Tout savoir sur les rites et les constructions identitaires des sociétés créoles

Laurence Pourchez (à droite), anthropologue, maître de conférences au sein de l’UFR santé de l’université de la Réunion, et Isabelle Hidair, anthropologue, maître de conférences à l’IUFM de l’université de Guyane.
Anthropologues et maîtres de conférences, respectivement aux universités de la Réunion et de la Guyane, Laurence Pourchez et Isabelle Hidair présentent un ouvrage exhaustif sur les rites des sociétés créoles, de la Réunion à l’île Maurice en passant par la Martinique et le Brésil. 
Dans l’ouvrage qu’elles ont coordonné « Rites et constructions identitaires créoles », les deux anthropologues et universitaires Laurence Pourchez (la Réunion) et Isabelle Hidair (Guyane) ont réuni une vingtaine de chercheurs dans une approche pluridisciplinaire visant à mieux décrypter les sociétés créoles. Anthropologues, sociologues, spécialistes de littérature et ethnomusicologues, entre autres, passent au crible les différents rites socioculturels de l’océan Indien, de la Caraïbe et même de certains groupes d’Australie se revendiquant comme créoles.
 
« Toutefois il ne faut pas mélanger les genres et considérer que l’on est créole à partir du moment où il y a de la multiculturalité », précise Laurence Pourchez. De nombreux critères en effet, assez précis, définissent une société créole, renchérit Isabelle Hidair. « Au sens où nous l’entendons dans notre ouvrage, ce sont des sociétés qui sont liées à l’histoire de la traite négrière et de la plantation » dit-elle. « Dans une société créole il y a une juxtaposition des cultures, et ce qui nous a intéressées ce sont les passerelles, les rencontres entre ces cultures qui créent une nouvelle culture. Cette culture qui est entretenue de génération en génération par des rites, modifiés au fil du temps mais qui perdurent quand même. »
 

REGARDEZ : Laurence Pourchez présente l’ouvrage « Rites et constructions identitaires créoles »

« C’est un livre qui est un croisement pluridisciplinaire de travaux de collègues sociologues, littéraires, anthropologues et historiens. Notre objectif est de montrer toute la pertinence de l’analyse qui peut intervenir quand on croise ces regards sur les sociétés créoles de façon à pouvoir montrer que ces sociétés constituent un sujet de recherche à part entière, et que les rites se situent au cœur de la culture. »


Laurence Pourchez déplore par ailleurs que les sociétés créoles n’aient pas été suffisamment prises en considération dans les études universitaires. « On a considéré pendant très longtemps que les sociétés créoles étaient des sociétés acculturées "issues de", et pas des sociétés à part entière. Ce n’était pas considéré comme quelque chose de scientifiquement valide. »
« Le regard sur ces sociétés a aussi changé », commente Isabelle Hidair. « Jusqu’à maintenant c’était un regard extérieur qui venait observer, alors que dorénavant il y a des universitaires issus de la société créole, avec un regard qui vient de l’intérieur. Ces derniers portent un autre discours sur ces sociétés, et déconstruisent pas mal d’idées reçues sur leur image ». 

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« Le carnaval est le reflet de la société cayennaise. C’est un résumé de ce que la population veut faire passer comme message, par exemple au niveau culturel, avec la différenciation des groupes socioculturels, ou chaque groupe carnavalesque va correspondre à un groupe dit ethnique. Cela peut refléter aussi les relations entre les hommes et les femmes, ou bien le mécontentement de la population envers ses élus et la situation socioéconomique. Au-delà de la pratique festive, ce qui m’a intéressée c’est d’analyser le message envoyé par la population à ce moment-là ».


« Rites et constructions identitaires créoles », sous la direction de Laurence Pourchez et Isabelle Hidair – éditions des archives contemporaines, 332 pages, 35 euros.
 

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