Chikungunya : bientôt des vaccins testés chez l'homme ?

Présent depuis des années en Asie, en Afrique, en Amérique et dans l’Océan indien, le chikungunya est une maladie transmise par un moustique, l’Aedes albopictus. Les Antilles sont désormais touchées par le virus. La recherche aux vaccins s’accélère.
D’après l’article du Figaro paru ce jeudi, un vaccin contre le virus du chikunguna est envisageable à moyen terme, après les bons résultats obtenus chez l'animal par plusieurs équipes de recherche. «Nous savons désormais que différentes approches vaccinales sont efficaces pour prévenir la maladie, précise Pierre Roques, coauteur de l'une des études et chercheur à l'université Paris-Sud XI et au CEA. Elles devraient bientôt être testées chez l'homme
Pour l’heure, il n'existe aucun traitement efficace contre cette maladie. Pourtant la piste d’un vaccin est explorée.
 

Un vaccin recherché depuis 40 ans

Pourtant la piste d’un vaccin est explorée depuis une quarantaine d’années. Pourquoi n’existe-il pas encore aujourd’hui ?  Pour Frédéric Tangy (photo), directeur de recherche de l’unité de Génomique virale et vaccination de l’institut Pasteur, "le problème serait plutôt d’ordre économique".
Fredéric Tanguy
Le chikungunya frappe surtout les pays tropicaux, plutôt pauvres. Or en 1971, un premier essai de vaccin inactivé voyait le jour. "Mais il était trop cher à produire, et nécessitait plusieurs doses. Il a du être abandonné" explique le chercheur.
"C’est une dizaine d’années plus-tard que l’armée des Etats-Unis a développé un vaccin, un vaccin atténué cette fois. Mais les essais cliniques de sûreté se sont révélés négatifs. Le virus n’était pas assez atténué, et certains sujets, il était même redevenu aussi pathogène que l’original. Ce travail a été donc mis de côté" pendant des années ajoute le directeur de recherche.
Actuellement donc, plusieurs laboratoires à travers le monde courent après le vaccin. 

Un vaccin autrichien testé sur le singe

Le plus avancé des vaccins candidats est celui de la société autrichienne Themis Bioscience. En 2013, celle-ci a entamé les premiers essais cliniques de son produit, qui utilise le vaccin de la rougeole comme support avec une technologie brevetée par l'Institut Pasteur. En janvier 2014, l'équipe de Scott C. Weaver (université du Texas) a rapporté dans la revue Journal of Infectious Diseases l'existence d'un vaccin efficace en une seule dose chez le macaque et réalisé à partir d'un virus du chikungunya génétiquement très atténué. Dans le même temps et avec la même approche, des chercheurs de l'Institut Karolinska, en Suède, alliés à des chercheurs français, ont présenté un vaccin protégeant les souris dans la revueJournal of Virology. Des résultats prometteurs ont aussi été obtenus chez la souris par une équipe espagnole et une néerlandaise, dont le vaccin est composé de particules formées par des protéines du virus produites en masse.


Un vaccin contre le chikungunya dans 5 ou 6 ans ?

Différentes possibilités pourraient mener à un vaccin.
Actuellement, plusieurs laboratoires à travers le monde courent après ce vaccin, et quelques-uns, comme en Autriche, ont entamé des essais cliniques. Selon, Frédéric Tangy, "les plus avancés sont en phase I, voire en début de phase II. Il faudra attendre cinq ou six ans avant qu’un tel produit ne se retrouve sur le marché". En France, comme en Autriche, "nous avons pris le parti de combiner le vaccin contre le chkungunya avec celui de la rougeole. On a suffisamment de recul pour savoir que ce dernier est efficace, sans danger et facile à produire à bas prix".  
La course est lancée, reste désormais à savoir si elle pouvoir être menée à son terme.
En effet, après le travail des chercheurs,  les firmes pharmaceutiques se donneront-elles les moyens d’aller au bout du projet ?


Une maladie virale

La maladie de l’homme courbé. Voilà comment on traduit le terme « chikungunya » issu des langues bantous (parlées dans la moitié sud de l’Afrique), pour désigner une maladie virale transmise par les moustiques du genre Aedes, dont le fameux moustique-tigre. Le nom est devenu familier en France lorsqu’au cours, des années 2005 et 2006, la Réunion a été frappée par une épidémie de grande ampleur. On estime que près de 300 000 habitants de l’île ont été contaminés, soit un peu moins de 40% de la population, et 248 décès directs ou indirects ont été recensés.
Petite explication avec Marc Lecuit, responsable de l'unité biologie des infections à l'institut pasteur
Marc Lecuit responsable de l'unité biologie des infections