Une cuisine étoilée à emporter : le pari de deux Martiniquais

Les trois associés de Baieta et Bô : Gregory Anelka, Julia Sedefdjian et Sébastien Jean-Joseph devant leur restaurant fermé au public. Au gauche, la fenêtre permet de livrer les plats aux clients.
Il y a dix jours Grégory Anelka et Sébastien Jean-Joseph ont repris leur activité autour d’une carte mêlant spécialités niçoises et caribéennes. Et le bouche à oreille commence à fonctionner dans le quartier parisien de leur restaurant, Baieta.
"Je vais vous faire de la publicité à mes amis qui n'aiment pas faire la cuisine !" Le service commence bien avec cette première cliente qui habite à quelques rues de Baieta, dans le Ve arrondissement de Paris. "On connait la réputation du restaurant et quand on a appris que c'était ouvert, on s'est dit qu'on allait les soutenir et se régaler en même temps", ajoute cette peintre qui repart avec deux portions d'aïoli.
 
Julia Sedefjian a ouvert Baieta il y a un peu plus de deux ans. En quittant son ancien établissement, la plus jeune cheffe étoilée de France emmenait avec elle des cousins martiniquais rencontrés du temps où tous étaient commis. En janvier 2019, le trio se voyait couronné d'une étoile pour sa cuisine méditerranéenne. Entretemps était né, dans le même quartier : un "bar à manger" caribéen avec tapas et rhums d'exception. C'est dire si les affaires se portaient bien jusqu'ici... mais après les grèves de décembre 2019 et janvier 2020, l'épidémie de Covid-19 forçait les associés à baisser le rideau le 15 mars dernier.

Si les douzes salariés sont toujours au chômage partiel, les trois associés ont décidé de rouvrir fin avril. Les clients sont invités à passer commande la veille pour le lendemain, et à venir récupérer plats et boissons par la fenêtre. Sur la carte, féroce d'avocat, gratin de banane jaune et pain au beurre-chocolat côtoient le magret de canard rôti et la foccacia. 
 Avec une quinzaine de commandes quotidiennes à emporter, Gregory Anelka, le directeur de salle, espère monter en puissance. "Pour l'instant on tente de sauver les meubles. C'est un moyen de substitution à un fonctionnement classique. Il faut payer les loyers, on a avancé les salaires de mars et avril, le charges sont suspendues mais pas supprimées. Plus on attend et plus on aura de choses à rembourser au moment du déconfinement." Dès la semaine prochaine, l'équipe entamera un partenariat avec une entreprise de livraison pour toucher plus de clients. "Se dire que ça va s'arrêter, pour nous, ça n'est pas une option. L'idée c'est d'être prêts et de ne pas être attentistes."

Les deux cuisiniers sont à bonne distance l'un de l'autre, masque sur le visage. "C'est assez contraignant, avoue Sébastien Jean-Joseph, mais on compose : de temps en temps on sort le nez pour sentir les odeurs de nos préparations. C'est un peu étouffant, mais on s'adapte !"
 Sur une table du restaurant, des barquettes en plastique s'entassent. Dehors, au sol, du scotch marque les emplacements à respecter en cas de file d'attente. Le "ti' punch pour la route" a déjà ses habitués. La commande anticipée permet d'ajuster les achats de marchandises au plus précis. Le trio veut instaurer un climat de confiance et rouvrir le plus tôt possible.

Regardez le reportage d'Outre-mer la 1ère/France Ô :
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