relation entre l'État et les Outre-mer doit reposer d'après Jean-François Carenco... sur l'amour et la reconnaissance. Citant le chanteur Abd Al Malik, il a ainsi conseillé son successeur : "Ô République, mais pourquoi donc n'as-tu pas dit que tu m'aimais ? Je crois que c'est la feuille de route absolue pour servir les Outre-mer. [...] Ils n'attendent que cela. C'est difficile de le dire dans les 150 langues, mais c'est ça !"
"Nous oserons ensemble"
Pris par une émotion visible, celui qui est passé par les préfectures de Saint-Pierre et Miquelon et de Guadeloupe a préféré arrêter de parler et laisser le micro à son successeur.
Philippe Vigier a lui aussi souligné son émotion avant de remercier le président de la République, la Première ministre et Gérald Darmanin. "C'est une très belle mission, j'y mettrai mon cœur, j'y mettrai mon énergie, j'y mettrai mon enthousiasme, à l'image de Jean-François Carenco", a-t-il confié avant de saluer à son tour son prédécesseur qu'il connaît "depuis longtemps".
Un prédécesseur qui lui a confié des "devoirs de vacances" avec le rapport du CIOM d'un côté, une feuille avec 100 sujets "sur lesquels il faut avancer un peu tous les jours" de l'autre. Souriant de cette mise en scène, Philippe Vigier a voulu montrer aux équipes du ministère que cela ne l'effrayait pas : "Sénèque disait 'C'est parce qu'on n'ose pas que les choses sont difficiles'. Nous oserons ensemble, je compte sur vous, je compte sur votre enthousiasme."
Promettant d'être "le ministre de tous" et "totalement impliqué", il a assuré qu'il irait à la rencontre des Ultramarins, "écouter leurs propositions, leur faire passer [s]on message", afin de leur "apporter un avenir meilleur". Sa visite des Outre-mer va commencer dès ce samedi 22 juillet puisqu'il part dans le Pacifique avec le président de la République Emmanuel Macron, et peut-être ses devoirs de vacances sous le bras.