"Un phénomène de mousson va toucher Mayotte dès ce lundi", s'inquiète Manuel Valls après le passage de la tempête Dikeledi

Manuel Valls
Un mois après le cyclone Chido, de fortes pluies se sont abattues ce dimanche sur Mayotte. Le sud est particulièrement touché. Manuel Valls s'engage au micro d'Outre-mer la 1ère à revenir "dans les quinze prochains jours" pour "assurer aux Mahorais" la poursuite de la reconstruction.

Un mois à peine après le cyclone Chido qui a causé la mort de 39 personnes et 5600 blessés, la tempête tropicale Dikeledi s'est abattue sur Mayotte. Des trombes d'eau ont en particulier causé de nombreuses inondations dans le sud de l'archipel. Le village de Mbouini a été en particulier dévasté. Environ 80 centres d'hébergements d'urgence ont été mis en place et 14 500 personnes accueillies selon la préfecture. Le préfet François-Xavier Bieuville a annoncé sur Mayotte la 1ere le maintien de l'alerte rouge jusqu'à lundi soir. Outre-mer la 1ère a fait le point de la situation avec Manuel Valls, ministre des Outre-mer. 

Outre-mer la 1ère : Mayotte, loin de s'être relevée du cyclone Chido, subit actuellement la tempête tropicale modérée Dikeledi. Comment gérez-vous Dikeledi depuis Paris ?

Manuel Valls : Peut-être que dans d'autres circonstances, nous n'aurions pas eu une mobilisation aussi importante sans le passage du cyclone Chido. Mayotte a déjà connu ce type de tempête tropicale intense, accompagnée de fortes pluies, mais il est impératif de rester extrêmement vigilant. Nos compatriotes mahorais doivent absolument suivre les consignes et respecter l’alerte rouge, aujourd’hui et demain. Il y a aussi un phénomène de mousson qui va également toucher Mayotte dès demain. Les précipitations cumulées depuis ce matin et celles attendues demain représentent un réel danger d’inondation.

Les risques de glissements de terrain sont également nombreux, ce qui nous préoccupe particulièrement, tout comme les submersions maritimes, notamment au nord de l’île. Nous devons donc être très attentifs à ces enjeux. Plusieurs réseaux et canalisations d’eau semblent endommagés, ce qui rendra nécessaire l’acheminement d’eau par bateau, surtout dans le sud de l’île.

Nous devons également nous occuper des 15 000 à 20 000 personnes actuellement hébergées dans des centres d’accueil : écoles, gymnases, équipements publics, et même des mosquées. Les maires et les services municipaux doivent veiller à ravitailler ces lieux en vivres et en eau dans les heures à venir. J’ai vu moi-même des reportages montrant des familles, y compris des enfants.

La mobilisation est donc particulièrement forte et repose sur un travail en lien étroit avec les maires sur le terrain. Il est essentiel d’aller au contact de chaque personne, chaque groupe, dans les villages, communes ou secteurs en difficulté en raison des inondations et des glissements de terrain.

Justement, comme on a pu le voir ce matin, des crues importantes touchent le sud de l’île, y compris des villages épargnés jusque-là par le cyclone Chido. Vous parliez de reconstruction. Comment reconstruire dans l’urgence alors que la saison cyclonique n’est pas encore terminée? 

C’est la réalité imposée par la nature. Le nord, durement frappé par le cyclone, reste fragilisé par les pluies incessantes. Le sud, qui avait été relativement épargné, voit désormais plusieurs de ses infrastructures publiques endommagées, notamment plusieurs écoles.

Nous devons établir un bilan précis dans les prochains jours, dès mardi, afin d’évaluer la situation et déterminer les conditions nécessaires pour organiser la rentrée scolaire. Nous avons d’ores et déjà décidé de décaler la rentrée administrative de 24 heures. Chaque décision devra être prise avec sang-froid et pragmatisme dans les jours qui viennent.

La nature impose ses contraintes, mais notre devoir envers les Mahorais est de reconstruire leur île. Cela inclut les écoles, collèges, lycées, mairies, infrastructures sportives, et une partie de l’hôpital. Dans l’immédiat, nos priorités sont claires : rétablir l’accès à l’eau potable et à l’électricité, assurer l’approvisionnement en vivres, préparer la rentrée scolaire dans les meilleures conditions possibles, évacuer les déchets ménagers pour prévenir les risques d'épidémie et renforcer les mesures de sécurité pour protéger les habitants.

Progressivement, il faudra engager une reconstruction méthodique et ambitieuse. C’est le sens du projet de loi que je présenterai ce lundi en commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale. Ce texte vise à corriger le sous-investissement chronique que connaît Mayotte, comparé à d’autres territoires ultramarins.

La tâche est immense, mais je tiens à assurer aux Mahorais que nous ne lâcherons pas. Je reviendrai dans les quinze prochains jours pour évaluer la situation et superviser les efforts sur le terrain. Les Mahorais attendent des actes concrets, et nous devons leur prouver que l’État est pleinement mobilisé sur le terrain. Reconstruire, prendra du temps, mais je n'ai pas de doutes sur la détermination des Mahorais de reconstruire leur territoire beaucoup mieux.

À propos de la loi d’urgence que vous mentionnez, quand peut-on espérer qu’elle soit promulguée ?

Vous savez, une loi est un processus long et difficile. Il fallait d’abord consulter les élus et intégrer leurs amendements. Je compte beaucoup sur la députée Estelle Youssouffa, rapporteure de ce texte, pour faire remonter les attentes des élus et, à travers eux, celles des Mahorais.

Mon objectif est que ce texte soit finalisé, adopté, et promulgué d’ici fin janvier ou début février au plus tard. Il faut aller vite. Cela nous permettra également de travailler rapidement sur une seconde loi, intitulée Mayotte Debout, qui traitera de questions plus lourdes et indispensables : sécurité, immigration, développement économique et éducation.

Même si je reste attentif aux autres territoires ultramarins, ma priorité est la reconstruction de Mayotte. Tous les territoires ultramarins regardent ce qui est en train de se passer. Le monde nous regarde et moi, je veux que cette reconstruction soit exemplaire.