IFTM Top Resa : Trois questions à Jean-Pierre Philibert, président de la Fédération des entreprises d’Outre-mer (Fedom)

Jean-Pierre Philibert, le président de la Fedom, au Salon international du tourisme IFTM Top Resa à Paris, le 26 septembre 2013
A l’occasion du Salon du tourisme IFTM Top Resa, la Fédération des entreprises d’Outre-mer a organisé le 26 septembre une table ronde intitulée « Tourisme et hôtellerie Outre-mer : le défi de la compétitivité ». Jean-Pierre Philibert, le président de la Fedom, répond à nos questions. 
Quel est le défi de la compétitivité pour le tourisme en Outre-mer ?
Jean-Pierre Philibert : "Nous attendons d’abord que le tourisme soit reconnu pour ce qu’il doit être, c'est-à-dire le premier vecteur du développement économique de nos Outre-mer. Nous avons la qualité de nos paysages, de nos plages, de la chaleur et du dynamisme de l’accueil, tout cela c’est important.  
Malheureusement le secteur du tourisme est totalement sinistré parce que nos concurrents sont des pays à bas salaires qui pratiquent des prix sur lesquels on ne peut pas s’aligner. Il faut donc que l’on retrouve de la compétitivité. Elle ne dépend pas que de l’Etat et d’une baisse des charges, mais cela dépend aussi de nous. Il faut que l’on clarifie ce que l’on veut, comme l’ont fait par exemple la Réunion et l’ensemble des îles autour qui ont redéfini le critère des Iles vanilles. Il va falloir dire très clairement quel type de tourisme nous souhaitons, comment on attire et fidélise les gens.
Il faut aussi que nous ayons un dialogue avec les élus locaux et régionaux pour leur demander quelle est leur conception du tourisme, et lever des obstacles. Un exemple, en Martinique il y a le problème d’un certains nombre d’hôtels qui n’ont pas accès à la plage. Il faut donc que sur l’environnement il y ait un dialogue.
Ensuite il y a un volet avec le gouvernement. Le président de la République s’est engagé sur un plan pluriannuel, le premier ministre a rappelé que le tourisme est un grand facteur de développement, donc chiche, mettons-nous autour de la table avec le ministre des Outre-mer et les élus et examinons les voies et les moyens."
 
Vous dites que le secteur du tourisme est « sinistré » dans les Outre-mer. Vous ne pensez pas que c’est un peu fort comme qualification ?
Jean-Pierre Philibert :
 "Bien sûr tout cela est variable selon les territoires mais il suffit d’aller voir en Martinique par exemple, c’est assez cataclysmique. Il ne se passe pas de mois sans qu’on annonce une fermeture. Cela nous préoccupe. Nous avons perdu un grand nombre de chambres hôtelières depuis des années et nous constatons que l’offre s’est raréfiée. Faute de compétitivité. A la Fedom nous en faisons une grande cause."
 
Qu’attendez-vous de l’Etat ?
Jean-Pierre Philibert : "
Je pense d’abord que les aides et la fiscalité doivent être recentrées. Ce qui est prioritaire aujourd’hui ce n’est pas forcément la construction d’établissements nouveaux, mais c’est la réhabilitation d’établissements anciens. Nous avons des carcasses hôtelières sur un certain nombre de nos plages, en Guadeloupe, en Martinique, en Polynésie française… La résolution de ce problème est une priorité. Il faut redonner de l’attractivité à nos bords de mer, et dans ce cadre recentrer les aides fiscales.
Par ailleurs il faut réduire le coût du travail. C’est impératif. Cela veut dire entre autres mettre en place la vraie saisonnalité, avec une reconnaissance de la saisonnalité de nos activités.
Dans l’hôtellerie en Outre-mer il y a aussi beaucoup de personnes âgées et il faudrait peut-être un grand plan de départ à la retraite de ces personnes qui sont fatiguées de l’hôtellerie, qui est un métier pénible, pour permettre aux jeunes formés dans nos lycées hôteliers de venir occuper des emplois. Il faut arrêter avec le drame du départ de la jeunesse insulaire qui fait que les jeunes les mieux formés s’en vont pour ne pas revenir.
Enfin il y a la question de la compétitivité. Il faut régler une fois pour toutes le problème de la dette fiscale et sociale, sujet certes sensible, et baisser les charges de manière ciblée car le coût du travail est trop élevé. Il faut dire à l’Etat, pas nécessairement "plus d’argent", mais de l’argent d’une manière ciblée sur ce secteur."