Chèvres, chats et rats menacent l'écosystème des îles Eparses

Les frégates font partie des espèces présentes sur l'île Europa.
Lors de leur passage à Europa, la "perle des Eparses", certains voyageurs ont débarqué avec des chèvres, des chats ou encore des rats. Aujourd'hui, ces espèces deviennent une menace pour l'écosystème et les autorités doivent penser à les éradiquer.

Des chèvres mangeuses de plantes

Quand Monsieur Rosiers a débarqué sur Europa en 1860 avec quelques chèvres, il n'imaginait pas qu'elles deviendraient une menace pour son écosystème. Ce colon français, en provenance de Tuléar (Madagascar) est arrivé sur Europa en 1860 et est finalement reparti assez vite. Si les poules et les ânes ne lui ont pas survécu, les chèvres se sont parfaitement adaptées sur cette île du sud-ouest de l'océan Indien qualifiée de "perle des Éparses", pour son état de préservation.
 
"Le cheptel est estimé entre 500 et 800 têtes, elles s'attaquent à la végétation", explique Clément Quétel, du service environnement des Terres australes
et antarctiques françaises (TAAF), gestionnaires des Éparses depuis 2007.
 
"Les chèvres broutent la piste du Transall, c'est pratique, mais aussi les euphorbes (plantes), qui sont l'habitat de plusieurs espèces d'oiseaux. Il n'y a pas encore de programme d'éradication", admet-il.
 
Il fut un temps où les militaires, qui assurent de leur "résidence Robinson" la souveraineté de la France, avaient le droit de les chasser pour améliorer l'ordinaire. Mais depuis le renforcement des normes sanitaires, adieu la brochette de cabri.
 

Les chats, une menace pour les oiseaux marins

Les rongeurs sont arrivés dans toutes les îles avec les hommes, dans les cales des bateaux. "Et la sottise a été d'introduire des chats pour lutter contre les rats et les souris. Pour un chat, il est plus facile d'attraper des reptiles et des oeufs d'oiseaux", signale Matthieu Le Corre, directeur du laboratoire d'Écologie marine (Ecomar) de la Réunion.
 
A Juan de Nova, où la colonie de sternes (des oiseaux marins) est tombée de 2 millions de couples en 2003 à 400.000 en 2013, environ 90% des chats ont été tués lors de campagnes d'éradication entre 2006 et 2011. "C'était la plus grande colonie de sternes de l'océan Indien: on ne sait pas si ce sont uniquement les chats ou des variations de l'océan (et donc la quantité de poissons, ndlr), ou le cumul des deux, qui ont dézingué des milliers de sternes par an", relève Matthieu Le Corre.
 

Des rats qui dérangent aussi

Le rat est aussi en "forte densité" sur Europa, et s'attaque aux oeufs des nids au sol. Engager une action de dératisation sur les 30 km² de l'île nécessiterait des moyens qui ne sont pas disponibles.
 
En revanche, sur deux îles beaucoup plus petites, une telle extermination a eu lieu et avec des effets spectaculaires. En 2003, l'île du Lys, dans l'archipel
des Glorieuses, a été nettoyée, éliminant la principale menace des noddis bruns et des sternes fuligineuses qui sont maintenant 250.000 à venir nicher chaque année.
 
Sur le kilomètre carré de Tromelin, une dératisation a aussi été menée en 2005. "Ces trois dernières années, nous sommes passés d'environ 200 couples par espèce de fous [également une espèce d'oiseau marin] à entre 800 et 1.000. C'est un très joli résultat, une super dynamique", s'enthousiasme le directeur d'Ecomar.
 
"Avec plus d'oiseaux, plus de déjections fertilisantes et donc plus de couvert végétal, l'île réagit très vite à l'extinction de son principal perturbateur", se réjouit le chercheur. Au XVIIIe siècle, 10 espèces d'oiseaux avaient été décrites sur l'île, il n'y en avait plus que deux dans les années 2000. "Les frégates, les sternes et le noddis se remettent à fréquenter l'île, pour l'instant sans se reproduire. Ca va peut-être revenir", espère-t-il.