Ouverture en Martinique d'une conférence internationale sur la lutte contre le trafic de drogue

Destruction de stocks de cocaïne et de marijuana saisis par la police panaméenne à Cerro Patacon, près de Panama City, en Novembre 2013
L'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis) a ouvert mardi en Martinique une conférence internationale consacrée à la lutte contre le trafic de drogue dans les Caraïbes. 
Une cinquantaine de participants, représentant les différents services spécialisés français, dix pays (France, Royaume Uni, États-Unis, Espagne, Allemagne, Pays-Bas, Colombie, République Dominicaine, Brésil et Portugal), et plusieurs agences internationales (dont EUROPOL et INTERPOL), doivent échanger durant trois jours à Schoelcher sur la situation du trafic de drogue dans la Caraïbe.
 

Nouvelles techniques des trafiquants

Il s'agit "d'une problématique de plus en plus importante, avec des saisies de plus en plus importantes", a déclaré Eric Veaux, Directeur adjoint à la Direction Centrale de la Police Judiciaire, lors de la conférence de presse d'ouverture.
 
Selon Michel Quillé, Directeur adjoint d'Europol, cette rencontre internationale a notamment pour but de parvenir à "une certaine coordination, pour éviter la duplication des moyens et des efforts", particulièrement en période de restrictions budgétaires.

Les nouvelles techniques des trafiquants seront évoquées, telles que la dissimulation de la drogue dans des torpilles cachées sous des bateaux, accessibles ensuite à des plongeurs venant récupérer les paquets.
 
Le sous-marin fait aussi partie des nouveaux moyens utilisés, "notamment entre l'Amérique du Sud et l'Amérique du Nord" précise Simon Riondet, chef de l'antenne Caraïbe de l'OCRTIS Antilles-Guyane.
 

"Corruption dans les ports"

Patrick Laberche, numéro deux de l'OCRTIS à Nanterre, a par ailleurs pointé la "corruption dans les ports", de plus en plus structurée, ou "les points de faiblesse de sécurisation des aéroports", découverts lors de récentes saisies au Havre ou à Roissy.
 
L'ampleur du trafic via la zone Caraïbe a été illustrée récemment par la saisie de plus de 502 kg de cocaïne lors du démantèlement d'un trafic entre l'île et le port du Havre.
 
L'antenne Caraïbes de l'Ocrtis, basée en Martinique, au sein de la base navale du Fort-Saint-Louis à Fort-de-France, a été au centre de cette opération hors norme qui a permis début novembre l'arrestation de 22 personnes. Le trafic provenait de la zone andine et la drogue était acheminée en Ile-de-France à partir des Antilles.
 
L'Octris antillais est chargé de coordonner le travail et les moyens de la police, des douanes, de la gendarmerie, de la Marine et de la Gendarmerie maritime. Depuis 2004, date de sa création, 29 tonnes de cocaïne ont été saisies, 73 organisations démantelées et près de 1.000 personnes placées en garde à vue.


La Caraïbe plaque tournante du trafic de drogue

La région des Caraïbes est une plaque tournante du trafic de drogue, proche des trois principaux pays producteurs : le Pérou, la Colombie et la Bolivie, produisant à eux seuls "1.000 tonnes de cocaïne par an, dont 200 à 250 tonnes destinées chaque année à l'Europe", indique Simon Riondet. La drogue peut transiter par le Vénézuela, vers les Antilles puis l'Europe, ou par le Brésil, vers l'Afrique, puis l'Europe, pour y être revendue entre 35 et 50.000 euros le kilo ou entre 60 et 65 euros le gramme.
 
L'antenne Caraïbes de l'OCRTIS compte une cinquantaine de personnes dont une douzaine de gendarmes, deux douaniers auxquelles s'ajoutent deux représentants de la Marine nationale et deux agents de liaison étrangers, un Britannique et un Espagnol.
 
Ces enquêteurs chevronnés s'appuient sur des services opérationnels à l'étranger, et les réseaux de la DCI (Direction de coopération internationale) composée de gendarmes ou policiers français, officiers de liaison installés au Venezuela, en Colombie, au Brésil, Mexique, Surinam, Costa Rica, en Floride, Haïti ou République Dominicaine.
 

Les trafiquants et leurs mules

C'est "la stratégie du bouclier" pour intervenir avant que la drogue ne soit "disséminée" en Europe, explique Simon Riondet.
 
L'Octris traque les trafiquants et leurs mules, avec, aux Antilles, une constante problématique maritime. Simples voiliers, petits bateaux équipés de gros moteurs (les go-fast), conteneurs ou cargo, peuvent abriter de très gros trafics. Trois à cinq bateaux sont interceptés chaque année en zone caraïbe.
 
Les mules peuvent revêtir des apparences parfois surprenantes. Simon Riondet se souvient ainsi d'un suspect âgé de 76 ans, interpellé dans un hôtel au mois d'août : pourtant valide, il s'apprêtait à s'envoler pour Paris, en fauteuil roulant, avec deux valises contenant 40 kilos de cocaïne.