Du 24 février au 3 mars 2024, des milliers de producteurs à travers le monde se déplacent à Paris à l'occasion du Salon de l'Agriculture. Pour la 60ᵉ édition, l'évènement agricole tend toujours à mettre en avant l'agriculture mondiale et surtout française. Et alors que chacune des régions est représentée par des stands et des animations diverses, la Martinique, elle, a failli ne pas faire le déplacement, par manque de trésorerie. Les producteurs ont dû donc s'adapter pour garantir leur présence.
400 m² en 2023, 175 m² en 2024
"Notre présence est exceptionnelle" confiait José Maurice, président de la Chambre d'Agriculture de la Martinique. Car oui, tout s'est joué dans les derniers instants.
Pour rappel, début janvier, dans un courrier adressé à ses adhérents, la Chambre prévoyait d'être absente au célèbre salon, par faute de trésorerie. Un trou financier notamment creusé par les plus de 200.000 euros déboursés pour ce même évènement l'année dernière.
Mais le 30 janvier, le président José Maurice a annoncé qu'une solution d'urgence avait été trouvée pour assurer leur présence à Paris, rendue possible grâce à la Collectivité territoriale de Martinique (CTM).
"La chambre n'a pas les moyens d'être là" confiait un autre membre de l'organisation, conscient que l'espace qui était consacré au département était "trop limité". Car contrairement à l'année dernière, l'espace alloué aux stands des exposants a été diminué de plus de la moitié.
En passant de 400 m² à 175 m², c'est toute la visibilité de la Martinique au salon qui est redéfinie. Pour ce même membre de la Chambre de l'agriculture, "la présence [de la chambre] est politique". Selon lui, " les politiques doivent comprendre que le salon est une vitrine pour le département". C'est notamment la raison pour laquelle le stand de la Chambre d'agriculture est collé à celui de la CTM, qui lui a permis de participer à l'évènement.
"On s'est associés entre exploitants pour pouvoir venir"
Sans l'appui de la Chambre de l'Agriculture, les exposants ont dû s'organiser différemment pour assurer leur venue et le transport de leurs produits. Une complexification logistique qui induit d'une préparation plus prématurée, qui va d'un ou deux mois avant le salon pour les habitués, contre cinq à six mois pour les nouveaux venus.
Et cette année, les producteurs martiniquais ont opté pour l'union. Ils se sont déplacés à plusieurs et ont financé leur espace ensemble afin de réduire les coûts. Car selon un planteur martiniquais, qui en est à son dixième salon, l'emplacement coûte " 400 euros le m² ". Au total, "le déplacement revient à 10.000 euros en moyenne" raconte Jordan Delamotte, un traiteur martiniquais. Il explique que ce prix comprend "l’exportation des produits, le recrutement des vendeurs sur place, l’hôtel, le billet d’avion". Mais le producteur le sait. Pour son tout premier salon de l'Agriculture, l'objectif est de se faire connaitre auprès des restaurateurs et des professionnels dans l'Hexagone. Mais ce que souhaite en premier lieu Jordan Delamotte c'est de " représenter la Martinique ". Il conclut qu'à "partir du moment où l'on rentre dans nos frais, le reste, c'est une histoire de communication".
De son côté, Jeannine, une productrice de cacao en poudre, estime que son investissement, qui avoisine les 4.000 euros pour un "stand nu", n'est pas sans conséquences. En tant que cheffe d'entreprise, elle considère qu'une entreprise doit passer par ce type d'investissement pour faire grandir son entreprise.
On fait un budget. On fait des estimations pour, au moins, couvrir le déplacement. La cerise sur le gâteau serait qu’on en gagne. Une entreprise doit prendre des risques pour la faire grandir.
Jeannine - productrice de cacao en poudre Martiniquaise
Pour elle, s'"associer avec plusieurs exploitants" était la seule solution "pour pouvoir venir". Raison pour laquelle ils ont partagé à quatre un espace de 36 m². Et l'union se poursuit jusqu'à l'acheminement de la Martinique jusqu'à Paris.
De son côté, la Chambre d'agriculture, par l'intermédiaire de son président José Maurice, annonce vouloir débloquer un budget de "500 000 à 600 000 euros" pour l'année prochaine. Il compte notamment sur l'appui de la CTM et assure "travailler sur le salon de 2025" dès son retour en Martinique.