Effondrement de Glencore à la Bourse de Londres. Son patron reçu par la ministre des Outre-mer

Devant le London Metal Exchange (LME).
Kenny Ives, le patron de la branche nickel de Glencore a rencontré George Pau-Langevin. Rien n'a filtré de cet entretien. Cependant, la multinationale pourrait ne pas se contenter de sa situation minoritaire dans le pacte d'actionnaires de l'usine calédonienne du Nord.  
Une « rencontre normale et ordinaire », vraiment ? C'est par ces mots qui se voulaient rassurants que le service de communication du ministère des Outre-mer a tout d'abord répondu par un avis favorable, lundi matin, à la demande de couverture des journalistes. À l'ordre du jour, donc, une rencontre entre la ministre des Outre-mer et le patron de la branche nickel de la multinationale du négoce et des matières premières. Un peu plus tard dans la matinée, c'est par un SMS que nous apprendrons qu'aucune interview ni aucune image ne seront finalement possibles et « qu'il faut s'adresser directement à Glencore ». En Suisse, au siège de l'entreprise, le responsable de la communication refusera, lui aussi, toute interview et la présence d'une caméra, tout en précisant : « It's a normal meeting ». Juste une rencontre amicale entre George Pau-Langevin et Kenny Ives…
 

L'action Glencore s'effondre

La situation est pourtant particulièrement tendue pour Glencore, dont l'action s'effondre de plus de 27 % ce lundi à la bourse de Londres. Dans ses actifs, Glencore détient un peu plus de 49 % de l'usine KNS et du site minier de nickel du Koniambo. Le grand complexe industriel du nord de la Nouvelle-Calédonie souffre de défauts de conception qui devraient nécessiter un réinvestissement lourd, aux alentours de 100 millions d'euros. En outre, les cours du nickel sont très bas et la production de l'usine n'atteindra pas avant plusieurs années sa vitesse de croisière. En attendant, Glencore assure l'entretien, les investissements et le paiement des salaires de quelque 800 mineurs et sidérurgistes. Pour combien de temps ? La semaine dernière, le géant suisse a annoncé le licenciement de 3.000 mineurs en Zambie et en République démocratique du Congo. Glencore est aussi confronté à la crise des cours du cuivre, tout aussi mauvais que ceux du nickel. La Nouvelle-Calédonie serait épargnée, mais alors pour quelles raisons ?
 

Que peut bien vouloir Glencore ?

Toutes les questions restent sans réponse, dans l'immédiat, et nous ne saurons rien sur cette « rencontre ordinaire », alors que le contexte de la crise est particulièrement grave pour le secteur calédonien du nickel et pour Glencore. On ne peut donc que faire des supputations. Un des plus brillants analystes londoniens du LME, qui souhaite garder l'anonymat, se veut pourtant relativement rassurant : « Si j'étais le patron de Glencore, je viendrais rappeler au gouvernement français que nous assumons la totalité des dépenses de l'usine, que nous faisons l'effort considérable de maintenir les emplois, alors que le complexe industriel nous a déjà coûté près de 7 milliards de dollars, le plus gros investissement de l'industrie mondiale ces dernières années (…). Au vu de cette réalité et selon le principe qui paie décide, je demanderais à inverser le pacte majoritaire du partenariat avec la SMSP calédonienne, autrement dit et au vu des investissements et des pertes consentis par Glencore, je demanderais l'inversion à mon profit de la répartition du capital, les fameux 51/49. Alors qu'aujourd'hui c'est la SMSP qui détient 51 % et Glencore 49 %. » Cette analyse n’a qu’un défaut, ce n’est pas le gouvernement français qui peut décider d’une évolution de l’actionnariat de l’usine du Nord mais les partenaires calédoniens de Glencore, Paul Néaoutyine et André Dang.  
 

La Nouvelle-Calédonie n'est pas l'Afrique mais…

Pour un autre analyste, parisien celui-ci, la situation africaine n'est pas transposable en Nouvelle-Calédonie : « Glencore a fait du projet Koniambo sa priorité, sa vitrine vis-à-vis de ses investisseurs. La facture du Koniambo est énorme, le projet rencontre de grandes difficultés, les cours du nickel sont bas, mais Glencore a besoin de rassurer ses investisseurs, il ne peut donc pas toucher à son projet phare, ce serait catastrophique pour son image de marque (…) Obtenir la majorité des 51 % ? Ils ont perdu jusqu'à près de 30 % de leur valeur en Bourse ce lundi, pour eux tout est une question de survie désormais, et ils vont se montrer féroce avec leurs partenaires, où qu'ils se trouvent ».
 
A l'heure où nous écrivons ces lignes, la situation de Glencore évolue de façon alarmante pour atteindre son plus bas niveau historique. En l'absence de restructuration substantielle, Glencore pourrait être au bord de l'effondrement comme l'indique le vent de panique qui a saisi lundi midi les investisseurs à la Bourse de Londres. Le titre a perdu plus de 27 % de sa valeur. Dans ce contexte, Glencore pourrait devoir entreprendre en urgence de nouvelles restructurations et cette fois tailler dans le vif. En épargnant encore la Nouvelle-Calédonie ? On le voit, il aurait été vraiment intéressant de connaître la teneur des entretiens entre Kenny Ives et George Pau-Langevin…