Helsinki a nationalisé la plus grande mine de nickel d'Europe. Le gouvernement finlandais précise qu'il n'a pas vocation à diriger l'entreprise. Il se désengagera quand finira la crise des matières premières. Un exemple pour la Nouvelle-Calédonie ?
La région de Sotkamo en Finlande orientale est couverte de lacs et de forêts. C'est aussi une terre riche en nickel et en cuivre. L'activité minière fait vivre la région depuis le début du vingtième siècle. Aujourd'hui encore le tourisme est peu développé. La capitale régionale Kajaani est avant tout une importante base militaire et la frontière russe est à 120 kilomètres.
Plus grande mine de nickel de l'UE
C'est donc ici, à 500 kilomètres au nord d'Helsinki, que la plus grande mine de nickel de l'Union européenne est discrètement passée sous la direction d'une société publique entièrement détenue par l'État finlandais (100 % du capital).
Talvivaara Mining emploie 400 personnes, les deux sites miniers distants de quelques kilomètres ont une capacité annuelle de 10 millions de tonnes de minerai et des réserves estimées à 3 millions de tonnes de nickel (sous forme de métal à traiter). Avant l'effondrement des cours du métal à l'automne 2014, Talvivaara ambitionnait de devenir l'une des mines les plus productives au monde, grâce au procédé d'extraction pionnier, par biolixiviation du minerai de nickel. Et peu importait alors que des problèmes de production, accentués par des fuites de métaux et d'acide aient pollué des lacs et des rivières. Profitant de cette expérience malheureuse mais assez classique dans l'industrie du nickel, le gouvernement finlandais en a tiré les conséquences. Il nationalise et sauve une entreprise en faillite après avoir posé ses conditions pour préserver l'environnement.
La "finlandisation" du nickel sera provisoire
Sans son intervention, Talvivaara, dont le propriétaire s'est déclaré en faillite courant 2014, aurait été incapable de faire face à la chute des cours du nickel. Les activités minières et les emplois ont été repris par Terrafame Mining. Cette société nationale a été créée pour sauver le producteur de nickel finlandais. Au total, le gouvernement devrait allouer plus de 210 millions d'euros à l'opération via Solidium, le Fonds Souverain du pays. L'objectif est, bien sûr, de sauver l'activité minière et les emplois et donc d'éviter la désertification d'une région déjà faiblement peuplée. Mais on est en Finlande, la nationalisation sera provisoire, Talvivaara n'a pas vocation à demeurer dans le giron de l'Etat. Responsable de la communication du groupe minier, Outi Kärkkäinen précise à La1ere.fr : "
Nous connaissons la situation du marché du nickel, nous avons tous les chiffres de production, y compris en Nouvelle-Calédonie. Franchement, pour nous, la nationalisation était la seule bouée de sauvetage".
Deux ans pour rentabiliser
Le gouvernement accorde deux ans à Terrafame, la nouvelle entité publique, pour rentabiliser les activités minières de Talvivaara mais aussi pour trouver des investisseurs privés. Il s'agit de donner du temps au temps et de laisser passer la crise du nickel et des matières premières. En juillet dernier, le Fonds d'investissement spéculatif londonien Audley Capital Advisors avait renoncé à acquérir 85 % de l'activité du producteur de nickel. Le gouvernement finlandais, sensible aux questions environnementales, avait exigé des Britanniques de sécuriser la situation environnementale et de réduire la pollution de l'activité minière. Le Fonds spéculatif s'en est allé investir sur des terres plus accueillantes…
Minerai finlandais, métal russe
En 1955, une longue voie ferrée a été construite afin de transporter le nickel-cobalt à une fonderie sur le site de Harjavalta, au sud-ouest de la Finlande. Depuis 1957, le minerai de Talvivaara est destiné à l'usine du second producteur mondial,
Norilsk Nickel, qui produit sur place plus de 40.000 tonnes annuelles de métal. En Finlande, le géant russe est presque sur ses terres. La longue frontière avec le voisin de l'Est est présente dans toutes les mémoires, aujourd'hui comme hier.