Guyane : le Conseil général obligé de payer les prêtres

L’église Saint-Joseph de la commune d’Iracoubo, en Guyane, classée au titre des monuments historiques.
Le Conseil général de Guyane va être obligé de verser à 26 prêtres catholiques plusieurs mois de salaires impayés, la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat ne s'appliquant pas à ce département. 
Le comptable public vient de mettre en oeuvre le paiement de ces salaires suite à une procédure de mandatements d'office engagée il y a 15 jours par la préfecture à l'encontre du Conseil général, selon le directeur régional des finances publiques (DRFIP) Jean-Claude Hernandez. "On peut considérer qu'aujourd'hui c'est fait" a déclaré vendredi M. Hernandez à l'AFP.
 
Ces mandatements d'office permettent au comptable public qui a obtenu "un feu vert de Bercy sur ce dossier" selon M. Hernandez, de puiser dans les finances du Conseil général qui refusait, depuis le 1er mai, de continuer à payer ce quota de 26 prêtres.
        

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"Le seul texte fondamental régissant les cultes en Guyane demeure l'ordonnance royale de Charles X du 27 août 1828, laquelle, bien que d'inspiration concordataire, ne reconnaît que le culte catholique",  notait une étude réalisée il y a quelques années par une ancienne directrice des archives départementales de Guyane.
        
La loi de 1905 sur la séparation de l'Église et de l'État n'a jamais été rendue applicable en Guyane, alors qu'elle avait été étendue le 6 février 1911 à la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion. La départementalisation de 1946 n'avait pas remis en cause ces rémunérations sur fonds publics prises en charge depuis de longues années sur le budget du département.
        
Il y a plusieurs mois, le président du Conseil général de Guyane, Alain Tien-Liong (divers gauche), estimant la situation anormale, avait décidé par arrêtés de mettre un terme au versement de la rémunération d'un quota de 26 prêtres jusque là payés comme des fonctionnaires de catégorie B de la collectivité. En revanche, le Conseil général a continué à rémunérer l'évêque de Cayenne sur la base d'un salaire de fonctionnaire de catégorie A.
 

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Le 16 juin dernier, le juge des référés administratifs de Cayenne, saisi par les 26 prêtres et une association présidée par l'évêque, avait ordonné au Conseil général de "rétablir le versement de la rétribution des membres du clergé concernés (...) jusqu'à un jugement au fond".
        
Depuis, le président du Conseil général refusait de se conformer à la décision de justice. "J'ai reçu une mise en demeure du préfet payer les salaires des prêtres en juillet puis le préfet m'a appelé courant septembre pour me dire qu'il avait procédé aux mandatements d'office" a expliqué Alain Tien-Liong.
        
"Une majorité des contribuables guyanais n'est pas d'accord pour que les salaires des prêtres soient payés par le Conseil général, sinon j'aurais reçu une volée de bois vert", a-t-il ajouté. "J'ai des difficultés de budget notamment pour les salaires de la maison départementale des personnes handicapées. Si les mandatements d'office fonctionnent pour les salaires des prêtres, le préfet va m'entendre. Je vais demander notamment que cela fonctionne aussi vis-à-vis des communes de Guyane qui ont des dettes vis-à-vis du service départemental d'incendie et de secours (SDIS)" a déclaré M. Tien-Liong.
        
Selon la préfecture de Cayenne, des mandatements d'office ont été mis en œuvre dans le dossier SDIS "en début d'année" mais "tous n'ont pas donné les résultats escomptés notamment à cause des difficultés financières de certaines communes".