Les ombres de l'usine du nord: une main d'oeuvre ouvrière et immigrée

De 2008 à aujourd'hui, plusieurs milliers de travailleurs venus d'Asie ont contribué à la fabrication de la gigantesque usine de nickel du nord, en Nouvelle-Calédonie. A l'heure ou la base vie de Vavouto est en cours de démantèlement, gros plan sur cette main-d'oeuvre de l'ombre. 
Le marché boursier des matières premières et du nickel (LME) est à Londres. L’institut international d’études des cours du nickel (INSG) est à Lisbonne. Les deux capitales ont comme point commun d’avoir dirigé deux empires coloniaux qui importaient à bon compte des matières premières du monde entier. En 2014, la consommation de nickel devrait augmenter de 4,5% à 1,85 million de tonnes pour une production en hausse de 3,1% à 1,97 million de tonnes.
Ces chiffres bruts et anonymes masquent toujours le labeur anonyme de milliers de travailleurs. C'est aussi l'histoire de l'usine de nickel du Nord le fleuron industriel des indépendantistes calédoniens.

La cathédrale de métal est édifiée 

Les eaux sombres de la baie de Vavouto ne sont plus agitées par les géants des mers. Les porte-conteneurs qui apportaient les éléments de construction de l'usine du nord sont partis vers d'autres horizons.
Derrière la colline qui la protège des éventuels tsunamis, la grande usine de nickel du nord est entrée en production. Progressivement, elle monte en puissance. Il ne reste aujourd'hui plus aucune trace des ouvriers silencieux qui ont construit cette impressionnante cathédrale de métal. 
La base vie de Vavouto avec ses baraquements en préfabriqués, est en cours de démantèlement. Ce sont des entreprises locales qui se chargent de détruire ce qui a été, depuis 2008, le foyer de près de 6000 travailleurs pour la plupart venus d'Asie.


Discipline quasi militaire

Des ombres laborieuses qui furent soumises à un encadrement et à une discipline quasi militaire. Le KONIAMBO était un chantier qui attirait autant qu’il fascinait. Dans le brouhaha matinal et martial des centaines de travailleurs chinois ou coréens. Ils se ressemblaient tous, silhouettes immémoriales, obéissantes et disciplinées.
Les techniciens et cadres essentiellement européens ou canadiens étaient eux beaucoup plus libres. Logés dans des  hôtels avec piscine de Koné, la nouvelle capitale économique de la province nord indépendantiste.


L'heure du démantèlement 

Le démantèlement de la base-vie correspond à la fin progressive et programmée de la
mission des 3 500 travailleurs étrangers qui ont participé à la construction de l'une des plus grandes usines de nickel au monde. Des hommes jeunes pour la plupart mais aussi une centaine de femmes.
Des rumeurs persistantes ont fait état de la présence très discrète de prostituées venues de Chine. Sans qu'il soit possible d'en certifier la présence. Une rumeur niée par la direction de KNS l'entreprise maître d'œuvre qui a dû néanmoins prendre des mesures de sécurité pour les femmes vivant en permanence sur le site.




Venus de toute l'Asie

Pendant cinq ans, les uns et les autres ont donc  fait leur vie ici, dans le nord de la Nouvelle-Calédonie.
Chinois ou coréens du sud pour la plupart, mais aussi philippins, indonésiens, plus de la moitié est déjà rentrée au pays, par avion, de Nouméa jusqu'à Séoul. Une dernière vague de départ est prévue fin janvier, elle aussi par avion de Nouméa jusqu'à Séoul puis pour la Chine. Ensuite, plus aucun travailleur étranger ayant participé à la construction ne sera présent à Vavouto.

Une année pour terminer le démantèlement

Les travaux de démantèlement de la base-vie vont continuer jusqu'à fin 2014, date à laquelle l'usine de nickel sera pleinement opérationnelle.

Qui étaient-ils ?

L'histoire de ces hommes, de ces femmes  a rarement été montrée, tout juste sait-on qu'ils ont été attirés par des contrats qui leur proposaient une formule tout inclus, "transport, salaires, logement et nourriture".
D'où venaient-ils, qui étaient-ils ? Des questions sans véritable réponse, l'histoire reste à écrire. Les rues de Koné la capitale économique du nord ont retrouvé leur calme, les silhouettes de ces travailleurs auxquels on avait fini par accorder le droit de sortir quelques heures, hors de leur base-vie, de leur camp de travail ont définitivement disparu…